Chapitre 19.

108 25 4
                                    

La mort de Béatrice de Navarie avait plongé le royaume dans une atmosphère funeste et tendue. Cette dernière tranchait avec les temps festifs qui avaient précédé l'évènement. Là où on avait célébré joyeusement les noces de Côme et Freyja, on pleurait désormais la reine. Là où les bâtiments avaient été décorés de fleurs, de rubans, de guirlandes... des tentures noires avaient été tendues, brodée aux armes de la Foi, au nom de l'âme de la souveraine trépassée. Et tout le royaume était en deuil, de la frontière nord jusqu'à la rivière qui délimitait le territoire au sud.

La capitale était touchée plus qu'aucune autre cité, comme si le sang qui avait entaché le palais s'était répandu jusque dans les bas quartiers.

Dans les rues, la veille si pleines de vie, soufflait désormais un vent glacé. La stupéfaction s'était emparée des cœurs. Le fait que ce fut un meurtre avait en outre ravivé les méfiances et les tensions. La police menait son enquête pour tenter de recueillir des informations, sur les ordres du prince. Toutefois, les accusations se tournaient déjà toutes vers un coupable.

Partout, l'on racontait que la délégation skÿull avait fui pour rejoindre leurs terres sauvages dès l'annonce du trépas de la reine et de l'arme qu'on avait retrouvé auprès d'elle. Cet acte ne faisait que renforcer les soupçons à leur égard.

Déjà, on murmurait que la guerre avec les barbares du nord allait reprendre. On se demandait si la garde royale allait mener une expédition punitive par-delà la frontière nordique et attaquer les tribus qui s'y étaient établies.

Une agitation fiévreuse s'était emparée du corps militaire navarien. La soif de combat et de sang s'était ravivée chez les hommes d'arme.

Mais aucune décision ne pouvait être prise tant que le trône demeurait inoccupé. Ainsi, malgré le deuil du royaume tout entier, l'on préparait déjà un nouveau couronnement. Celui du nouveau roi et de sa jeune épouse. La tradition voulait que les nouveaux souverains soient couronnés au plus tôt sous l'égide de la Foi. Cela devait éviter au royaume de sombrer dans le désordre et dans la guerre.

Aleksi, en se glissant dans les rues de Losthange où l'on s'affairait pour que la cérémonie puisse être célébrée le plus tôt possible, ne pouvait s'empêcher de songer à l'expression de la Meravigliosa lorsqu'il l'avait quittée, à l'aube. Une expression victorieuse. L'image du sourire fier qu'elle arborait et de l'éclat qui scintillait dans ses prunelles glacées restait gravée dans l'esprit du jeune homme. Et si elle se retenait d'exulter librement, le mercenaire savait très bien qu'en son cœur, il savait que la duchesse célébrait son ambition réalisée. C'était un de ses rêves qui s'était accompli. Elle avait juré que Freyja serait reine. Et Freyja était devenue reine d'un des royaumes le plus puissant du continent.

Mara venait de prouver, une fois encore, que rien ni personne ne pouvait se dresser en travers de sa route, aucun homme ne pouvait faire obstacle à sa volonté, qu'il s'agisse d'un palefrenier comme d'un roi, d'un fermier comme d'un chevalier...

Il n'y avait réellement qu'une seule personne qu'elle craignait. Son ancien époux, le duc Dásamlega, le duc des merveilles. Mais il n'avait rien d'un homme depuis qu'il avait accueilli en lui un démon.

Aleksi n'avais en réalité jamais rencontré cet ennemi contre lequel il avait juré de protéger sa maîtresse. Tout ce qu'il savait c'était que cet homme était celui qui avait donné l'ordre du massacre des siens. C'était un duc cruel, avide de pouvoir. Et son démon était l'un des plus puissants qui puissent exister.

Le jeune homme soupira.

Pour le moment, la menace du duc s'était légèrement atténuée. En plongeant la Navarie dans cet orage, conduisant Freyja au trône, il était parvenu à ralentir les effets de son coup de sang. Il avait brisé la bénédiction d'Àst mais le sang qui tachait ses mains leur assurait encore un espoir.

Le Cercle Des Merveilles - I - À cœur et à sangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant