Solitaires

29. Le Glissé

Hajime passe en revue les indices que Tooru a laissé derrière lui au cours des derniers jours. Il n'y a pas que les airs absents aux entraînements qui l'inquiètent. Il y a aussi sa dernière conversation avec Reiko. Pas moyen de savoir de quoi ils ont parlé tous les deux, et la jeune fille cache bien ses angoisses, rendant son comportement lisse plutôt curieux. Demander cependant son numéro de téléphone pour lui en parler serait étrange. Aussi, il s'abstient, et préfère laisser son propre numéro dans le casier de la jeune fille, des fois qu'elle ne l'ait plus.

Celle-ci le trouve facilement, et d'un geste tranquille, elle le cache dans sa poche avant même que Matsumoto ne le voie. Et quand elle sort finalement du lycée, elle compose le numéro, envoyant un premier message : « J'ai bien eu ton numéro. N.R. ».

Il y répond rapidement avant de terminer de s'habiller pour l'entrainement : « Il faudrait que je te parle. I.H. ».

La réponse arrive au moment où il fait ses lacets, et Tooru attrape l'appareil, curieux :

- Tu as un nouveau message. C'est qui ? Le numéro n'est pas enregistré.

Hajime attrape le téléphone, et répond, soulagé à : « Quand tu as terminé ? Je peux t'attendre », par un « Si ça ne te dérange pas. Je termine à 18h. », avant de laisser son téléphone dans son casier.

- Quelqu'un pour les devoirs. Pourquoi ? Tu es curieux ? répond-il d'un air narquois.

Son coéquipier pose sa main sur son épaule, très sérieux :

- Si tu voyais une jolie fille, tu me le dirais, pas vrai ?

- Pour que tu me la pique ? Même pas en rêve, dit-il sur le même ton.

Les deux amis se regardent dans le blanc des yeux, puis éclatent de rire sincèrement. Ils finissent par rejoindre le reste de l'équipe dans le gymnase, et Tooru finit par lancer un speech différent. Parce qu'après tout, en étant le capitaine de l'équipe, il ne peut pas juste leur resservir les mêmes exercices sans raison. Il doit aussi étudier leurs adversaires.

- Bon. Honnêtement, vu la prestation que nous a offert Karasuno l'année dernière, et leur évolutions rapides de jeu, je pense que c'est d'eux dont il faudra se méfier pour les sélections d'automne. Si on ne veut pas se prendre une rouste, il va falloir mettre les bouchées doubles.

Un grincement les fait sursauter, et la tête de Matsumoto apparait dans l'encadrement.

Le coach grince des dents, et Tooru clôture rapidement pour aller voir sa cousine :

- Donc on se concentre, on travaille ses lacunes, et si vous avez des remarques à faire sur le jeu, faites-les. Chaque point fort ou faible travaillé nous aidera à nous rapprocher de la victoire. Allez les gars.

Les coéquipiers sourient, motivés, et se concertent dans un brouhaha fou, tandis qu'il s'approche de la danseuse en courant.

- Désolée de te déranger... je peux rentrer avec vous, ce soir ? Je ne me sens pas de rentrer toute seule...

Il remarque tout de suite que son sourire faussement rassurant tremble, et il tend la main sur le côté :

- Pas de soucis, tu veux rester avec nous en attendant ?

Le vendredi est le seul jour où les classes de danse n'ont pas toujours lieu. Alors si elle ne les a pas, elle finit plus tôt qu'eux. Tooru a manqué de lui demander si elle a revu les types qui l'ont attaquée. Elle a visiblement couru, et elle est inquiète. Mais ça serait mal venu de sa part, et il ne voudrait surtout pas qu'elle se renferme sur elle-même. Non. A la place, il lui fait un charmant sourire, et mine de rien, lui propose de se joindre à eux.