Chapitre 1-2

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Après que la sonnerie ai retenti, je me dirigeais directement vers ma classe, laissant Noémie un peu derrière moi. Ce n'était pas que je n'avais pas envie de la voir qui me faisait avancer aussi vite, c'était le sentiment soudain de solitude qui m'était venu en repensant à Jace et ce sentiment oppressant et angoissant qui, pour une fois, me faisait stresser d'arriver devant ma classe. Je me disais que plus vite j'y serais, plus vite ce sentiment partirait, et que j'allais donc pouvoir vivre le restant de ma journée normalement. Cependant, une fois arrivée devant la porte orangée de la salle, après avoir soufflé un bon coup en me disant que ça allait passer, je le vis. Mon corps bloqua net une seconde fois et c'est comme si tout ce qui se passait arrivait au ralenti.

En fait, ça n'allait pas passer.

Je le voyais arriver avec ces cheveux bouclés tombant devant ses magnifiques yeux verts, son petit sourire timide et son air gêné qu'il arborait à chaque fois qu'il me voyait. Je l'admirais avancer doucement jusqu'à moi, comme s'il avait peur que je m'enfuie à son arrivée. Je commençais légèrement à paniquer, me posant des centaines de questions en même pas quelques secondes quand il se stoppa net, une grande ombre blanche le surplombant. Il se retourna, mais la silhouette disparut au même moment le laissant perplexe avant qu'il ne reprenne sa marche vers moi quand je sentis une présence dans mon dos. Je me retournai légèrement et vis le t-shirt violet pastel de Noémie. Jace la vit aussi et s'arrêta aussitôt, comprenant qu'il n'était point le bienvenu, et après s'être mordillé la lèvre, il repartit en direction de son pote qui était juste derrière lui.

Quand ce genre de chose arrivait, et ce n'était pas la première fois, je me détestais. Je savais pertinemment que je l'aimais, mais je me disais à chaque fois "merde, t'es au collège et tu te prends la tête avec un mec qui t'aura oublié dans quelques mois !". Puis je me calmais et me rappelais que dans tous les cas, c'était devenu une habitude de ne pas savoir lâcher les personnes qui ne veulent plus réellement que tu fasses partie de leur vie, leur monde.

La professeure arrivait et fit rentrer la trentaine d'élèves dans la petite salle, je rentrais dans les premières voulant échapper à ce qui venait de se passer et voulant, bien sûr, réussir à avoir la place la plus au fond près de la fenêtre. Je réussis à prendre la place et m'y installais directement en laissant la place d'à côté libre pour Noémie, qui détestait être juste à côté de la vitre car, je cite : "après je vais trop regarder par la vitre et je vais finir comme toi, en échec scolaire". J'avais toujours trouvé cela ironique sachant que c'était elle, la seule du groupe à être en échec scolaire, même Enzo avait de meilleurs résultats. Après avoir passé les quatre heures de présentation à propos du brevet et de ce que nous réservait cette dernière année de collège, la sonnerie sonna enfin, me libérant de cette prof qui était sûrement capable de faire dormir n'importe quel insomniaque.

Noémie, Lili et moi, on se dirigea vers la sortie du collège pour aller manger tous ensemble et après quelques minutes, je me retrouvais seule devant le vieux grillage vert entouré par les arbres et le béton fissuré du trottoir, Noémie étant partie chercher les autres et Lili étant allé dire au revoir à son énième mec. Je la voyais d'ici, avec ces longs cheveux blond platine ondulant jusqu'à ses hanches et encadrant parfaitement ses yeux bleu océan. Elle était extrêmement jolie, ce qui expliquait en partie son succès chez les garçons, mais même si elle était, en apparence, extrêmement gentille, tu te rendais compte de son côté manipulateur et de son antipathie prononcée. Mais au vu de son passé, c'était plus ou moins compréhensif. J'attendais donc là, seule, avec un écouteur dans l'oreille gauche, attendant patiemment que mes amis arrivent pour qu'on puisse enfin aller manger ce putain de Kebab. Je râlais intérieurement sur le temps qu'ils prenaient quand j'entendis quelqu'un m'appeler à ma droite, je me retournais lentement, appréhendant la personne à qui j'avais, me semblait-il, reconnu la voix.

— Je t'en supplie ne pars pas. Me suppliait Jace avec ses deux mains devant lui, prêt à me retenir si je m'enfuyais.

— Et pourquoi je ne le ferais pas ? Dis-je en avalant ma salive.

— Écoute, je sais que t'es fâchée, et je te comprends, mais juste on va sur le trottoir d'en face et je t'explique tout.

