✧ LA DEUXIÈME BASE ✧
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Suite au baiser échangé avec Nathan, je m'étais enfermée dans ma chambre, honteuse. Incapable d'affronter le regard de ma sœur, de son copain ou celui de mes parents, je n'avais pas daigné sortir de ma chambre pour dîner, prétendant être beaucoup trop intéressée par le roman que je lisais.
En vérité, le bouquin n'était pas terrible. Et je peinais à m'intéresser à l'intrigue aussi pauvre que malmenée. Ou peut-être que j'étais tellement en colère contre moi-même que je n'arrivais pas à apprécier l'histoire dans laquelle je venais de me lancer.
Et je savais que Nathan voyait clair dans mon jeu. Sans même l'apercevoir oser un sourire narquois, je le savais. Parce que j'aurais eu la même réaction à sa place.
J'étais celle qui était à l'origine de ce rapprochement, et ça, même si je savais qu'il appartenait désespérément à ma grande sœur. Pourtant, j'étais aussi celle qui me cachait, celle qui fuyait. Pas Nathan.
Et à l'instant, je ne pouvais plus me rendre invisible. C'était impossible de fuir ma famille et Nathan comme la peste alors que ma présence était requise pour regarder avec eux le match de baseball diffusé à la télé. Comme tous les dimanches soirs.
Ainsi, je me retrouve coincée entre Eleena et Nathan. Au sens propre comme au figuré.
Je pourrais blâmer le destin pour cette ironie. Mais ce détail n'était rien en comparaison de ce qu'il se passait réellement entre Nathan et moi. Même si j'essayais de nier, je ne pouvais plus.
Je devais me rendre à l'évidence.
Nathan et moi étions quelque chose.
Je ne savais pas réellement ce que nous étions, mais nous étions quelque chose. Et ça, malgré la relation qu'il entretenait avec ma sœur.
Face à la télévision du salon, je ne prêtais pas attention au match qui se déroulait sous mes yeux, fixant ma cuisse qui frôlait celle de Nathan. Papa donnait des instructions aux joueurs, qui ne pouvaient heureusement pas l'entendre, mais je n'étais pas sure qu'il s'en rende compte tant il était sur les nerfs.
Ma sœur, elle, elle était distraite par son téléphone. Quant à maman, elle se moquait gentiment de papa, déclarant que l'équipe sur laquelle il avait parié allait perdre. Honnêtement, je n'en avais rien à foutre.
Je n'avais jamais aimé le sport, je préférais la subtilité de l'art. Mais aujourd'hui, mon monde gravitait autour de Nathan.
Je coulai un regard dans sa direction, sentant son regard sur moi. Nos yeux se rencontrèrent, et l'envie de les dessiner me revint instantanément. La passion que je vouais à ses yeux n'était pas saine, bien au contraire.
Le coin de sa bouche, la même bouche que j'avais embrassé plus tôt, se releva légèrement dans un sourire moqueur, comme s'il se savait si irrésistible qu'il s'attendait à cette réaction de ma part.
Nos regards ne se quittèrent pas durant une seule seconde, nous livrant dans une bataille sans fin, mais j'y mis terme pour ne pas attirer l'attention sur nous.
Je jetai un énième coup d'œil à Eleena alors que je pouvais toujours sentir son jean contre ma cuisse, mes jambes enroulées autour de son bassin dans l'eau.
Ma sœur entortillait une mèche de ses cheveux autour de son doigt tout en continuant à faire défiler les différentes vidéos sur l'application Tik Tok, perdue dans ses pensées.
Je sentis alors Nathan approcher ses lèvres du lobe de mon oreille, je me raidis immédiatement alors qu'il me souffla quelque chose de presque inaudible :
— Maintenant que la première base est accomplie, commença le brun tandis que je peine à discerner ses mots tant il parle doucement.
Ses lèvres contre mon lobe me rendaient folle. Mon corps brûlait déjà alors qu'il ne faisait rien d'autre que me frôler. Le souvenir de cette après-midi me revint en mémoire, et j'en voulais plus. Je voulais le baiser et qu'ensuite, il me parle de son art.
Ses paroles dans mon oreille n'arrangeait pas le fantasme qu'il représentait déjà à mes yeux.
— À quand la deuxième base ?
Je ne réagis pas de suite, prenant le temps d'assimiler le sous-entendu caché dans sa question tout en fixant l'écran de la télévision. Je sentis son sourire contre ma peau, et je me mis à rougir comme une idiote.
Je ne m'y connaissais pas en baseball, mais je savais que les différentes bases dans ce jeu pouvaient avoir une connotation sexuelle. La première base désignait le french kiss, la deuxième, elle, les caresses, la troisième promouvait les rapports bucco-génitaux.
Quant au home run, lui, c'était le rapport sexuel.
Merde.
Je ne savais pas pourquoi je rougissais, ce n'était qu'un sous-entendu. Pourtant, j'étais dans tous mes états. Et je ne pouvais me résigner à jeter un coup d'œil à Nathan, à lui donner une réponse. Positive ou négative.
Alors, je ne le fis pas.
Tout le reste de la soirée, je l'ignorai.
Jusqu'au retour dans mon lit, où je pus librement m'imaginer lui promettre cette seconde base.
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Venimeuse
RomanceÂgée de dix-neuf ans, Emris Stewart est une artiste torturée qui sombre peu à peu dans la folie. Encore plus venimeuse que ses démons, elle se prête à des jeux malsains dans l'espoir de se sentir en vie. Malheureuse, cette dernière enchaîne les coup...