30. Ondine

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Je sortis de la tente, dehors, le soleil n'était pas encore levé et tous les autres dormaient. Une brise légère m'obligea à retourner dans ma tente pour prendre mon pull. Cette nuit, il avait fait froid, il restait des traces de gel, autour de la rivière et la rosée du matin perlait déjà sur les fleurs.

Je me dirigeais vers la table et me préparais un chocolat chaud. En attendant que les autres me rejoignent, je partis en direction de la rivière. Je la longeais, jusqu'à arriver à une clairière, de là, je montais dans un arbre sans un bruit et observais les biches, venus brouter tranquillement. Un bruit attira mon attention, en dessous de moi, je baissais la tête et manquais de crier, en dessous, assise contre l'arbre, se tenait l'Ombre. Elle leva sa tête et me regarda, instinctivement, je reculais, sauf que dessous moi, les branches venaient de se casser. Je fermais alors les yeux et une surface gelée m'obligea à les rouvrir. Devant moi, se tenait l'Ombre, de ses mains tendues, un froid glacial sortait.

Je regardais en dessous de moi, une surface de glace venait de me sauver de ma chute. Je compris alors que c'était l'Ombre qui faisait ça, elle pencha sa tête sur le côté et ouvrit ses yeux, jusqu'alors noirs. Ils étaient maintenant bleu, aussi bleu que les miens. Elle fit descendre la plateforme où j'étais, jusqu'à ce que je puisse poser mes pieds par terre.

— Que me veux tu ?

Elle ne répondit rien. Elle ne me fit pas de mal non plus. Elle se contenta juste de me faire un signe de main, m'encourageant à la suivre. Je sortis le couteau qu'Eoline m'avait donné, persuadé qu'il m'aiderait alors qu'en fait, il servait plus à me rassurer.

Je la suivais donc, à travers la forêt somnolente, plusieurs mètres derrière elle. Elle prit plusieurs chemins et au bout d'un moment, je me rendis compte que j'étais bien loin du camp et de toute aide.

Au bout d'un moment, je sus que nous étions arrivés à destination. Devant moi, s'étendait un immense lac. Le paysage avait complètement changé, nous étions maintenant au pied de montagnes, toutes plus grandes les unes que les autres. Tout en haut, la neige éternelle se reflétait dans les profondeurs du lac. De temps en temps, un aigle surgissait, poussant son cri et disparaissait aussitôt. Les fleurs commençaient à s'ouvrir et les poissons nageaient à toute vitesse dans l'eau.

Je regardais l'Ombre, j'en avais presque oublié sa présence. Elle me montra le lac, tendit ses mains et gela l'eau. Elle me regarda et baissa ses bras.

"Maintenant, dégèle."

Je la regardais, surprise, elle venait de me parler mais je l'avais entendu dans ma tête. Ses lèvres n'avaient pas bougées.

J'essayais tant bien que mal d'enlever toute cette glace, je me concentrais et essayais de mettre de l'eau dessus, afin de faire fondre la glace mais à peine l'eau se posait sur le lac, elle devenait aussitôt solide. Je recommençais un nombre incalculable de fois. Chacune de mes tentatives étaient des échecs.

"Si tu ne réussis pas, alors tu ne partiras pas."

— Quoi ? Les autres vont s'inquiéter !

"Nécessité fait loi".

Je m'accroupis et continuais alors avec plus d'entrain ma tâche.

Puis, alors que des larmes commençaient à perler sur mes joues, elle s'approcha de moi et du bout des doigts, toucha ma main, elle donna une violente claque et mes doigts gelèrent aussitôt.

Elle attrapa alors mes bras et les tendit vers l'étendue d'eau. Je restais comme ça, un moment, puis elle les lâcha mais je ne bougeais pas, une vague me parcourait, elle était d'abord partit de ma tête, elle se dirigeait maintenant vers mes bras, mes mains, et enfin mes doigts, je sentis alors un picotement au bout de mes ongles. Ce que je vis alors me laissa sans voix, je vis des millions de flocons, rentraient sous ma peau, le lac était en train de se dégeler.

Une fois l'eau retournée à la normale, l'ombre s'approcha de moi et m'obligea à me relever. Un brouillard passa devant son visage, je voyais à présent sa bouche, son nez, ses joues, elle me ressemblait. Puis un autre brouillard noir effaça mon visage et l'Omre prit le visage de mes parents. Son côté droit était celui de ma mère et celui de gauche était celui de mon père, horrifié, je tentais de toucher ses visages aussi familier, hélas, quand ma main toucha la joue de ma mère, l'Ombre se déroba et le décor avec elle. Je me réveillais en sursaut, j'étais toujours dans mon arbre. Je descendis et partit en courant vers le camp, persuadé que les autres s'inquiétaient. Une fois arrivée, je vis Lucas sortir de sa tente.

— Alors, bien dormi ? Me dit-il.

Je m'asseyais, je ne comprenais plus rien, alors tout ça n'était qu'un rêve, pourquoi ma conscience me faisait vivre ça, et si justement, l'Ombre n'était autre que le fruit de notre imagination, notre conscience voulant nous ramenait là où nous devrions être normalement. Je mis ma main dans ma poche et mes doigts rencontrèrent un papier, curieuse, je le sortis de ma poche, le dépliais. Dessus, un feutre noir avait tracé ces quelques lignes.

Bien joué, un lac, ce n'est pas le plus facile... On se revoit bientôt...

Suivi d'un flocon joliment dessiné.

Je décidais de garder ça secret, les autres me prendraient pour une folle...

J'entamais donc la journée avec cette fierté, de pouvoir contrôler la glace et l'eau mais avec toujours ce sentiment, d'être observé...

THE S.E.V.E.N.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant