Chapitre 11 : Zylhia

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Il semblait au bord du gouffre. Il était plaisant de voir le grand Dean Polyakova, terreur de la Russie, s'effondrer aussi prestement devant moi. Entendre son ton suppliant était un réel délice, me permettant de faire fi de ces années d'efforts innombrables afin de contrer les effets de ce qui nous reliait. Il pensait avoir été le seul à avoir endurer ces épreuves. Malheureusement, les démons n'étaient en rien immunisés contre les conséquences d'un rejet, même si cela venait de moi. Je n'avais certainement pas autant souffert que lui. Le lien ne m'appelait pas à sa présence de façon aussi lancinante, mais il m'appelait tout de même, jusqu'à éprouver une certaine tendresse pour l'humain dans un moment d'égarement. Cependant, contre toute attente, cela nous avait rapprochés, Lucifer et moi. Il avait été d'un soutien sans failles, allant jusqu'à me cloitrer en cellule, comme une esclave, lorsque l'envie d'aller voir de mes yeux, comment il s'en sortait. Mon père et moi avions toujours eu une relation spéciale. Nous étions si proches tout en étant si éloigné. Cela était paradoxal. Nous étions extrêmement attachés, l'un à l'autre, mais nous ne nous supportions pas très longtemps. J'étais sa favorite mais mes idées du monde humain l'insupportaient au plus haut point, alors il avait fini par s'éloigner de moi avec le temps. Lilith, en revanche, s'était considérablement rapproché de ma personne à cette occasion. Elle aimait mon esprit vif à ne pas me soumettre à la volonté d'un homme, même si celui-ci était l'être que j'aimais le plus. Je n'en demeurais pas moins toujours aussi irrémédiablement attaché à Lucifer. Il était la seule personne vers qui me tourner lorsque j'avais ce genre de petits soucis.

Quitte à me traiter comme une moins que rien, il m'avait aidé à ne pas flancher, ce qui me permettait d'arborer ce petit air victorieux et glacial tout en scrutant l'homme. Il avait cédé. Je savais que cela allait arriver. Encore une fois, on m'avait implicitement demandé de me montrer patiente. L'humain avait voulu se jouer de moi. Aujourd'hui, c'était lui qui en payer le lourd tribut. Les cicatrices de mes griffes sur son visage barré son front jusqu'à sa joue, lui rappelant qu'on ne défiait pas un démon. Il l'avait cherché en me poussant dans mes retranchements. J'avais une patiente hors du commun pour mon espèce mais il ne fallait pas en abuser.

Je fis un pas en avant et il se redressa. Les lumières de la ville virent se reflétaient sur son visage. Il était sexy, une pensée, qui ne m'appartenait pas, qui m'avait traversé l'esprit.

- Libère-nous.

Je ricanais, feintant l'assurance des propos qui allait franchir mes lèvres avides de cruauté.

- Tu me demandes de te libérer, plutôt.

- J'ai saisi le concept. Si tu ne veux pas de moi, je vivrais un enfer. Je n'ai pas le temps pour ton petit jeu. J'ai une entreprise à faire tourner.

Il se leva de son siège et se dressa de toute sa hauteur face à moi. Il avait beau être plus grand que moi d'une tête, il n'en demeurait pas moins un faiblard petit humain. Sa tentative de m'impressionner me combler d'une joie malsaine. Il avait du répondant, ce qui n'était pas donné à tout le monde, mais il fallait qu'il cesse de croire supérieur à moi. Nous n'étions pas égaux. J'avais la supériorité, que cela lui plaise ou non. Cependant, le voir essayer éveillait mon désir de lui sauter dessus pour lui arracher ses vêtements. Signe qu'il ne fallait pas m'attarder à sa présence. Je ne devais surtout pas franchir ce pas. Je ne pouvais le laisser avoir ce pouvoir sur moi. Cela signerait une fin, pour lui et moi. Impossible de revenir en arrière. Désiré un humain me fit immédiatement honte. Ayant été élevé par Lucifer, j'en avais appris les rudiments de son éducation. S'accoupler à un humain était digne d'un bannissement dans les abimes de l'enfer. Une tragédie indicible. Lucifer les détestait. Lucifer les fascinait. On ne pouvait dire que chaque partie n'était complètement indifférent à l'autre. Que cela soit la haine, agrémenter d'une pointe de jalousie, ou l'aveuglante attirance, pimenter par attrait aux pouvoirs. Les deux étaient loin de ressentir du détachement. Cela était de même concernant le Divin.

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