39. Le Chassé

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En arrivant chez elle, ou plutôt chez son cousin, Matsumoto se sent incroyablement bien pour la première fois. Rien ne semble pouvoir la calmer, ni sa douche, ni les étirements qu'elle refait ensuite. Elle est obligée de demander à Tooru de l'aider à redéplacer les meubles, jusqu'à ce que finalement, lorsque le reste de la famille rentre du rendez-vous parent-professeur d'Eimi, elle est encore au beau milieu du salon, glissant sur le parquet mouillé de sueur.

- Matsumoto... commence son oncle.

Elle se tourne vers lui et il s'arrête net. Lui parler des soucis de comportement de sa petite sœur en ce moment n'est peut-être pas la meilleure idée qui pourrait leur passer par la tête à une heure pareille. Il se contente alors de lui faire un sourire rassurant, et d'un commun accord avec sa femme et la petite fille, il demande à la place :

- Comment s'est passé ta journée ?

- Bien, et vous ? Ce rendez-vous, alors ?

- Très bien ! temporise-t-il sous le silence de ses deux complices. Est-ce-que le repas est prêt ?

Elle fait la moue et secoue la tête. Non, elle n'a pas préparé le repas, et c'est une différence entre sa famille et celle de ses cousins, parce qu'on n'a jamais attendu d'elle avant que le repas soit prêt lorsque les adultes rentrent, sauf cas exceptionnel, où on lui demandait à l'avance de préparer quelque chose.

- Moi, j'ai fait à manger ! s'écrie Tooru de la cuisine. Et c'est prêt dans vingt minutes ! Vous avez tous le temps de passer à la douche.

Il apparait avec son tablier bleu à la citation : « Meilleure cuisinière de la famille », une cuillère en bois à la main. Il leur fait un immense sourire fier de lui, et elle s'étonne encore une fois de la polyvalence de talents de son précieux cousin. Alors même que ce n'est pas la première fois qu'il se retrouve aux fourneaux. Ce n'est qu'au moment où il lui propose de l'aider à remettre les meubles en place et qu'il se baisse pour l'aider qu'elle remarque les deux pinces plates qui lui tiennent deux mèches sur le côté.

Elle rit. Franchement, les lèvres pincées, grimaçant en cours de route parce que ses abdominaux ne supportent pas bien le poids de ce qu'elle transporte à cause de ses spasmes. Tooru la regarde avec curiosité.

- Rien, rien... !

Il fronce le nez, et lui dit d'un regard qu'il ne la croit pas une seconde. Ce n'est qu'au moment où Eimi lance :

- Mais pourquoi tu as mis des barrettes ?

Qu'il retire vite fait, rouge poivron. Matsumoto rit de plus belle, sincèrement amusée. Il s'était sûrement attaché les cheveux le temps de faire à manger, ou de se mettre de la crème hydratante sur le visage, et les avait oubliées.

Elle s'essuie les yeux en finissant par dire :

- Tu vas vraiment me manquer, toi.

De contrariété, il passe à stupeur, et hausse les sourcils.

- Te manquer ? Tu as eu des nouvelles de tes parents ?

Sa cousine secoue la tête, moins enjouée, mais encore souriante.

- Non, pas du tout. Mais on rentrera chez nous un jour. On ne peut pas rester chez vous pour toute l'année !

- Mais... tu veux dire que Koko-chan va aussi devoir rechanger d'école ? Ce ne serait pas plus simple que vous restiez là ? Au moins le temps de finir le lycée ? demande-t-il en se souvenant d'une conversation nocturne entre ses parents.

De ce qu'il en avait compris, eux-mêmes pensaient que c'était la meilleure solution, alors... pourquoi pas ?

- Tooru, c'est adorable de ta part, mais j'ai hâte de reprendre ma vie d'avant. C'est bien, ici, on est au calme. Mais c'est loin des grandes écoles, et je voudrais être prise dans une de danse, alors... ce sera mieux si je peux aller à cette proche de l'école d'Eimi, à Kimogata.

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