8. Le Sursaut

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Un pas après l'autre, Matsumoto avance vers la salle de sa classe. Elle commence à se souvenir de tous les noms, et c'est à peu près tout ce dont elle peut se vanter, puisque Koko passe un temps infini à lui expliquer ses leçons dès qu'elle rentre chez elle, ou à les corriger, lui disant que dans le cas de tel ou tel cours, une chose pareille ne pourrait pas avoir été dite par un professeur. Alors en se maudissant, l'adolescente corrige, reprend, et tente d'apprendre, sous les directives pourtant claires de son amie.

En fait, si elle pouvait ne pas aller à l'école, et avoir les cours de l'autre jeune fille, Matsumoto le ferait. Elle serait là, assise à son bureau, ou dans son lit, attendant le message qui dit qu'elle peut appeler, et écouterait Koko, et ses paroles limpides, ses explications simples, et sa capacité à tout lui faire retenir ou presque, sans qu'elle ait l'impression d'avoir fourni le moindre effort. Mais Koko n'a pas que ça à faire, et elle doit à présent tenter de se débrouiller toute seule.

Elle entre donc dans la salle avec cette idée précise en tête.

Reiko entre elle aussi dans sa classe, comme tous les autres, sans se bousculer

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Reiko entre elle aussi dans sa classe, comme tous les autres, sans se bousculer. Elle regarde ses camarades tout en s'installant, remarquant amèrement que personne ne semble se soucier de la place vide près d'elle, ni d'elle-même. Elle soupire, sort ses affaires, et commence à noter ce qu'elle pourrait faire faire pour aider Matsumoto à comprendre telle ou telle partie de ses devoirs de mathématiques, à rendre pour le lendemain.

- Je peux m'asseoir près de toi ? demande soudain une de ses camarades.

L'adolescente la considère suffisamment longuement pour que l'autre, mal à l'aise, retire sa main de sur la chaise côté couloir, pour croiser les mains devant elle.

- Tu peux.

- Merci, répond-elle en s'empressant de s'installer à son tour.

Elle sort ses cahiers, et les range dans un coin de la table, en silence.

Il n'y a pas grand monde, encore à cette heure. C'est peut-être pour ça qu'elle n'avait pas tout à fait relevé le problème, ou les regards insistants. Avant qu'elle ne se reconnecte au monde réel.

La fille à côté d'elle est Misako Yoshino, la fille qui a des parents divorcés depuis deux mois. Celle qui a soutenu Matsumoto tout de suite après elle. La seule autre fille de la classe dans ce cas-là. Et au cours de cette semaine si morne, où elle était occupée à se plaindre dans son coin de sa solitude, Yoshino allait voir sa mère à l'hôpital, après sa tentative de suicide.

- Tu ne sais pas à quel point tu peux attirer les gens qui ont besoin d'un pilier solide pour garder pied, lui avait dit une fois son père, lorsqu'elle grinçait après les filles qui ne venaient la voir que pour lui parler de leurs problèmes. Tout le monde n'a pas la chance d'avoir quelqu'un comme toi à portée de main. Aide les autres. Ce n'est pas comme si ça te coûtait vraiment de le faire.

Reiko grommelle pour elle-même, se disant très aimablement que son père et elle n'ont de longues conversations sur ce qu'ils doivent apporter à une société qui ne leur apporte pas grand-chose, et lui faisant des leçons de vie qu'elle s'évertue quand même à appliquer.

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