Chapitre 41 - Les pions

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L'homme à la plume verte.

La plume verte qui hantait les cauchemars de Lizzie avait disparue, et les vêtements fastueux que l'homme avait autrefois arborés dans l'écrin des jardins royaux s'étaient métamorphosés en une tenue simple et sombre. Il arborait une tignasse plus claire que ce que leur rencontre dans le labyrinthe enténébré le lui avait fait présager et, sans son masque et avec les années passées, ses traits lui parurent moins juvéniles. Ses yeux d'un vert singulier ressortaient sur un visage harmonieux.

Pour le reste, il se tenait là, si parfaitement fidèle à son souvenir qu'elle crut un instant se trouver enfermée dans un songe. Mais la main de Jan, qui était crispée sur la sienne désormais, était bien réelle.

— Élisabeth ? souffla Jan.

Lizzie, dans le miroir qui lui faisait face, croisa son propre reflet. Elle était affreusement pâle.

— Ne vous inquiétez pas, monsieur, lança l'homme. Je suis un vieil ami de madame Van Stoker. Ou devrais-je dire... mademoiselle Prudence ?

Lizzie en demeura coite un instant.

Elle fixa stupidement le rictus qui s'épanouissait seconde après seconde sur les lèvres de l'homme qui lui faisait face.

— De vieux amis ? Vous avez essayé de me tuer !

— Pardon ? fit Jan. Quand cela ?

L'homme eut un geste négligent de la main.

— Il y a fort longtemps. De l'eau à coulé sous les ponts, si je puis dire. Ne nous tracassons plus avec ces broutilles.

Lizzie serra les dents.

— Je n'ai jamais voulu vous tuer, madame. Simplement m'assurer que vous étiez bien celle que vous deviez être.

Malcræft, vous avez essayé de me noyer dans le canal !

— Je voulais simplement vous effrayer un peu.

M'effrayer ? Vous ne... Attendez. Celle que je devais être, dites-vous ?

— Oui. C'est ce que j'ai dit.

— Comment connaissiez-vous mon existence ?

L'homme tourna la tête vers Carlton Belvild. Ce fut celui-ci qui lui répondit.

— Nous avions nos sources.

— Lesquelles ?

Carlton Belvild eut un mouvement négligent de la main.

Lizzie crispa les mâchoires, mais se résolut à ne pas insister. Elle obtiendrait ses réponses en temps en heure.

L'homme à la plume verte – elle ne pouvait le voir autrement – se leva.

— Je me nomme Lars Maarten. J'ignore si vous connaissiez mon nom.

— Non, je l'ignorais.

Lars Maarten.

— Je ne vous cacherai pas, monsieur, que je suis surprise de vous revoir.

— Je le conçois parfaitement.

— Êtes-vous venu pour finir ce que vous avez commencé ?

La voix de Lizzie flancha et son trait perdit de son mordant.

Si l'homme s'en aperçut, il eut la grâce de demeurer impassible.

— Plutôt vous offrir mon aide.

— Votre aide ?

— Vous aurez besoin de moi pour tuer De Glaves.

Un frisson dévala le dos de Lizzie.

Elle se souvenait avec précision de la façon dont l'homme avait bloqué ses coups, cette nuit-là. Et elle se rappelait ceux qu'il lui avait assénés. La façon dont il avait échappé à Ambroise.

La Lame des Bas-Royaumes / 2 - La Guerre du Pays d'en HautOù les histoires vivent. Découvrez maintenant