Chapter 45 (ZAREN)

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Nalan est trop con.

Je suis le seul à me rendre compte que cette nana n'est qu'une salope capricieuse ?  Après avoir barbouillé une excuse pour avoir recraché ma boisson entière sur Dévya, je suis parti furax de l'appartement pour prendre l'air. J'ai marché, beaucoup marché, mais pas suffisamment pour enlever de mon esprit l'image de cette pouffe qui galoche un de mes meilleurs potes. Rien que d'y penser, ça me donne la gerbe.

Lorsque je m'estime calmé, je fais le chemin inverse et retourne à mon domicile.  A peine aie je mis les clefs dans la serrure de la porte que j'entends du boucan en provenance de la cuisine. Je pose prudemment mes affaires et longe le couloir. En entrant dans la pièce, je me stoppe sur place. L'image qui se présente à moi est mi-hilarante, mi-craquante. Dévya est contre le micro onde, un bouquin entre les mains et une grosse tâche de farine sur le bout du nez. Dès qu'elle me voit, elle se redresse comme un poteau et pose maladroitement son livre sur la table.

-Salut,dis je pour lancer la conversation.

J'ai conscience de danser d'un pied à l'autre, mais à vrai dire, je n'ai jamais été autant mal à l'aise de ma vie. Comment on est censé se comporter avec une meuf qu'on aime mais qui est notre ex depuis à peine un jour ?

-Salut,répond elle poliment en se concentrant de nouveau sur son livre.

Heureusement pour moi, elle n'aborde pas ma réaction que j'ai eu toute à l'heure. Ses doigts longent des lignes écrites en minuscules, puis elle fronce les sourcils.

-Tu cuisines ?

Putain,t'es pathétique mec. Bien sur qu'elle fait à manger, sinon pourquoi elle aurait de la farine sur la gueule ?

-Oui.Je veux faire des crêpes mais je ne me rappelle plus de la recette méga bonne de ma mère.

Je souris lorsqu'elle utilise cet adjectif. Je me souviens qu'il m'avait déjà surpris la première fois qu'elle l'avait utilisé pour parler d'un scénario de film de Will Smith.

-Tu veux que je t'aide ?

Une fois de plus, je m'en veux de dire tout ce qu'il me passe par la tête. Je baisse la tête et ferme les yeux, prêt à annuler ma proposition lorsqu'elle me répond timidement :

-Si tu veux.

Sa voix est faible mais je l'entends. Je la remercie en silence et m'approche d'elle pour suivre les instructions. Notre proximité semble la rendre nerveuse puisqu'elle se racle la gorge à chaque fois que ma main effleure la sienne ou que mon torse touche son bras.

-Il faut casser les œufs. Tu te sens capable d'y arriver ? Me demande t'elle avec un fin sourire qui étire ses jolies lèvres pulpeuses.

Je hausse les épaules. Elle ne devrait pas me défier comme elle le fait.

-On verra bien.

Elle rit et me ramène la boite d'œufs devant les yeux, le temps qu'elle fasse fondre le beurre et qu'elle mesure la farine avec un espèce de gobelet en plastique.

-C'est  pas grave si j'ai fait tomber quelques coquilles ?

Dévya se retourne vers moi et se penche dans le saladier. Elle écarquille les yeux en constatant le désastre mais par politesse, elle se contente de me dire :

-C'est pas grave. Je vais arranger ça.

Je l'observe prendre précautionneusement les plus gros morceaux et les jeter à la poubelle.

-Au moins, elles auront la chance d'être croustillantes.

Nous rions ensemble. Ça fait du bien. Notre complicité n'a pas disparu,et ça me rassure. J'avais peur qu'elle se ferme totalement en rompant avec moi, mais ce n'est pas le cas. Au moins ça me prouve que rien n'est encore perdu pour la reconquérir. Elle me donne ensuite le reste des ingrédients que j'ajoute peu à peu à la préparation. Nous rigolons encore lorsque je ressors le fouet rempli de pâte pleine de grumeaux. Dévya n'arrête pas de me dire que je ne suis pas doué pour la cuisine, et je veux bien la croire. Heureusement, je suis doué au pieu alors je vais dire que ça compense. Lorsque la fameuse étape de la cuisson des crêpes arrive, elle hésite à me la confier, en vue de mes dernière fautes.