Je le regardais fixement et prononçai un "non" que je laissais traîner comme pour lui signifier que ce n'était pas la peine de me demander une seconde fois. Je ne comprenais pas l'intérêt de changer de trottoir pour parler de ça alors qu'on était les seuls devant le collège. Il regarda avec angoisse derrière lui et après un léger temps de réflexion, il m'attrapa par le col de ma veste en cuir et me jeta littéralement sur le trottoir d'en face. Au moment où j'allais me relever pour lui en foutre une, une voiture déboula du virage à toute vitesse et s'encastra dans le grillage-là où j'étais quelques secondes plus tôt. Je regardais alors Jace avec incompréhension pendant que le conducteur, à la limite du coma éthylique, sortait de ce qu'il restait de sa voiture. Des tas de questions fusaient dans ma tête, je me demandais comment il avait pu prévoir que la voiture allait rentrer dans le grillage à ce moment-là, et comment il avait même pu prédire l'arrivée de cette voiture. Je restais donc là, au sol, en état de choc après avoir réalisé que j'aurais pu y rester s'il ne m'avait pas jeté. Il s'approchait de moi et s'assit sur le goudron du bord de la route, en face de moi.

— Ça va ? Me demandait-il l'air contrarié.

— Oui... Enfin, je crois. Je continuais de le regarder avant que ma question ne franchisse mes lèvres toutes seules. Comment tu as su ?

Il ne répondit pas tout de suite, ma question semblait alors le surprendre et je voyais très bien à son expression qu'il ne savait pas vraiment quoi répondre et qu'il cherchait ses mots. Il se mit alors à bafouiller de manière presque incompréhensible qu'il l'avait vu au moment où il m'a poussé, mais je savais que ce n'était pas vrai. Il n'avait jamais su mentir, même quand il m'avait trompé. Je me relevai avec peine et enlevai les petits cailloux de mon jean avant qu'il ne se relève à son tour.

— Je vais devoir y aller, dit-il en apercevant mes amis revenir derrière moi. On se voit ce soir que je puisse te dire ce que j'avais à dire.

Je m'apprêtais à refuser sa proposition, mais il partit avant sans m'en laisser le temps. Il est vrai que je voulais entendre ce qu'il avait à me dire, mais je ne savais pas vraiment si c'était une bonne idée ou pas.

Le restant de la journée se passa sans encombre, mes potes ne m'avaient pas trop posé de question sur ce qu'il s'était passé juste avant leur arrivée et j'avais préféré ne rien leur dire, histoire qu'ils ne s'inquiètent pas pour moi. Je savais au fond que j'aurais dû leur dire, leur en parler n'en serait-ce qu'un peu, mais je n'en n'avais pas envie. Je savais qu'ils se seraient trop inquiétés et qu'ils auraient commencé à littéralement me harceler avec toutes leurs interrogations. Je sortis du cours de mathématique qui était mon dernier cours de la journée, avec Noémie et Lili. Ces deux-là avaient décidé de prendre le bus pour une fois alors que moi, je rentrais à pied, juste pour entendre ce qu'il avait à dire. Quand j'arrivais devant le petit parking réservé au professeur, ou peu de voitures était stationné à cause de son emplacement peu pratique, à l'opposé de l'entrée du collège, je vis Jace au loin en compagnie d'Enzo, les deux se hurlaient dessus à tel point que je pouvais entendre des bribes de conversation.

— Tu ne peux pas lui dire ! Tu sais que...

— ... Gueule ! Elle le saura... Ou l'autre !

— ... Par ta faute, petit fils de...

Au moment où ils allaient sauter dessus, je me mis entre deux pour qu'ils se stoppent. Enzo me regardait avec incompréhension avant que je ne me retourne vers Jace et que je lui demande ce qu'il s'était passé.

— Demande-lui, il a des choses à te dire. Crachait-il. Ça fait trop longtemps qu'on te le cache et comme c'est lui qui casse les couilles, c'est lui qui te le dira !

Il repartit donc et en quelques secondes, il n'était déjà plus dans mon champ de vision. Je me retournai ensuite vers Enzo, j'étais sûr cette fois-ci que Jace n'avait pas menti, le côté droit de ses lèvres ne s'étant pas retroussé, et je me demandais donc ce qu'Enzo pouvait me cacher. Je ne pouvais d'ailleurs pas m'empêcher de me sentir un peu déçu, je savais très bien que Jace, Enzo et moi avions grandi ensemble, mais avec tout ce qu'il s'était passé, je pensais qu'il se serait dirigé vers moi s'il avait un problème.


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