L'émir Des Ténèbres

79.

- Aucun ne veut parler, votre Majesté. Me dit Salih.

Je regarde ces hommes qui étaient censés travailler pour moi. Ils ont tous la tête baissée. Les chiens de Samir. Ils devaient le prévenir de tous nos faits et gestes.

- Vous avez choisis le mauvais camp. Leur dis-je.

Après l'incident de la dernière fois, j'ai enquêté sur tous les hommes qui gardent le palais. Samir a réussi à faire infiltrer quelques-uns de ses hommes. Les derniers jours étaient déjà assez dur, et cette nouvelle m'a fait exploser de colère.

- Exécute-les tous. Dis-je froidement. Tout de suite.

Les hommes me regardent apeurés, mais je leur tourne le dos. Et sur le chemin, j'entends le bruit de la détonation. Salih m'a obéit. Et savoir que ces traîtres n'existent plus me calme.

Je retourne à l'intérieur du palais. Je n'ai plus revu Hiyam depuis la dernière fois. Selon ma sœur, elle irait de mieux en mieux. Je suis heureux pour elle. Je ne voulais pas qu'elle reste malheureuse pour toujours. Elle sera bien plus heureuse sans moi, elle s'en rendra compte.

- Votre Majesté, le travail est fait. Dit Salih en me rattrapant. Nos hommes sont en train de se débarrasser des corps.

Je hoche la tête. Bien.

- Tout est prêt pour demain ? Lui demandais-je. Il faut que tout le monde entende ce que j'ai à dire.

- Tout est prêt, cheikh Reza. Me dit-il. La nouvelle est également arrivé pour vos alliés. Ils sont en train de préparer leurs armées.

- Parfait. Soufflais-je. La prochaine étape est d'anéantir les rebelles, et tuer Samir.

Je rentre dans mon bureau, et Salih me suit toujours à l'intérieur.

- Donc princesse Hiyam et sa famille rentrent bientôt ? Me demande-t-il.

Je hoche la tête, même si cette pensée me dérange beaucoup. Si ça ne tenait qu'à moi, je la garderais ici pour toujours. Et si elle n'a personne d'autre pour la protéger ? Je ne serais pas là...

- Il n'est pas trop tard pour tout lui avouer, vous savez. Me dit Salih.

- Je n'ai rien à avouer. Rétorquais-je. Je lui ai dis tout ce que j'avais à dire.

Salih soupire. Lui, le frère de Hiyam et ma sœur tentent de nous rapprocher de nouveau, je ne suis pas dupe. Mais... j'ai été assez clair. Je ne retournerais pas sur mes positions.

- Tu peux partir, Salih. Lui dis-je. Je vais tout revérifier pour demain.

Il hoche alors la tête et quitte mon bureau. Je ressors toute la paperasse et me nois dans le travail pour, encore une fois, faire taire ces voix insensés et ce sentiment étrange...

HIYAM

Je prends une couverture, et sors dans le balcon. Je m'assois sur une des chaises, puis me couvre. Une fois installé, je sens l'air frais du soir sur mon visage, et mon regard se tourne vers le ciel étoilé.

- Ça fait longtemps que je ne t'ai pas parlé, maman. Dis-je doucement. Je suis désolé, ces derniers jours, je ne me sentais pas bien.

Je ferme légèrement les yeux, pour pouvoir mieux l'imaginer face à moi.

- Enfin, tu le sais déjà. Tu me réconfortais dans mes rêves. Même si ce n'était qu'un rêve, j'ai envie de croire que c'était réel... Dis-je faiblement. Tu connais la peine de ta fille...

Je me laisse toucher par les sensations que me procure le vent. L'impression que cette légère brise me prend dans ses bras d'une manière maternelle.

- J'ai eu tellement d'espoir... tellement... tout le monde me disait que c'était impossible qu'il ne m'aime pas. Dis-je tristement. Selon eux, ses actes le prouvait. Ils me l'ont tellement répétés, maman, que j'ai finis par y croire.

J'ouvre enfin les yeux, mes cils sont mouillés à cause de mes larmes...

- Je l'aime tellement, maman. Dis-je, la voix brisée. Je ne sais pas quoi faire.

Je repose ma tête sur l'arrière de la chaise, en gardant les yeux fixes sur le ciel. Maintenant, c'est le moment où je peux vider tout mon sac. Que ma mère m'entende ou non, j'ai besoin de parler.

- J'ai fais croire à tout le monde que j'allais bien, mais mon cœur se brise chaque fois que je le vois. Chuchotais-je, les larmes aux yeux. Aimer sans être aimé en retour, ça fait tellement mal. Tellement.

Je finis par amener mes jambes vers moi, les tenant par ma main et enfouir ma tête entre eux. Je laisse alors échapper, silencieusement, les quelques larmes que je m'empêchai de verser.

- Est-ce que ça va s'arranger avec le temps, maman ? Est-ce que je pourrais le revoir un jour sans ce pincement au cœur ? Dis-je, les lèvres tremblantes. Je ne savais pas ce que c'était... d'aimer quelqu'un. Pourquoi c'est tombé sur moi ?

L'oublier ? Ne plus l'aimer ? Ce serait tellement plus simple si c'était le cas, mais d'un autre côté... c'est le premier homme que j'ai aimé, et je ne veux pas oublier cela. Là, tout de suite, je ne veux aimer personne d'autre. Je ne le veux tout simplement pas.

- Tout s'arrangera, petite soeur. Entendis-je.

Je relève la tête en sursautant. Mon frère est là... je me lève rapidement de ma place.

- Tu es là depuis longtemps ? Lui demandais-je.

- Assez longtemps pour savoir ce que ma soeur ressent. Me répond-il.

J'avale difficilement ma salive. Je ne voulais pas qu'il l'apprenne de cette manière... et je ne voulais pas qu'il sache que je lui cache des choses.

- Tu n'es pas fâché ? Demandais-je avec prudence.

Il me sourit puis s'approche de moi, il pose ses mains sur mes joues puis m'embrasse le front.

- Non, et je le savais depuis le début. Me dit-il. Mais je ne veux pas que tu restes de ton côté, Hiyam. Maman n'est peut-être plus là pour te conseiller, mais je suis là.

Je le regarde avec les larmes aux yeux puis le prends dans mes bras.

- Je suis désolé de l'avoir caché. Dis-je doucement. Je ne savais juste pas comment me sentir...

Il me caresse alors lentement les cheveux.

- Ça te dit que l'on se raconte des histoires en regardant le ciel sur le balcon ? Me demande-t-il.

Je relève la tête vers lui.

- Comme quand on était petit. Dis-je en souriant légèrement.

Il hoche la tête et me sourit en retour. Je hoche la tête à mon tour puis le tient par la main et l'emmène au balcon. J'aurais dû venir à lui en premier... mon frère est mon premier réconfort, mon premier ami, mon premier tout, et je regrette de le comprendre aussi tard.