Chapitre 7 - Les pactes scellés

80 18 14
                                    

Lizzie observait le pistolet qui reposait sur la cuisse de Jan. Il était étrange de le voir ainsi portant une arme.

Il lui avait avoué tirer très mal. Lizzie, elle excellait dans ce domaine.

Il aurait été si simple – si simple – de tirer.

De mettre fin à tout cela, à l'attente insupportable, à la sensation du glaive de Mercyng qui pesait sur ses épaules.

La présence d'Ambroise avait-elle fait renaître son instinct de tueuse ? Elle avait cru l'avoir soigneusement barricadé, enfoui au plus profond d'elle-même, là où elle aurait elle-même été incapable de le retrouver. Mais peut-être s'était-elle fourvoyée. Peut-être avait-il toujours été là, tapi dans l'ombre, à attendre le moment où elle aurait la force d'agir.

— Vous semblez soucieuse.

— Je n'ai pas dormi de la nuit.

— Vous n'avez rien à craindre. Ambroise est sous bonne garde.

Lizzie haussa les épaules et glissa entre ses lèvres une pincée de krafjane ; l'amertume retourna son estomac vide.

— Je n'ai pas peur de ce qu'il pourrait faire. J'ai peur de ce qu'il pourra dire.

— Vous avez décidé d'aller lui parler ? Quand cela ?

— Le plus tôt possible.

Plus les heures s'écoulaient, plus elle avait peur. Et plus elle avait peur, moins son esprit était clair.

Il était plus que temps d'aller affronter Ambroise.

— Souhaitez-vous que je vienne avec vous ?

— Merci. Mais je crois que je préférais lui parler seule à seule.

Elle se leva et se saisit du pistolet d'Ambroise qu'elle ne quittait plus.

Lizzie s'était elle-même chargée d'ôter les armes que portait Ambroise. Ils avaient été menés jusqu'au village, son mentor attaché par des cordes solides et placé dans une des masures de branchages.

Et Ambroise avait contemplé Lizzie d'un regard brûlant de rage, à mesure qu'elle jetait à ses pieds les armes qu'il possédait. Elle lui avait déjà dérobé pistolet à sa ceinture. Elle avait tiré la lame effilée cachée dans sa botte. Les fins couteaux de lancer et la fiole de poison dissimulés dans son pourpoint. Elle connaissait chaque emplacement.

Depuis, deux jours et deux nuit avaient passé, et Lizzie avait prudemment tenu ses distances. Tout en demeurant vigilante. Elle gardait sans cesse à son côté le pistolet de son mentor, et Jan le sien. Mais Ambroise n'avait, étrangement, pas fait la moindre esclandre, ni fomenté la moindre tentative de fuite. Son comportement éveillait en Lizzie une méfiance certaine, sans qu'elle ne puisse tout à fait le cerner.

Le plan qu'elle avait construit dans la précipitation à l'encontre Ambroise n'était guère développé, et elle devait l'admettre : elle ignorait quelle en serait la suite, ni ce qu'elle comptait faire de lui. Quoi qu'il en soit, elle ne pouvait maintenir Ambroise enchaîné ici à jamais. Pendant qu'ils gagnaient le campement, Mahigan, le chef des Útlends, leur avait assuré qu'ils pouvaient demeurer en ces lieux aussi longtemps qu'ils le souhaitaient. Mais Lizzie, elle, n'avait pas manqué le regard qu'il avait jeté à Ambroise : un regard empli de méfiance.

Déjà, Lizzie entendait les Útlends chuchoter sur son passage. Elle n'avait pas l'impression qu'ils étaient hostiles son égard, mais elle était certaine d'une chose : elle n'avait pas la moindre intention de s'imposer en ces lieux, et elle ne pouvait décemment pas demander à Mahigan et aux siens de garder sous surveillance constante Ambroise.

La Lame des Bas-Royaumes / 2 - La Guerre du Pays d'en HautOù les histoires vivent. Découvrez maintenant