42. La Barre

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Matsumoto se réveille avec l'impression que la nuit a été affreusement longue, mais se rend compte qu'elle n'a pas dormi plus de deux heures. Elle a très froid. Après s'être retournée dans son lit trop de fois pour les compter, elle a à présent tellement froid qu'elle ne peut pas faire autrement que d'aller chercher un pull dans le placard. Les sueurs glacées qu'elle a la sensation de sentir le long de son dos ne la trempent pas plus que si elle transpirait vraiment : elle est pourtant encore terrifiée.

Elle peine à mettre le pied par terre, et quand elle le fait, elle doit s'accrocher au rebord du lit pour rester debout. Arrivée là, elle n'arrive à ouvrir le placard qu'une dizaine de minutes plus tard, et fait tomber toute la pile de vêtements. L'adolescente gémit, attrape ce qu'elle cherchait, et laisse le reste en plan, se glissant à nouveau sous la couverture.

Elle frissonne. Le souvenir du sol rugueux lui écorchant les genoux quand elle essayait de se relever, avec sa côte abîmée, mais pas encore fêlée, et son bras douloureux la fige. Elle s'était quand même appuyée sur ses deux mains pour se relever. Matsumoto se sent nauséeuse, et les draps en coton ne changent pas la sensation qu'elle a sur la peau, là où sa chemise s'arrête, au milieu de ses mollets.

Elle tremble de plus belle, et attrape maladroitement son téléphone, parvient à mettre les écouteurs dans ses oreilles, et à lancer la première musique que l'écran affiche. Elle a besoin d'entendre le rythme cogner contre ses tympans pour s'endormir, même si elle doit se lever enroulée dans le câble, ou qu'elle doit se réveiller en cours de nuit parce que son téléphone lui presse le dos alors qu'elle s'est allongée dessus.

La musique la berce un temps, avant qu'elle ne parvienne à s'imaginer faire cette chorégraphie qu'elle a tant répété, levant les bras dans sa tête, reculant d'un pas, le pied pointé devant, la hanche volontaire. La mélodie s'envole, lui attrape le cœur et l'emballe avec elle. Ce n'est qu'une fois que leur rythme a baissé à toutes les deux qu'elle peut se rendormir.

 Ce n'est qu'une fois que leur rythme a baissé à toutes les deux qu'elle peut se rendormir

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Bom boom bot bom boom boom bot...

Ce n'est qu'une fois que le bruit leur parvient au travers des rues, que Reiko commence à respirer. L'adolescent la voit s'animer pas après pas. Et en dépit de tout le maquillage qu'elle porte, il peut voir qu'elle sourit presque, alors qu'elle se mord la lèvre rose de gloss.

- Tu vas bien ? lui demande-t-il pendant qu'elle met ses mains dans ses poches.

- Oui, ça va. Et toi ? Pas trop le trac ?

Il ricane.

- Je suis aussi mort de trouille que j'ai hâte d'y être, avoue-t-il en souriant.

Elle le regarde, se tournant de buste pour ne pas être gênée par la capuche qui lui couvre les cheveux et le visage.

- Je ne te savais pas aussi impavide, remarque-t-elle.

- Tu as dit que tu y allais souvent, et que c'est pas dangereux, pas vrai ?

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