-Je te donne une chance. Si tu l'as rate, c'est à moi de faire les autres.

Une lueur d'espoir s'immisce en moi en m'imaginant qu'elle ne parle pas seulement que de ces crêpes à la con. Elle verse une louche de liquide dans la poêle et je la pose sur le feu. Il faut attendre que ça chauffe, d'autant plus qu'il s'agit de la première et elle est généralement raté.

-Tu n'es vraiment pas doué pour la cuisine Zaren. Heureusement que tu n'as pas décidé que ce serait ta vocation.

Elle se moque gentiment de moi et je la laisse faire. A vrai dire, je sais très bien que la cuisine et moi ne faisons pas bon ménage. Je l'ai su dès le moment où j'ai utilisé du liquide vaisselle senteur citron pour assaisonner des spaghettis.

-On en parle de ton riz qui est resté collé à la casserole pendant trois semaines ?Je rétorque du tac au tac.

Dévya ouvre la bouche en grand en me jetant un coup de torchon dans le bras.

-Alors déjà, c'était du riz spécial sushi. Comment j'aurais pu deviner qu'il ne se cuisait pas de la même façon ?

Elle a beau faire la mine détachée, je la connais suffisamment pour savoir qu'elle a encore honte de cette fameuse journée. Elle avait pleuré dans son coin parce qu'elle allait devoir jeter de la nourriture alors que des personnes dans la rue n'ont rien pour se nourrir. Pour la rassurer, nous étions partis acheter des croissants pour les SDF et elle avait passé le reste de la journée aussi rayonnante que d'habitude.

Je retourne ma crêpe. Elle est légèrement froissée mais j'espère qu'elle n'y fera pas attention.

-Tu vas bien depuis hier ?

Ma main se crispe sur la louche. Je me retourne vers elle, décontenancé par le fait qu'elle me pose cette question. Sujet sensible activé.

-Et toi ?

Elle hausse les épaules sans grande conviction. Nous nous cherchons du regard un moment avant que le crépitement de la crêpe qui crame nous interrompt. Je la balance dans l'assiette pour en faire une autre.

-On dirait que tu te débrouilles mieux pour la cuisson.

Je lui souris tendrement.

-J'ai un bon chef.

Elle rougit en soupirant d'aise puis s'approche de moi. C'est la première fois qu'elle envahie mon espace personnel, si bien que j'ai l'impression qu'elle va m'embrasser. Et je le crois encore lorsqu'elle se penche vers moi. Sauf que d'un geste fluide, elle récupère de la pâte et m'en tartine la joue. Elle s'en va en hurlant de rire, tandis que je réfléchis à la meilleure des solutions. Première option : j'agis en tant qu'adulte et ne me venge pas. Deuxième option : Je prends le saladier et je continue cette guerre.

Je ne mets pas longtemps à prendre ma décision. Je plonge ma main dans la pâte et cours derrière Dév. Elle tente de s'échapper en criant, mais je la rattrape en deux enjambées et lui peint le visage comme si j'étais Picasso. Recouverte de ce liquide jaune, elle ne cesse de rire et vient frotter sa tête contre mon tee shirt qui devient vite sale. Je plonge ma main dans ses cheveux et décide de lui faire de nouvelles mèches.

-Non, pas mes cheveux ! Elle grogne en s'accrochant à ma taille comme un koala.

-OK. On fait une trêve ?

Je lève la main en l'air pour arrêter ce combat et la rouquine, aussi épuisée que moi vient me la taper pour signer notre arrêt officiel.

Un peu plus tard, tout le monde est attablé pour gouter nos fameuses crêpes. On va pas se mentir, on en a très peu. Entre nos crêpes cramées à cause de notre bataille et notre pâte diminuée à cause de cette même guerre, nous avons que huit crêpe présentable sur les vingt six prévues au départ.

-Elles sont...originales, remarque Eliam par pure politesse.

Je me retiens de rire. Quel faux cul de première !

-Rassurez moi... ça existe des crêpes croustillantes ? Demande Nalan,les yeux apeurés et la bouche rebordant d'un morceau de crêpe.

Cette fois ci, Dév et moi échangeons un regard complice avant d'éclater de rire.

Ouais,il n'y a pas à dire, je suis bien mieux ici, avec elle. 

Ice and Fire 2 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant