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Haya, la sœur de Noham me rejoint dans ma chambre. Elle est restée toute la nuit à parler avec son frère.

- Qu'est-ce qu'il est arrivé à Noham, hier soir ? Lui demandais-je.

- ... Rien de particulier. Il n'aime seulement pas te voir près de l'émir. Dit-elle.

Je fronce les sourcils. Donc lui aussi...

- Pourquoi personne n'aime me voir auprès de l'émir ? Dis-je en soupirant. L'émir n'est pas dangereux. Il ne me ferait jamais de mal.

- Hiyam, ma chérie... je dis ça pour ton bien, l'émir a déjà tué. Il a massacré des hommes. Et si la rumeur est vraie, alors il a peut-être tué sa propre mère. Me dit-elle. En plus, il déteste les femmes. Hiyam, tu es sûr de toi ? Toi qui n'a jamais fais de mal à une mouche, tu veux rester auprès de cet homme ?

Même si ses paroles sont pleines de bonnes intentions, elles m'irritent au plus profond de mon âme. Elle ne sait pas ce que je sais. Reza a souffert, et les actions qu'il a faites, bien que mauvaises, il me les a justifiés.

- Je peux te le jurer qu'il est un homme bien, Haya. Lui dis-je doucement. Je le connais, je sais de quoi il est capable, il mourrait avant de me faire du mal.

- Tu l'aimes. N'est-ce pas, Hiyam ? Me demande-t-elle.

Je détourne le regard. Elle a vu ce qu'il n'a pas vu, elle a compris ce qu'il n'a pas compris. Je hoche lentement la tête. À quoi bon le garder pour moi ? Même si je le nie, elle le sait.

- Ne le dis jamais à mon frère, Hiyam. Me dit-elle. Il en ferait un scandale...

Je hoche la tête. Je ne comptais le dire à personne, de toute façon. Seule Manel et Haya le savent. La prochaine personne qui le saura est Reza. Et cela, seulement si mes sentiments sont réciproques.

- Si tu dis que c'est un homme bien, alors je te crois. Me dit-elle. Mais s'il te plaît, fais attention.

Je lui fais un léger sourire pour la rassurer. Quoi qu'ils disent, je connais la vérité. L'homme qui a pleuré pour moi alors qu'il n'a jamais pleuré pendant onze ans, l'homme qui se torturait le corps pour briser les chaînes et venir me sauver, cet homme-là ne me fera jamais de mal.

REZA

Après une petite visite dans le centre-ville, je retourne dans le palais. Je rentre dans ma chambre d'enfance pour la première fois depuis l'année dernière. Je m'assois sur ce minuscule lit et fixe le mur. Tout à l'heure, j'ai vécu une scène assez perturbante...

Le corps sans vie d'une jeune fille a été sortit de chez elle. Ses parents suivaient le convoi, pleurant et criant. Ses frères et sœurs étaient réfugiés dans les bras de leurs voisins.

Cette jeune fille aimait un homme, ils se sont connus à l'école. Elle s'entendait merveilleusement avec lui, jusqu'à en tomber amoureuse. Le garçon lui donnait des faux espoirs, jusqu'au jour où elle lui avoue ses sentiments. Malheureusement pour elle, ce n'était pas réciproque.

Ils ne se sont plus revus, et la fille était dévastée. Elle a perdue goût à la vie. Et lorsque ce garçon s'est marié avec une autre, elle n'en pouvait plus. Au point où elle s'en est ôtée sa propre vie. Et aujourd'hui, j'ai vu cette tragédie passer devant mes yeux. Je sais que c'est une prévention.

Je ne peux pas continuer avec Hiyam. Je dois tout lui avouer. Je ne veux pas que le même destin tragique lui arrive. Je ne peux pas continuer à la tromper, car je suis trop égoïste pour laisser ma seule source de bonheur partir.

Je me lève alors et retourne dans mon bureau. Salih m'y attend.

- Votre Majesté, pour votre conférence de presse... Commence-t-il.

Je l'arrête en levant ma main puis m'assois.

- Salih, je vais te poser une question et tu me répondras honnêtement. Lui dis-je.

- Bien-sûr, votre Majesté. Me dit-il.

- Si... Si tu sais qu'une femme t'aime, que tu aimes sa présence mais que tu ne ressens pas la même chose qu'elle... est-ce qu'il vaudrait mieux la garder égoïstement ou la laisser partir en lui avouant ce qu'on ressent ? Lui demandais-je.

Salih se racle la gorge. Il sait de qui je parle.

- Eh bien, objectivement, la meilleure chose est de la laisser partir... Dit-il en soupirant. Mais si c'est princesse Hiyam, ne le faites pas. Elle sera détruite. Et... Peut-être qu'un jour vous l'aimerez.

- Merci pour ta réponse, Salih. Mais je ne suis pas un homme capable d'amour. Dis-je, faiblement. L'émir des ténèbres a perdu le droit d'aimer depuis belle lurette.

Salih me regarde tristement.

- Vous en avez le droit, votre Majesté. Me dit-il. Tous les hommes ont le droit d'aimer. Elle croit en vous. Ne la laissez pas partir.

Je ferme les yeux, puis pose mes coudes sur mon bureau et mes mains sur ma tête.

- Votre Majesté, voulez-vous qu'elle retourne dans son royaume en vous détestant, puis trouver un homme qui réparera son cœur brisé, et qu'ils se marient ? Me demande Salih. Parce que si vous n'êtes plus dans sa vie, elle ne vous attendra pas pour toujours...

Je ferme fortement les yeux en serrant mes poings. Non. Non, je ne le veux pas. Je ne veux pas qu'elle soit l'épouse d'un autre. L'image d'elle dans les bras d'un autre homme me donne envie de vomir. Mais je ne peux pas le retenir avec moi alors que je ne peux pas lui donner l'amour qu'elle réclame.

Et si je reste avec elle, son amour grandira encore et encore, jusqu'à la consumer. Et j'ai peur que sa finalité soit celle de cette jeune fille. Cette fois, je ne peux pas penser qu'à moi-même. Je dois penser à elle.

- Salih, appelle Hiyam ici. Lui ordonnais-je.

- Mais, votre Majesté... Commence-t-il.

- S'il te plaît. Le coupais-je.

Il finit par hocher la tête. Un ordre est un ordre...

J'espère que tu me le pardonneras un jour, ma princesse... mais je le fais pour ton bien. Que pour ton bien.

L'émir Des TénèbresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant