Chapitre 43: Choc

117 3 0
                                    

Eileen

Le choc de Donavan alors qu'il remettait ce puzzle aux mille et une pièces de la vérité en place m'assourdis au point de me sonner. Ou peut être étais-ce le bruit fracassant de son arme qui répercutait le bruit de mon cœur qui se brisait alors que la sensation de l'avoir trahi s'enroulait autour de moi comme un boa affamé.

Mais après tout... Qui trompais-je? Ce n'avait été qu'une question de temps avant qu'il ne le découvre. Avant qu'il ne fasse la lumière sur ma véritable identité et qu'il me déteste pour lui avoir menti.

Les secondes qui s'écoulèrent entre le moment où il croisa mon regard - mon véritable regard - et celui où le corps massif de Dragan s'interposa entre nous me parurent durer une éternité. Durant ces quelques secondes, une conversation entière avait eu lieu. Une conversation pleine de cris et d'incompréhension... Pleinet de haine et de rancoeur.

La découverte de mon secret venait de faire perdre ces moyens au meilleur membre des Black Hearts... Le meilleur criminel du pays dirais-je même! JE venais de faire perdre toute contenance au gars qui s'était évadé de Supermax. Donavan De Luca venait de lâcher son arme et aurait pu se faire tuer par ma faute si Dragan avait été plus con que ça et avait abattu mon coéquipier avant même de l'interroger.

Cette pensée me tordit l'estomac et m'assécha douloureusement la gorge... Culpabilité quand tu nous tiens. Heureusement pour mon âme coupable, le sentiment s'estompa quelque peu quand Donavan se reprit et fit face à Dragan, un masque de glace à la place du visage. Je devais avouer qu'il fallait des tripes pour affronter Dragan Ivanova sans laisser paraître une once de peur ou d'angoisse. Un mètre quatre-vingt-dix de muscles, des bras de la taille de troncs et un regard à faire pisser les plus grands de notre monde dans leur froc... Il n'y avait pas à dire, Dragan faisait flipper. Et pourtant, Donavan lui faisait face comme si Dragan était un chiot abandonné en quête d'amour. Ma foi... Oh moins je n'avais pas cassé la légende des Black Hearts.

Je roulais des yeux à moi-même. Qu'est-ce que je pouvais être arrogante putain! Bon l'important était que j'en avais conscience...

Enfin bref, nous avions des choses à faire et j'en avais marre de perdre mon temps avec leur concours de celui qui pisse le plus loin.

- Dragan... C'est Donavan De Luca, mon partenaire.

Le meilleur ami de mon frère se raidit au son de ma voix et, bonne tueuse à gage que j'étais, je pouvais presque voir son cœur s'emballer rien qu'à la légère accélération que j'avais perçu dans sa respiration.

- Ton partenaire ? S'étonna la voix de Vlad teintée de méfiance.

Ce fut à mon tour de me tendre. Putain je n'arrivais pas à croire que j'entendais sa voix, que c'était son souffle dans mon dos et son aura tellement familière et pourtant complètement étrangère que je percevais. Lentement, je me tournais de nouveau vers mon cousin dont la vue me coupa le souffle un peu plus, faisant remonter toutes ces émotions que j'essayais pourtant de contenir.

- Oui. Si je suis ici... C'est parce que j'ai une mission pour les Black Hearts. Je suis envoyée par... (je déglutis, n'en revenant pas que j'allais réellement dire ça) Tio Rico. Il veut vous voir.

Vlad leva un sourcil et un sourire suffisant dessina ses lèvres.

Un Romanova pur et dur, ne puis-je m'empêcher de penser.

Il rappela Dragan et d'un mouvement de tête, nous ordonna d'entrer à tous les deux. Cependant, et je ne pus m'empêcher de le remarquer, le long regard qu'il échangea avec Donavan alerta tous mes sens. C'était presque comme si il connaissait mon partenaire mieux que ce que je ne le pensais.

Vlad savait quelque chose. J'en mettrais ma main au feu. Sans réellement savoir pourquoi, je sentais que dans quelques instants, je ne serais plus la seule avec des secrets beaucoup trop lourd pour être porté très longtemps. Et ça ne me plaisait pas du tout.

***

Un silence pesant et particulièrement inconfortable était tombé dans la pièce. Donavan dévisageait Vladimir et Dragan comme si ils ne les reconnaissaient pas, quant aux deux autres, ils avaient l'air de se retenir de balancer quelque chose.

Leur poing peut être ?

- Chto my delayem ? My ub'yom yego ili predostavim yemu prezumptsiyu nevinovnosti? Demanda Dragan à Vlad.

Je n'avais pas pratiqué le russe depuis... Et bien depuis très longtemps mais cela restait ma seconde langue.

- Personne ne tue personne, grognais-je, et de quel doute vous parlez ? Vous le connaissez, c'est Donavan Deluca, le filleul de Tio Rico.

L'attention des trois hommes fusa sur moi comme trois balles de pistolet, le regard noir et la mine fermée. Agacée, je mis mes poings sur mes hanches et haussais un sourcil. Pour qui ils se prenaient à vouloir m'intimider comme ça ?

Les visages de Vlad et Dragan se radoucirent à une telle vitesse que l'animosité pesant sur la pièce retomba aussi tôt.

- Tu m'as manqué Solnichka. Sussura Vlad avec émotion. Viens assied toi, on a des choses à se raconter.
- A dlya nego? Grogna Drag, d'un air menaçant, prêt à sauter sur Donavan si Vlad lui en donnait l'ordre.
- My uvidim pozzhe. Répondit Vlad

Je ne sais pas ce qu'ils allaient voir plus tard et ce qu'ils savaient sur mon partenaire qui ne leur plaisait pas mais pour le moment, ce n'était pas ma première préoccupation. Non, ma priorité était de savoir... Je savais qu'il était inutile de demander, que je connaissais la réponse et qu'elle me détruirait une fois de plus mais... Mais je devais savoir. Alors je pris une grande inspiration et demandais d'une voix faible et tremblante qui ne me ressemblait pas.

- Erik ?

Les yeux tellement familier de Vlad se mirent à luire comme si ils se remplissaient de larmes. Pourtant Vlad ne pleurait jamais.

- Tu connais la réponse Elena. Me dit Drag d'une voix douce. Ton frère... Ton frère est mort en héros.

Sa réponse me fit l'effet d'un coup de poing dans le ventre. Je n'étais pas censée réagir comme ça, je ne devais pas avoir si mal mais la réalité était parfois si dure qu'elle vous rattrapait et vous assommait de nouveau alors que vous saviez déjà ce qu'elle était. Déboussolée par mon fol et mince espoir réduit en miette, je m'asseyais, une main sur le ventre comme barrière au cri de douleur qui ne demandait qu'à sortir, sur le divan bleu roi de la chambre d'hôtel. Focalisant mon attention sur un point quelconque, je refoulais avec force les souvenirs de cette nuit là. Plus vif encore depuis que mes yeux s'étaient posés sur Drag et Vlad. J'attendais toujours de les voir disparaître d'ailleurs, de me rendre compte que ce n'était qu'un rêve et de me réveiller en nage dans mon lit à la Nouvelle-Orléans.

Sans pouvoir les regarder, je les interrogeais

- Comment ?

Un silence assourdissant tomba de nouveau entre nous. Son poids était tel qu'il m'obligea à faire face aux deux fantômes de mon passé qui venait de ressurgir. Deux fantômes bien vivants.

- Il nous a sauvé la vie.

Black Hearts : Le poids du passéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant