Chapitre 24: Retour dans le passé

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Eileen                                   Treize ans plus tôt

J'avais enfilé ma jolie robe blanche comme maman me l'avait demandé et mes ballerines noires. Papa recevait un allié important aujourd'hui alors je devais être présentable. La tête brune de ma mère apparue dans l'entrebâillement de la porte de ma chambre.

- T'es prête mi corazón ?

Je hochais tristement la tête en serrant Alex, mon ours en peluche tout contre moi. Ma mère entra et s'installa à côté de moi sur mon lit.

- Que se passe-t-il Elena ?
- Je veux pas mettre ma robe mama. Avouais-je. En plus, Erik, Vlad et Dragan m'ont promis de jouer avec moi dans le jardin. Comment je vais faire si j'ai cette stupide robe sur moi ?

Ma mère prit un air sévère.

- Elena Sofia Romanova, parles correctement. Tu t'apprêtes à voir tu tio pour la première fois depuis tes trois ans. Donc tu vas prendre sur toi et faire honneur à tu papa, vale ?

Tio Rico habitait dans le sud du pays et faisait souvent des aller-retour entre sa Colombie natale et le Texas, aussi je ne l'avais pas revu depuis l'anniversaire de mes trois ans. Et pour être honnête, je n'avais pas vraiment de souvenir de lui, je savais simplement qu'il manquait beaucoup à mama et qu'il était un très bon ami et l'un des associés les plus importants de Papa. Je ronchonnais que je n'étais pas obligée d'être en robe pour autant mais acquiesçais tout de même.

- En plus, Tio amène son filleul avec lui. Il a dix ans je crois. Tu verras, ça va te faire du bien de jouer avec des enfants de ton âge. Tu passes beaucoup trop de temps avec les garçons, ils t'apprennent que des vilains mots et tu commences à parler comme eux.

Mais je n'avais pas envie de rencontrer des enfants de mon âge moi... Je ne lui dis pourtant pas parce que je n'avais pas envie qu'elle se fâche alors je la suivis jusqu'à l'immense allée de gravier devant notre maison. Mon frère, mon cousin et Drag avaient eux aussi revêtu leurs habits des grandes occasions, un costume noir avec une chemise blanche déboutonnée vers le haut laissant apercevoir le tatouage de la famille - un ours qui rugit avec des symboles étranges sur le côté de sa tête. Je me plaçais à la droite de mon frère qui m'adressa un clin d'œil en voyant ma mine renfrognée et me promis qu'il me lirait une histoire ce soir si nous n'avions pas le temps de jouer au basket dans le jardin. Mon père arriva dans son costume noir et sa chemise rouge, emplissant notre groupe de sa présence comme chaque fois qu'il arrivait quelque part et m'adressa un immense sourire.

- Tu es magnifique moy malen'kiy voin*. Approuva-t-il en posant un baiser sur mon front.

J'ouvris la bouche pour répondre mais le portail de fer noir de notre domaine s'ouvrît et une Alfa Roméo SZ rouge flamboyante - peut être que maman avait raison et que je passais trop de temps avec Vlad qui ne parlait que de cette voiture - s'arrêta en dérapage devant nous, envoyant un nuage de fumée dans notre tête. Je toussais et me frottais les yeux que la fumée avait embué. Un homme dans un costume vert et des lunettes de soleil qui lui prenaient la moitié du visage sortit du côté conducteur. Notre oncle nous adressa un sourire dévoilant toutes ses dents blanches et s'avança vers mon père en s'exclamant d'une voix teintée du même accent que ma mère,

- Nicolaï, mon frère! Comment vas-tu depuis tout ce temps ?

Il n'attendit pas la réponse de Papa et l'attira dans une accolade joyeuse. Je les dévisageais, la bouche grande ouverte. Je ne revenais pas qu'il venait juste de prendre mon père dans ses bras... Et qu'il y avait répondu! On ne pouvait pas dire que mon père était la personne la plus chaleureuse et câline que je connaissais, les seules personnes qu'il acceptait de prendre dans ses bras étaient ma mère et moi. La dernière personne que je l'avais vu étreindre avait été Dragan, le jour de la mort de son père, mon parrain, Mikaël. Ils échangèrent deux trois mots avant d'être arracher par ma mère qui l'attira à elle, les yeux brillant de larmes.

- Has extrañado, hermano**. Dit ma mère, un sanglot dans la voix.

Tio Rico essuya les larmes de ma mère en lui murmurant des paroles en espagnol que je n'entendis pas avant de l'embrasser sur la joue et de se tourner vers nous en relevant ses lunettes. Je vis tout de suite la ressemblance avec ma mère, la même peau mate, des yeux verts identiques et des boucles châtain foncé. Il dégageait le même charisme hors norme que mon père mais aussi quelque chose de plus... Sauvage ? Je ne savais pas vraiment.

