✧ VIEILLE CONNAISSANCE ✧
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— Emris ? Demanda l'homme qui prenait les commandes au Starbucks de Carpinteria.
Merde.
— Oui, répondis-je, légèrement gênée.
— Emris Stewart ?
— Oui, c'est moi. En chair et en os.
J'esquissai un sourire moqueur, il grimaça. Ce garçon avait été dans ma classe. Un vrai idiot ! Je ne l'avais jamais apprécié.
— Putain ! Tu es rentrée de New York depuis quand ?
Ici, tout le monde connaissait tout le monde. Et même si je ne possédais pas d'amis ici avec qui échanger sur les réseaux sociaux, mes anciens camarades savaient tous que j'étais étudiante à New York dans une université d'art. Même si je ne désirais pas qu'ils en soient informés, souhaitant garder mon anonymat. Être éternellement invisible à leurs yeux.
— Depuis peu.
Mais suffisamment de temps pour apprendre que j'avais couché avec le petit ami de ma sœur.
— C'est génial ! Tu restes combien de temps ?
— Juste l'été.
Donc ne te fait pas d'idées.
Quelqu'un derrière moi, sûrement un client, râla et Billy, mon ancien camarade de classe, s'excusa et me laissa finalement commander une boisson.
— Écoute Emris, je suis en pause dans cinq minutes, attend moi.
Je ne répondis pas et me mis à l'écart de la file d'attente, ignorant royalement les regards noirs que les autres clients me jetaient. Comme si j'étais celle qui avait voulu son attention !
Je me mis dans un box et entamai ma boisson à la mangue. Le goût du fruit me rappela vaguement celui de Vee, la brune qui se délectait de mon attention, et qui attendait plus de moi que quelques nuits volées et des promesses dénuées de sentiments. Et même si la brune savait que j'en étais incapable, elle ne perdait pas espoir, pensant qu'un jour elle pourrait s'accaparer mon cœur écorché.
Hier soir, nous nous étions appelées, et alors que ses gémissements se mêlaient aux miens, que nous nous touchions mutuellement au téléphone, se confiant ce que nous voulions faire à l'autre, je ne pouvais m'empêcher de penser à Nathan. Le téléphone sur l'oreiller d'à côté, Vee déclarait, haletante, vouloir me sucer les seins et mordiller mes tétons, et aussitôt j'imaginais Nathan, la bouche chaude et humide, dévorer ma poitrine, affamé. Tandis que moi, je goûtais à la fois au paradis et à l'enfer.
Alors que j'étais perdue dans mes souvenirs, Billy vint m'interrompre en s'asseyant face à moi tout sourire. Il avait l'air niais, sauf qu'il ne l'était pas en réalité. Je n'aimais pas ça.
— Je n'arrive pas à croire que tu es revenue. Ça fait quoi ? Neuf mois ?
Un an.
Il avait troqué son uniforme de notre école privée pour celui de Starbucks. Pourtant, il n'avait pas changé. Pas le moindre du monde. Ses cheveux blonds étaient toujours aussi coupés court, une lueur toujours aussi espiègle dans le regard, un début de barbe, une mâchoire carrée. J'avais l'impression que nous étions revenus en arrière.
— Putain ! La dernière fois qu'on s'est vu remonte à la remise des diplômes, non ?
Non, quelques jours après, dans une fête étudiante, tu m'avais traité de salope parce que je ne voulais pas coucher avec toi.
— C'est ça.
Si je ne comptais pas Jordyn, je n'avais pas eu l'occasion de revoir mes anciennes connaissances. Non pas qu'ils n'étaient plus ici, la majorité d'entre eux était restée dans cette ville, mais plutôt que l'envie n'était pas présente. Mes années ici avaient été un enfer. Les filles me considéraient comme la concurrence à battre, les garçons comme un jouet sexuel qu'ils pouvaient utiliser à leur guise, une salope, et mes parents, eux, ils ne me voyaient pas.
Les mots de Nathan me revinrent en mémoire.
Tu n'es rien d'autre qu'un objet sexuel que les hommes utilisent. Une salope que j'ai baisée.
Tout le monde semblait penser ça de moi. Alors que j'étais plus que ce qu'ils imaginaient. Tellement plus.
— Alors, qu'est-ce que tu deviens ?
— Je vis à New York, je vais dans l'école de mes rêves, répondis-je fière de moi-même.
Peu à peu, j'accomplissais ce dont j'avais toujours désiré sans abandonner ma bataille contre mes démons intérieurs. Mon rêve d'enfance était à ma portée, je ne pouvais pas être plus fière de la personne que j'étais devenue. En tout cas, sur ce plan-là. Parce que je méprisais la fille qui flirtait avec le petit ami de sa sœur.
— Et toi ?
Ses joues s'empourprèrent et il passa une main sur ses cheveux rasés. Une revanche pour la Emris de dix-huit ans.
— Je travaille et suis indépendant financièrement. Tout roule.
Un silence s'abattit sur nous.
— En tout cas, je suis heureux que ça se passe bien à New York. J'ai toujours su que tu accomplirais de grandes choses !
Tu parles !
— Et tu es toujours aussi belle.
Je faillis m'étouffer avec ma boisson.
Quoi ?
— Merci, Billy. Et toi, tu es toujours aussi gentil.
Il me gratifia d'un sourire. Un homme, vêtu du même uniforme que Billy, qui j'imaginais était son supérieur, vint à notre rencontre.
— Ta pause est terminée, Barron, fit-il la voix sévère.
Billy acquiesça et son supérieur retourna à son poste, soit crier sur ses employés pour détruire leurs egos.
— Je dois y retourner, commença-t-il, gêné, mais on se revoit bientôt ?
— Je ne sais pas, Billy. Si j'ai le temps, peut-être.
— Super, je t'envoie un message sur Instagram !
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Venimeuse
Любовные романыÂgée de dix-neuf ans, Emris Stewart est une artiste torturée qui sombre peu à peu dans la folie. Encore plus venimeuse que ses démons, elle se prête à des jeux malsains dans l'espoir de se sentir en vie. Malheureuse, cette dernière enchaîne les coup...