L'émir Des Ténèbres

20.

Plusieurs jours sont passés. Alors que je profitais du calme dans mon bureau, mon oncle entre. Voyant son visage, je comprends qu'il m'apporte de mauvaises nouvelles. Je me redresse alors.

- Dis le, mon oncle. Dis-je en soupirant.

Il s'assoit puis me regarde, avant de prendre son souffle et parler.

- La famille de ta... de ta mère est revenue. M'annonce-t-il. Ils sont dans l'émirat.

Je le regarde en fronçant les sourcils. Ai-je bien entendu ? Je serre mon poing en tentant de garder mon calme.

- Que veulent-ils ? Dis-je en colère.

- Ils veulent... ils veulent récupérer son corps et l'enterrer dignement. Dit-il en hésitant.

Je me relève. Ma respiration se met à accélérer. Récupérer son corps et l'enterrer dignement, hein ?

- Pour qui se prennent-ils ? Dis-je fou de rage. Elle a... Elle a tué mon père !

Je commence à crier, et briser tout ce qu'il y a autour de moi. Je refuse de croire qu'ils aient pu me demander cela. Cette femme a tué mon père. Elle l'a tué sans se soucier de moi. Juste pour le pouvoir.

- Dis leur... dis leur de quitter le territoire et de ne plus jamais y mettre les pieds. Dis-je avec rage. Si je les revois, ils rejoindront cette femme.

Mon oncle hoche tristement la tête.

- Si je les revois, je la reverrais en eux. Dis-je en calmant ma colère peu à peu. Je me rappellerais une seconde fois de tout ce qu'elle m'a fait subir. Et cette fois, je me perdrais complètement. Renvoie les vite, mon oncle.

Il ne se fait pas prier puis sort de mon bureau. Je pose mes mains sur mon bureau, en gardant ma tête baissée. Je ferme fortement les yeux en tentant de calmer ma respiration. Je ne demande qu'une chose, c'est sa malédiction. Je ne lui souhaite aucun bien. Aucun.

Je relève ma tête et rouvre mes yeux. Si je continue, je vais finir par pleurer et je ne veux pas pleurer. La dernière fois que j'ai versé une larme était le jour où j'ai appris la mort de mon père, dans les montagnes. Après ce jour-là, je me suis promis de ne plus jamais être faible. De devenir un homme et le venger.

Et dire que j'attendais avec espoir que mon père revienne me chercher, je m'étais préparé à lui dire à quel point mère était une mauvaise femme... mais un soir, mon oncle est venu me voir dans ma tente. Il m'a annoncé que son frère était mort. Que mon père était mort.

Tout d'abord, on nous a dit qu'il est mort de cause naturelle. Mère l'a réveillé le matin, et il ne s'est jamais réveillé. J'étais le seul à savoir que c'était faux... parce que selon une fausse autopsie, mon père serait mort le soir et ma mère l'a découvert au matin. Sauf que ce matin là, mère était avec moi...

Elle m'a envoyée dans les montagnes ce matin là... j'avais compris plus tard qu'elle l'a tué. Et des années plus tard, elle l'a avoué. Elle l'a éttoufé avec un cousin dans son sommeil, puis s'est endormis à ses côtés pour ne pas paraître suspecte. Elle le voulait mort, et me voulait mort, pour pouvoir régner sur l'émirat seule.

Elle a profité de ce trône durant dix ans, avant que l'on se recroise. Et la suite appartient à l'histoire...

HIYAM

En marchant dans les couloirs, je croise l'oncle de l'émir. Je m'arrête devant lui, il n'a pas l'air bien.

- Allez-vous bien ? Lui demandais-je.

- Je vais bien, ma fille. Dit-il faiblement. Je vais bien...

Puis il s'en va. J'entends des objets se briser depuis le bureau de l'émir. Qu'est-ce qu'il se passe ? Mais je m'en vais rapidement, comprenant que ce serait une mauvaise idée de le croiser tout de suite.

- Hiyam, qu'est-ce que tu fais ici ? Entendis-je.

Je me tourne et vois Anis.

- J'allais prévenir l'émir que j'allais sortir. Lui répondis-je.

- Pas la peine. M'assure-t-il. Si je viens avec toi, il ne dira rien.

Je hoche la tête.

- Dans ce cas, on y va maintenant ? Lui demandais-je.

Il hoche la tête alors je le suis jusqu'à l'extérieur du palais. Une voiture nous y attend. Anis m'ouvre la portière, je m'installe puis il s'assoit à mes côtés.

Je tourne ma tête vers la fenêtre et regarde le paysage. Cela fait si longtemps que je ne suis pas sortis... voir la nature, voir la création de notre Seigneur me fait tellement de bien. Ma mère aimait beaucoup sortir aussi.

Elle me prenait avec elle dans un grand parc, et me faisait admirer le paysage. Elle aimait beaucoup regarder le ciel jusqu'à ce qu'il devienne sombre. Quand j'étais petite, je ne comprenais pas pourquoi, mais maintenant je comprends en sentant un apaisement sans pareil.

- Nous n'avons pas eu l'occasion de parler depuis l'incident. Me dit Anis. Tu vas mieux maintenant, n'est-ce pas ?

- Je vais mieux, al hamdulilLah. Le rassurais-je. Vous avez attrapés le coupable ?

- Oui... Enfin, c'est surtout l'émir qui l'a attrapé. Me répond-il. Il l'a torturé comme jamais il ne l'avait fait.

J'avais raison. Ces cris ne pouvaient provenir de rien d'autre.

- Mais pourquoi ? Je pensais qu'il détestait les femmes. Dis-je en grimaçant.

- Certes... mais tu es sous sa protection. Malgré lui, il te voudra toujours en sécurité jusqu'à que tout soit rétablie dans le royaume. M'explique-t-il.

Je hoche la tête en baissant les yeux. Donc malgré sa haine, il tient sa parole. Une haine que je ne comprends toujours pas, d'ailleurs. Comment peut-il détester toutes les femmes ? Qu'il ne veuille pas les fréquenter, je comprends... mais en arrive à toutes les détester ? Mais malheureusement, certains hommes sont ainsi...

- Je ne veux plus que tu y penses, maintenant. Me dit Anis. Profitons de notre journée, loin du palais et de tout ces soucis. D'accord ?

Je hoche la tête. Il a raison. Je ne sors pas tous les jours, je dois en profiter. Je dois en profiter quelques heures avant de revenir à la solitude dans ce gigantesque palais...