- J'en crois pas mes yeux ce n'est pas le trio infernal! Les Erik, Dragan et Vlad que je connaissais n'étaient que des oursons la dernière fois je les ai vu. Ricana-t-il.

Les garçons se renfrognèrent légèrement mais accueillir Rico, un grand sourire aux lèvres, enfin sauf Dragan qui n'esquissa qu'un rictus qui ressemblait d'ailleurs d'avantage à une grimace de dégoût. Quand mon oncle s'arrêta près de lui, l'accolade dura quelques secondes de plus.

- Lo siento mucho pour ton père Dragan, c'était un homme bien.

Parrain était mort en mission un an plus tôt. Papa et maman étaient très tristes mais ce n'était rien comparé à Drag. Je ne savais pas exactement ce qu'il s'était passé mais je me souvins avoir entendu le hurlement de rage et de douleur de Dragan depuis ma chambre qui se trouvait juste au dessus du bureau de Papa. Il avait ensuite disparu pendant des jours et était réapparu le jour de son enterrement. Il n'avait plus jamais été le même depuis. Avant, le meilleur ami de mon frère était le clown de la bande, toujours le mot pour rire. C'était lui qui me réconfortait quand je me faisais mal et il était à l'origine de plusieurs de mes fou rires. Il m'avait même apprit à nager. Puis son père était mort et il était devenu sombre. Il souriait à peine et rentrait souvent couvert de sang et les poings abîmés. Je ne me souvenais pas de la dernière fois que je l'avais entendu rire ou qu'il avait accepté de faire un concours de grimace avec moi... Dragan hocha la tête avec raideur et mon oncle lui tapota l'épaule avant de reporter son attention sur moi. Son visage jusqu'alors grave, s'illumina d'un seul coup.

- Mi princesa! S'extasia-t-il

Il me prit dans ces bras en me faisant tournoyer dans les airs, ce qui me fit rire aux éclats.

- Comme tu as grandi! Tu es plus belle d'année en année. Me compliments-t-il. Tu ne tiens définitivement pas ça de ton père. Se moqua-t-il en adressant une œillade taquine à mon père qui ne réagit même pas, les yeux rivés sur le passager encore dans la voiture de mon oncle.

Il le remarqua et se plaça entre Papa et la voiture.

- C'est mon filleul, comme je te l'ai dis au téléphone. Chuchota-t-il, l'air grave. Amara est morte.

Ces poings se serrèrent et sa mâchoire se contracta légèrement jusqu'à ce que mon père hoche la tête et lui indique qu'ils en parleront après avoir fais les présentations. Mon oncle ne parut pas se détendre pour autant, pas même lorsqu'il fit signe à son filleul de descendre de la voiture. Un garçon, plutôt grand et la mine fermée, descendit de la voiture. Il avait des cheveux bruns plaqué en arrière et une peau légèrement moins foncée que mama et tio. Quand son regard bleu croisa le mien, je frissonnais, intimidée, mais ne baissais pour autant pas mes yeux. Il les détourna rapidement et s'avança vers mon père, la main tendue.

- Bonjour Monsieur Romanova. Salua-t-il en soutenant les yeux inquisiteurs de Papa. Je connaissais ce regard, il l'avait souvent lancé aux garçons et aux nouveaux membres de notre Clan. Il voulait voir ce qu'il avait dans le ventre. L'oeil vert et l'autre bleu de mon père - regard qu'il nous avait d'ailleurs transmis - rendait son regard d'autant plus impressionnant et intimidant. Il semblait exacerber chacune de ces émotions, d'avantage encore quand il était énervé... Ou qu'il avait cet air là.

Sévère et intransigeant.

Le garçon ne flancha cependant pas, ce qui parut impressionner tout le monde autour. Sauf moi. Derrière la froideur de son regard, j'avais vu une certaine détermination et j'avais alors su qu'il passerait le test haut la main.

- Je suis Donavan... De Luca. Se présenta-t-il après une hésitation.
- Bienvenu chez moi petit. Répondit mon père.

Les épaules de Donavan parurent se détendre et j'entendis le souffle de Tio se relâcher. Papa se détourna et invita tout le monde à entrer. Nous le suivîmes tous, et bien que j'entendais que les discussions allaient bon entrain, je ne comprenais pas ce qu'il disait. Mon regard était rivé sur ce mystérieux garçon qui ne semblait avoir peur de rien.

Nda: *ma petite guerrière ** Tu m'as manqué mon frère

Black Hearts : Le poids du passéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant