T'être dévoué

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Si au départ Harry avait prévu un bref passage sur le chemin de Traverse, plus pour se montrer qu'autre chose, ils restèrent finalement bien plus longtemps. Ils déjeunèrent sur le pouce au Chaudron Baveur, avant d'aller prendre un dessert à la terrasse de Florent Fortarôme. Puis, ils flânèrent longuement, ignorant les regards qu'ils croisaient.

Drago devait avouer qu'il oubliait complètement les raisons de leur promenade, et il avait l'impression de revivre. Harry le traînait d'une boutique à l'autre, et ils discutaient agréablement. Ils plaisantaient, riant ensemble, chahutaient en se bousculant et en souriant largement, avant de reprendre leur sérieux pour quelques instants. Ils se redécouvraient sous un nouveau jour, s'amusant de se rendre compte que malgré les années ils se connaissaient encore parfaitement. Comme à Poudlard.

Et surtout, ils ne perdaient pas une seule occasion de s'embrasser, comme des adolescents.

Même s'il se laissait aller dans la douce euphorie de ce moment qu'il jugeait parfait, Harry restait sur ses gardes, inconsciemment. Il était déterminé à protéger Drago, et les réflexes de survie acquis pendant la guerre ne s'étaient jamais effacés.

Il notait parfois des expressions de colère ou de dégoût sur les sorciers qu'ils croisaient, mais aucun n'avait osé s'en prendre à eux directement — probablement parce qu'il était le Sauveur. Cependant, Harry était certain que s'il détournait le regard une fraction de seconde, ils s'en prendraient à son compagnon.

Cette idée suffisait à le faire bouillir de rage et il se tenait prêt à riposter, refusant d'abandonner Drago Malefoy...

Ils avaient été suivis un long moment par un journaliste de la Gazette, qui écrivait frénétiquement dans un carnet en prenant de photos, mais ils l'avaient ignoré, le laissant faire. Lorsque Skeeter arriva en courant maladroitement sur ses talons aiguille, Harry grogna et attira Drago contre lui.

— On s'en va. Hors de question de laisser cette punaise de Skeeter nous approcher.

Drago hocha la tête, et s'approcha un peu plus de Harry, comme s'il allait l'embrasser, lui donnant tacitement la permission de gérer leur déplacement.

Les yeux dans les yeux, ils disparurent au moment exact où cette chère Rita les interpellait de sa voix stridente.

*

Au square Grimmaud, Hermione était rentrée de sa visite à Luna, et elle observait Ron et Pansy jouer aux échecs. Ils échangeaient quelques mots de temps à autre, tout en surveillant l'heure. En voyant Hermione se mordiller la lèvre, légèrement anxieuse, Ron roula des yeux.

— Relax Mione. J'ai demandé à Georges de faire un petit tour hors de sa boutique et de garder un œil sur eux. Au moindre souci, on sera prévenu immédiatement.

Pansy laissa échapper un rire amusé.

— Je comprends pourquoi Harry t'apprécie autant malgré tes défauts...

Le rouquin s'empourpra et croisa les bras sur sa poitrine, prêt à protester. Hermione éclata de rire, à son tour, amusée, et renchérit, en lançant un regard malicieux à son compagnon.

— Tu veux parler de sa gourmandise ou de sa tendance à crier d'abord et réfléchir ensuite ?

Ron renifla d'un air méprisant, mais sa réponse resta coincée dans sa gorge. Il resta figé, bouche ouverte, incapable de détourner les yeux de Harry qui venait de transplaner avec Malefoy dans les bras.

Si ce n'était qu'une étreinte encore... Mais ils s'embrassaient, avec une passion qu'il n'aurait jamais soupçonnée chez son ami. Bon sang, Harry avait déjà eu du mal à admettre son attirance pour Cho Chang à Poudlard, et il avait fallu de longs moments de confidences pour qu'il accepte d'évoquer un bref baiser ! Alors, le découvrir en train d'embrasser Malefoy comme s'il ne devait pas y avoir de lendemains était assez perturbant.

À ses côtés, Hermione émit un couinement surpris, yeux écarquillés, et elle plaqua les mains sur sa bouche pour ne pas faire de bruit et les déranger. Mais ses yeux pétillaient d'amusement. Pansy sourit, amusée, et s'installa plus confortablement pour les observer à loisir.

Finalement, Ron retrouva ses esprits, et il eut l'impression que ça faisait des heures qu'ils s'embrassaient indécemment devant eux, indifférents à ce qui les entourait. Hermione avait les joues légèrement rouges, mais elle semblait satisfaite de voir Harry se laisser aller avec son rival d'autrefois. Ou l'inverse. Le rouquin devait admettre qu'il était difficile de déterminer qui embrassait qui, puisqu'ils semblaient aussi enthousiastes et volontaires l'un que l'autre.

Il rougit de gêne, et se passa une main sur les yeux, résigné à ce que la fouine de leur adolescence fasse partie de la vie de son meilleur ami. Il aurait aimé que Harry ait plus de goût dans ses relations, mais... après tout, ce n'était pas lui qui aurait à supporter en permanence le blondinet !

Lorsque Harry laissa échapper un gémissement indécent en se collant un peu plus à Drago, et qu'il vit de coin de l'œil Hermione rougir un peu plus, il explosa.

— Bon sang Harry ! Je veux bien t'être dévoué pour tout ce que tu veux, mais pour ça mon pote, trouve une chambre et épargne nous le spectacle !

Les deux garçons se séparèrent, pris en faute, échangeant un regard tout sauf repentant. Harry passa une main dans ses cheveux, un peu mal à l'aise, mais Ron nota qu'il ne s'écartait pas vraiment de Malefoy, le retenant près de lui.

Son ami fronça le nez, et haussa les épaules, avec un sourire en coin.

— On est rentré à cause de Skeeter. Elle est arrivée et...

— Et elle t'a jeté un sort pour échanger ta salive avec Malefoy ?

Harry gloussa, en affichant un air malicieux.

— C'est toi qui voulais être informé autrement que par la Gazette de ce que je faisais non ? Et bien, considère que c'est le cas !

Ignorant les regards stupéfaits de ses amis face à sa réflexion, il quitta le salon entraînant Malefoy à sa suite en annonçant qu'ils allaient ranger leurs achats. L'ancien Serpentard était resté en retrait, silencieux, visiblement inquiet des réactions qu'ils allaient susciter ou de la réaction de Harry. Cependant, il le suivit sans protester, souriant malgré lui alors qu'il se rendait compte que Harry ne l'avait pas repoussé ou qu'il n'avait pas cherché une excuse pour expliquer leur baiser. Il aurait été particulièrement mortifié si le brun avait prétendu que c'était pour sa mission, ou toute autre raison stupide...

Lorsque les deux garçons eurent quitté la pièce, Ron grogna en secouant la tête.

— Je ne suis pas certain d'être prêt à tomber sur ce genre de scène en entrant dans une pièce.

Il y eut un long silence puis Pansy haussa les épaules, avant de revenir au jeu d'échecs qui avait été laissé de côté.

— Je n'imaginais pas Harry si... passionné...

Hermione laissa échapper un gloussement nerveux et échangea un bref coup d'œil avec Ron.

— Et bien nous non plus !

Protection rapprochéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant