Protection rapprochée

Second essai

Lorsqu'il était enfant, Harry Potter rêvait de beaucoup de choses. De liberté, loin du placard dans lequel il avait grandi. De tranquillité, loin de la guerre dans laquelle il avait été précipité dès ses onze ans. D'une famille, dont il avait été privé toute sa vie.

Et puis, il y avait eu le face-à-face avec Voldemort.

Harry était mort, un bref instant et ça avait été suffisant pour bouleverser sa vie entière. Il avait changé et il n'avait jamais osé en parler, même à ses amis les plus proches.

Le monde magique attendait de lui qu'il suive les traces de son père, qu'il soit un Auror, pour garder le monde magique en ordre. Il avait perdu la vocation - s'il l'avait jamais eue - mais il ne chercha pas à lutter, plus par désœuvrement que pour une autre raison. Il savait ne pas avoir réellement envie d'être Auror, mais il n'avait pas la moindre idée de ce qu'il pourrait faire d'autre.

La célébrité qui l'avait tant gênée était toujours aussi pesante et il se faisait aussi discret que possible, cherchant avant tout à se faire oublier. Il détestait être reconnu dans la rue et abordé, félicité pour quelque chose qu'il n'avait pas contrôlé, pour avoir tué un homme.

Au lendemain de la bataille qui avait mis fin à la guerre, beaucoup l'avaient donc imaginé Auror, marié et père très rapidement. S'il était bel et bien Auror comme prévu, il n'était ni marié, ni père de famille.
Ginny avait longtemps espéré auprès de lui, bien que Harry ne lui ait jamais caché qu'il ne souhaitait pas reprendre une relation avec elle. Harry avait pris conscience qu'il n'aimait pas la jeune fille, mais son image, l'identifiant en quelque sorte à sa mère disparue. Il y avait eu de nombreuses disputes entre eux, jusqu'à ce qu'il menace de ne plus venir au Terrier. Molly avait aussitôt eu une longue discussion avec sa fille et leurs relations s'étaient légèrement apaisées, même si la seule fille Weasley avait toujours l'espoir de terminer à son bras dans une belle robe blanche.

Puisqu'il ne voulait pas que sa vie privée soit exposée dans la gazette, il s'était montré particulièrement discret sur ses sentiments. Il restait volontairement évasif, sans oser avouer qu'il n'avait pas trouvé la personne qui ferait battre son cœur et qu'il préférait la solitude.
Il était resté cependant extrêmement proche de ses meilleurs amis, Ron et Hermione. Tous les deux n'avaient pas attendu longtemps avant de se marier et Harry était prêt à parier qu'ils allaient fonder une famille dans les plus brefs délais.

Ron l'avait suivi chez les Aurors, décidé à rester lié à son ami. Cependant, il avait vite compris que le métier ne l'attirait pas et il avait rapidement décidé d'abandonner pour rejoindre son frère George et l'aider à gérer sa boutique. L'absence de Fred pesait au jumeau survivant et c'était le prétexte que Ron avait saisi pour s'en tirer sans avoir l'air de renoncer.
Hermione était entrée au Ministère, comme elle l'avait prévu. Sa soif permanente de connaissances apportait un vent de fraîcheur au sein de la vénérable institution et bousculait les habitudes établies. Certains s'en plaignaient, mais pour la plupart, c'était ce qu'il fallait pour moderniser et dynamiser le monde magique.

Même si les trois amis étaient bien occupés dans leurs vies professionnelles, ils restaient toujours aussi liés, se voyant pratiquement toutes les semaines, complices et inséparables.

Ainsi donc, cinq ans après la fin de la guerre, Harry Potter était un célèbre Auror. Ce n'était peut-être pas le métier de ses rêves, mais il s'y impliquait à fond et il se surprenait en découvrant qu'il était plutôt bon.
Ses collègues plus âgés l'avaient vu débarquer avec réticence, craignant un gamin imbu de lui-même et voulant tout révolutionner. Au lieu de ça, il était arrivé, mal à l'aise, se passant nerveusement la main dans les cheveux et prêt à apprendre.

Peu à peu, il avait fait ses preuves et le chef actuel des Aurors, Robards, l'avait pris sous son aile, se chargeant personnellement de son entraînement.
Harry était rapidement devenu Auror confirmé, pas à cause de sa célébrité, mais bien grâce à ses compétences, capable d'intervenir seul si la situation l'exigeait, excellent combattant - prouvant à tous qu'il n'était pas juste un symbole, mais bien l'adolescent qui avait défait Voldemort. Pourtant, il continuait de suivre les conseils de Robards, comme si leurs séances d'entraînement physique dans une salle dédiée du Ministère étaient un moment de plaisir et non pas l'occasion pour l'Auror vieillissant d'en faire baver au jeune homme qui serait très probablement un jour son successeur.

- Allez Potter, un peu de nerfs ! Sur le terrain, tu n'auras pas de second essai.

Le jeune homme se releva souplement après une roulade en ricanant et désarma son instructeur d'un geste fluide. Puis il croisa les bras, levant les yeux d'un air plein de défi.
Même s'il leva les yeux au ciel, l'Auror en chef ne put empêcher un léger sourire de jouer sur ses lèvres, fier du jeune homme face à lui.

Le gamin timide qu'il avait un jour accueilli s'était métamorphosé en un homme plus sûr de lui, aux réflexes toujours aussi aiguisés. Il était plus confiant, également et avait appris à croire en son talent sans pour autant afficher une assurance pleine de morgue. Le petit garçon trop maigre avait grandi, s'était étoffé - et même s'il refusait de l'entendre - était devenu le rêve de beaucoup de jeunes femmes à travers le pays. Ses cheveux noirs trop long, qu'il nouait en un chignon approximatif, ses yeux verts contrastant avec son teint mat faisaient des ravages...

Face au visage rieur du jeune homme, Robards soupira.
- Allez, terminé pour aujourd'hui.
Harry prit un air malicieux, essuyant la sueur sur son front de l'avant-bras, retrouvant rapidement une respiration normale.
- Déjà fatigué chef ?

Ils furent interrompus par l'arrivée du Ministre de la Magie en personne, Kingsley Shakelbot. Si Robards hocha la tête avec réserve, Harry s'approcha d'un air décontracté pour saluer l'homme. Après tout, ils avaient combattu ensemble. Kingsley était l'un des premiers Aurors qu'il avait rencontré et qui lui avait un moment donné envie de faire ce métier.
- Kings ! Tu viens vérifier mes performances ?

Le grand noir laissa échapper un rire tonitruant et secoua la tête.
- Pas tout à fait gamin. Je viens te voir pour une mission spéciale. Ça te tente ?