Chapitre 8-1

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Suite à ça, on m'avait emmené dans une salle un peu plus loin derrière quelques portes au terme de plusieurs couloirs. Puisque j'étais incapable de marcher ou même de me lever. On m'avait trainé jusque sur une chaise en plein milieu de la pièce, et on m'avait tout de suite attaché avec des sortes de sangles, renforcé par endroit avec un métal verdâtre. J'étais capable de reconnaître ce métal entre mille, il s'agissait du fer de pheobe. C'était un métal très rare que l'on ne trouvait qu'au centre de montagne, et ce dernier était réputé pour sa capacité a coupé les pouvoirs de n'importe qui, même lorsqu'il n'est présent qu'en petite quantité et l'ingérer pouvait vous retirer vos pouvoirs à vie. Il y avait pas mal de légendes qui trainaient à propos de ce métal, mais personne ne savait pourquoi il avait un pouvoir aussi enviable.

Cela faisait plusieurs heures que j'étais assise ici sans pouvoir faire le moindre mouvement. L'endormissement de mes pouvoirs faisait que tout mon corps me faisait atrocement souffrir dû aux nombreux coups que je m'étais pris jusque-là. Même certaines vieilles blessures me faisaient mal, comme si j'étais redevenu totalement humaine et que mes blessures, que mon corps soignait lui-même, se rouvraient peu à peu.

Mais ces blessures, aussi douloureuses soient-elles, ne me faisais pas du tout réagir. Je restais là, assise, à regarder dans le vide, sans même me débattre à un seul moment. J'avais souvent rêvé de perdre mes pouvoirs, de redevenir la petite fille banale que j'étais, qu'il n'avait absolument rien d'extraordinaire si ce n'est sa fainéantise légendaire. Sauf que maintenant que je les avais réellement perdues, ça m'en rendait malade. C'était sans doute par ce que le moment était mal choisis pour qu'ils disparaissent et que ça devait être pour ça que je ne le supportais pas. Cependant, je voulais qu'ils reviennent, je m'étais pris la réalité en pleine face, sans ces pouvoirs, je n'étais plus rien, seulement quelques bouts d'os et de chairs déchiré qui finiraient en poussière avec le temps. Cela justifiait mon inaction, je voulais qu'ils reviennent.

La porte claqua bruyamment, me faisant sortir de ma réflexion quelque peu déplaisante. Je relevais alors mon visage endolori par des blessures (qui n'avaient pas cessé de se rouvrir) et regardait Jessica qui venait de rentrer dans la salle. Elle avait bizarrement l'air moins froide que d'habitude et son visage semblait se détendre pour la première fois depuis longtemps, j'avais l'impression de la reconnaitre. En fait, je la reconnaissais.

— Tu vas morfler, accepte maintenant qu'il en ait encore temps. Me dit-elle en s'accroupissant devant moi, de façon a ce qu'elle soit au même niveau que mon visage.

— Je ne peux pas... Dis-je faiblement en regardant dans le vide.

— Pourquoi ? Tout s'arrangerait !

— Pourquoi pas ? Je sais qui tu es Jessica. Jared est au courant que t'es là au moins ? Et soyons honnête, je pense que même si j'accepte, il me torturera quand même, d'une autre façon peut-être.

— Pourquoi il ne le serait pas ? Me dit-elle avec un petit rire.

— Parce que tu ne veux pas qu'il sache que tu t'inquiètes pour Liam au point d'aller retrouver sa prisonnière dans son dos. Cette situation l'amuse, je ne pense pas qu'il veuille y mettre fin désormais.

— Liam ? Pourquoi je m'inquièterais pour un traitre qui...

— Tu es la femme de la photo qu'il garde tout le temps sur lui. C'est pour toi qu'il a fait tout ça et pour une raison qui m'échappe tu te souviens parfaitement de lui.

Elle sembla surprise, mais ne me contredisait pas pour autant. Elle se laissa alors tomber sur ses fesses et posa lentement ses avant-bras sur ses genoux.

— Il te l'a dit ? Elle marqua une pause. Bien-sûr qu'il te l'a dit... tu as raison, Jared ne sais pas, je ne suis pas censé me rappeler Liam.

— Alors, je pourrais te faire du chantage en échange de ma liberté.

— Non, il ne te fera pas partir pour autant, il me torturera pour que je lui dise de quoi tu parles. Ou sinon, il te forcera à le dire de toi-même, que tu le veuilles ou non.

— Dis-moi directement ce que tu veux. Je t'aiderai si tu me fais sortir d'ici.

— Dans cet état-là tu ne pourras pas m'aider et soyons honnête, t'as vie ne vaudra jamais n'importe quel service je pourrais te demander.

— Tu sais que tu as tort. Pense à la vie que tu pourrais avoir si tu...

— Ça suffit. Elle se releva précipitamment. Je ne risquerais pas de sacrifier ma vie pour sauver la tienne.

Elle se dirigea rapidement vers la porte en faisant tinter les petites chaines argentées de son jean.

— Tu sais que t'y a plus à y gagner en tentant de me sauver qu'en restant prisonnière d'un gars avec clairement un gros problème mental.

Elle ne répondit alors rien et continua sa route jusqu'à la porte qu'elle ferma une fois sortie. Je ne savais pas vraiment si j'avais réussi à la convaincre de tenter quelque chose, mais j'espérais. Même si ça n'aboutissais pas, je pourrais largement en profiter pour faire au moins sortir les autres, quitte à faire mourir Jessica. Après tout, Liam ne l'a pas encore vu et ne la verra sûrement jamais, alors il ne m'en voudrait pas. Je me sentais mal de penser de cette manière, mais il fallait que je sauve les autres et que je récupère mes pouvoirs. Je soupirais et laissais tomber ma tête en arrière. Comment pouvais-je sortir de là sans pouvoirs, sans forces, et bien sûr avec un corps qui me lâcherait à la première occasion si ça n'était pas déjà le cas.

***

J'avais l'impression d'être là depuis une éternité, peut-être que ça faisait maintenant plusieurs heures que Jessica était partie, mais peut-être qu'en réalité ça ne faisait que quelques minutes. J'avais perdu la notion du temps depuis longtemps déjà. Mon seul repère était Jessica qui, deux fois par jour, me détachait la main gauche pour que je puisse manger le maigre bout de sandwich dont j'avais la première moitié le matin et la seconde le soir. Sinon le reste du temps, j'étais seule dans une pièce sans aucune lumière. J'allais devenir folle et folle était un euphémisme. Vraiment j'allais péter un câble. Sauf que j'étais tellement affamé et faible physiquement que même péter mon câble devenait impossible. Je restais juste là, à regarder le sol ou le plafond fixement. Je m'efforçais de garder un minimum de sainteté d'esprit en m'occupant, si je ne dormais pas j'essayais de voir les différents motifs floraux du papier peint ou de conter les fissures au-dessus de ma tête.

Mais pour être honnête, je commençais à ne plus réussir à m'occuper, l'ennui forçait mes pensées à me ronger de l'intérieur.

DemonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant