32. La Pirouette

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C'est avec un soupir de soulagement que Tooru quitte l'entrainement, la boule au ventre. Il a rassemblé tout son courage pour parler à Reiko de son plan pour faire le tour des rues discrètement, et il se dit qu'une fille qui rase les murs comme elle a tendance à le faire aura quelques conseils à lui donner. Il est sûr que l'idée est meilleure que de l'impliquer ou de demander à son meilleur ami d'aller se faire tabasser avec lui.

Et puis, il n'a pas spécialement prévu de se faire frapper, cette fois, juste de partir en repérage...

Il sort du vestiaire dans les derniers et se heurte au premier mur : Hajime l'attend, dos au bâtiment. Comment lui expliquer que pour la première fois en plus de dix ans, il allait rentrer de son côté ? Il secoue la tête en se disant que non, ce n'est pas la première fois, mais que d'un autre côté, c'est la première fois qu'il lui dira très peu honnêtement qu'ils ne feront pas le même chemin.

- Tu n'aurais pas dû m'attendre.

- Ah ? dit-il faussement surpris. Tu as une fille à voir avant de rentrer ?

Profitant de l'excuse toute trouvée, il acquiesce :

- C'est ça. Mais ça va être un peu long, alors...

- J'ai l'habitude, je vais attendre, dit Hajime en haussant les épaules. Tu penses en avoir pour combien de temps ? Si c'est long, je vais bosser à la bibli-

- Nan, ça va vraiment être long, je vais peut-être dire oui, cette fois.

Son ami s'arrête net pour l'observer. Il n'est pas juste surpris. Il est hébété. Carrément sur le cul.

- Hein ? C'est qui ?

- Tu connais pas, répond-il rapidement. Enfin, voilà. Ça va prendre un bout de temps, et je vais rentrer très tard, alors ne m'attends pas.

- D'accord... tu me la présenteras ?

- Seulement si ça marche, rit-il nerveusement.

Hajime lui fait un clin d'œil, et lui donne une tape sur l'épaule ;

- T'inquiète, ça va bien se passer. Et puis, au pire, tu as mon numéro pour pleurer toute la nuit.

Cette fois, Tooru sourit vraiment. C'est pas donné à tout le monde d'avoir un pote pareil. Alors il hoche la tête en promettant sincèrement :

- Si j'ai besoin de pleurer cette nuit, je t'appelle.

- A demain.

- Ah, attends, le retient-il au dernier moment. C'est bientôt l'anniversaire de Matsumoto, et je voulais demander à Koko-chan si elle avait une idée, tu sais si elle est déjà partie ?

Hajime le regarde comme s'il venait de tomber sur la tête.

- Non, je ne sais pas. Pourquoi je le saurais ?

- Je sais pas, comme t'es devant le portail depuis tout à l'heure.

Le volleyeur se tourne vers l'entrée, qu'il avait effectivement en visuel. Sauf que ça ne lui est pas venu à l'idée de surveiller qui sortait du lycée. Connaissant la jeune fille...

- Ou elle est partie depuis longtemps, ou elle attend Matsumoto à la bibliothèque.

- D'ac', merci. A demain, alors.

Hajime lui fait un signe de la main, et s'en va, les écouteurs dans les oreilles. Il ne pense que plusieurs minutes plus tard qu'il avait le numéro de téléphone de Reiko et qu'il aurait pu lui donner, avant de se dire qu'il se serait sûrement fait chambrer pour l'avoir eu, et à raison. Parce qu'il n'envoie jamais un message désintéressé à la lycéenne depuis qu'il l'a. Sauf peut-être maintenant.

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