Chapitre 21 : Zylhia

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Il était obstiné. J'admirais cela chez lui. Le voir se battre, pour ne pas fouiller au plus profond de lui, forçait le respect mais cela montrait aussi sa bêtise. Il souffrait. De plus en plus. Cela en devenait visible dans chacune de ses expressions mais il ne lâchait rien. Il campait sur ses positions. Il refusait tout bonnement de voir l'inévitable. Était-ce si difficile d'admettre ses faiblesses ?

Cela lui faisait du tort. Notamment, à ce moment-là. Nous nous trouvions, pour une énième fois, dans cet entrepôt des horreurs. Il s'abreuvait des cris d'un homme qui l'aurait trahi, selon lui. Pour ma part, je pensais qu'il avait les nerfs à fleur de peau et que n'importe quoi était prétexte à se défouler. Cet homme n'avait rien fait d'autre que dîner en famille. Cela n'était pas sa faute si son beau-frère était policier. Les hommes autour de lui, pensaient la même chose mais n'osait ouvrir la bouche. Il fallait dire que ces derniers jours, l'humain avait été d'une humeur massacrante. Cela le poussait à une cruauté sans nom. Ce qu'il y avait de pire, c'était que cela ne me laissait pas indifférente. C'était la première fois de ma longue existence que je me faisais réellement du souci pour quelqu'un, d'autant plus, un humain. Cela n'avait plus rien d'amusant.

Je secouais la tête alors qu'il venait de porter un nouveau coup au condamner, en hurlant. Il n'obtenait pas les réponses qu'il voulait de sa part mais cela était normal car il n'avait rien à se reprocher. L'ami de l'humain avait bien tenté de le dissuader de faire ce qu'il était en train de faire mais cela n'avait servi à rien. Il n'écoutait plus personne. Il perdait littéralement la tête. Alors qu'il se transformait en monstre, je m'adoucissais. Cela était un comble. Était-ce dû à l'influence de l'autre ?

Il attrapa l'homme par la tignasse et lui hurlait encore et encore dessus pendant que celui-ci le supplier en pleurant. Cet homme n'était pas comme lui. C'était un homme stable, ne souhaitant qu'une vie simple, auprès de sa femme et leurs trois enfants. Il avait accepté le job, proposer par l'ami du Dean, une semaine plus tôt, pensant pouvoir mettre à l'abri du besoin sa famille, s'asseyant sur ses principes en travaillant pour un mafieux. Il le regrettait, à présent. Cependant, ce n'était pas le destin que subissait cet homme qui m'inquiétait mais plutôt la folie qui prenait vie en l'humain qui m'était lié. Il n'était plus que l'ombre de lui-même. Homme sous contrôle, sans failles, il n'avait plus rien de tout cela. Il n'avait plus dormi depuis trois jours. Il ne mangeait pratiquement plus. Il se contentait de tourner en rond, lorsqu'il ne travaillait pas, et buvait plus que de raison. Il criait aussi. Beaucoup. Il gueulait dans le vide de son appartement en me maudissant. Cela aurait dû m'enchanter mais ce n'était pas le cas. Je ne reconnaissais plus l'homme élégant, sobre dans chacune de ses paroles de sa voix profonde et monocorde. Il n'était plus que rage. Cela ne me dérangeait en rien, en soi, s'il s'amusait à punir les bons coupables, ceux qui le méritaient. Cela était viscéralement ancré en moi. On ne punit pas les innocents. Cela pouvait plaire à certains des démons de l'enfer mais ce n'était en rien mon cas. Ils ne nous appartenaient pas. Seuls, les humains comme Dean devaient avoir notre attention. Il y en avait assez en enfer, et de nouveaux à venir sur terre, sans qu'on ait besoin d'utiliser des créatures qui ne nous reviennent pas.

Je regardais autour de moi, les personnes entourant le bourreau et sa victime. Aucun ne semblait être prêt à intervenir. Pas même son ami. Tous détournaient les yeux mais n'en pensaient pas moins.

Il remit le couvert en martelant l'homme attaché de coup au visage, tout en se tordant de douleur. Il avait l'air de vouloir que cet homme souffre autant qu'il souffrait. Cette rage destructrice dans son regard faisait pâlir tout son entourage. Je décrétais qu'il en était trop. Ce jeu allait trop loin. Il était buté et ne voulait pas céder à son inconscience meurtrie. Grand bien lui fasse.

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