65.

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Depuis plusieurs heures, on me fouette le dos. Sans même le voir, je suis certain que mon dos est rouge et saignant. Je n'ai pas crié ni montré un signe de douleur depuis tout à l'heure mais je suis tout de même humain, je la ressens et elle me faiblit.

Mais je tiens le coup. Je tiens le coup pour cette femme qui crie et pleure d'horreur face à moi qui me fait torturer. Je tiens le coup pour ma Hiyam.

- Je vous en supplie, lâchez-le ! Crie-t-elle en pleurant. Vous allez le tuer !

- Ne... Ne les supplie pas. Lui dis-je avec difficulté. Et ne pleure pas. On va s'en sortir.

Elle ne répond pas mais continue à pleurer. Elle tient à moi, au point de pleurer face à ma douleur ? Cette femme, je ne la comprendrais jamais. Je suis un homme détestable, violent et qui n'arrive pas à maîtriser sa colère. Elle est insouciante, naïve et généreuse. Tout mon contraire...

- Ne pleure pas, ma chère femme. Ton tour est venu. Entendis-je.

L'homme qui me fouettait s'arrête, et Samir fait son entrée. Hiyam lève la tête, effrayée. Je serre mes poings.

- Continue avec moi. Continue à me torturer. Lui dis-je. Je n'ai pas reçu assez de coups.

- Vois-tu, ma chère femme ? Cet homme veut encore prendre des coups, pour toi. Dit Samir en souriant. Il est tombé sous ton charme, comme tous les hommes que tu as croisé. Le malheureux.

Ma respiration s'accélère. Je ressemble à un animal enragé. Mon seul désir est de trancher la gorge de ce lâche. Je n'ai jamais eu autant envie de prendre la vie de quelqu'un que tout de suite.

- Je vais te demander quelque chose ma chère femme... Commence-t-il en s'agenouillant devant Hiyam. Veux-tu m'épouser, princesse Hiyam ?

Je vois le dégoût dans les yeux de Hiyam. Elle tourne sa tête vers moi, et ne détourne pas le regard. Avec ce simple regard, je lui donne toute la force dont elle a besoin. Je veux qu'elle se sente plus forte pour pouvoir s'en sortir.

- Alors, mon amour ? Insiste Samir.

- Tu ne l'as jamais aimé. Dis-je en essayant de faire gagner du temps à Hiyam.

Samir se tourne vers moi. Il a les clés des menottes dans sa poche arrière. Il faut que Hiyam réussisse à la récupérer avec ses pieds, et la cacher sous sa robe.

- Si tu l'aimais, tu ne supporterais pas de la voir dans cet état. Lui dis-je froidement. Tu ferais tout pour qu'elle soit heureuse. Tu ne l'aimes pas. Tu veux l'utiliser pour avoir le trône.

- Est-ce l'émir au cœur de pierre qui m'apprendra ce qu'est l'amour ? Dit-il d'un ton sarcastique. Mais tu as raison. Je ne l'aime pas. Elle m'obsède. Tu sais ce que ça veut dire ?

Je continue à le regarder, pendant que Hiyam tente le tout pour le tout afin de prendre les clés.

- Ça veut dire que je la veux par tous les moyens. Qu'elle le veuille ou non. Qu'elle soit heureuse ou dans la douleur. Dit-il en souriant. Son bien-être est le dernier de mes soucis. Je la veux, seulement.

Puis il se retourne d'un coup et l'attrape par la gorge.

- Et je vais même te montrer à quel point elle m'obsède. Dit-il doucement.

Non ! Je bouge mes bras dans tous les sens comme à chaque fois, mais rien n'y fait. Les chaînes sont résistantes. Et avec mon corps ramolli, cela ne m'aide pas.

- Non ! Non, Samir ! Crie-t-elle en pleurant. Pas ça !

- Samir ! Espèce de ***** ! Criais-je avec rage. Lâche la !

Mais il approche sa tête d'elle, et comme la dernière fois, elle lui crache dessus. Il se recule pour essuyer.

- Ah, ça ne va pas continuer comme ça ! Dit-il en colère.

Mes mains tremblent de colère. Les scénarios de tortures me tournent en tête, il ne sait pas ce que je lui réserve. Oh que non, il ne le sait pas ! Il regrettera de l'avoir touché.

- J'espérais ne pas l'utiliser mais puisque tu me refuses... Dit-il en mettant sa main dans sa poche. Si ce n'est pas moi, personne d'autre ne t'aura.

HIYAM

Il sort une seringue de sa poche et l'enfonce rapidement dans ma cuisse. Je crie de douleur. Je tente de ne pas montrer ma douleur mais je ne peux pas... surtout lorsque celui qui me l'inflige est un homme qui peut me faire subir la pire des horreurs.

Je pensais qu'il m'avait injecté de la drogue comme à chaque fois, mais plus je sens le liquide couler dans mon sang, plus je me mets à respirer rapidement. En fait, je cherche de l'air. Je suffoque.

- Ce que je viens de lui injecter est un poison mortel. Dit-il en souriant. Elle peut tenir un mois, mais pas plus.

Je fais les gros yeux. Du... poison ? Je comprends alors les réactions de mon corps. Mon cœur qui bat lentement, mon manque d'air, ma gorge brûlante.

- Pour le moment, elle aura de léger symptôme. Mais plus le poison restera dans son cœur, plus son état s'aggravera. Elle sentira que tout son corps de l'intérieur se brise et brûle. Elle se mettra à vomir du sang. Explique-t-il sans grandes émotions. Puis à des moments, elle ne pourra plus respirer. Mais ça ne durera pas. Elle commencera à sentir une douleur... comme si je lui amputais ses membres sans anesthésie.

Je l'écoute, la boule au ventre... je ne cache pas que je suis pétrifiée. Non. Je vais mourir. Ce poison va me tuer. Samir va me tuer. Les larmes me montent aux yeux. Je ne pourrais plus revoir mon père et mon frère. Je vais les laisser seuls. Mon Seigneur, je ne veux pas mourir !

- Hiyam... Hiyam... tiens bon. Me dit Reza faiblement, après que Samir soit parti.

Je vais tenir bon. Je vais tenir bon, mais jusqu'à quand ? Je n'aurais même pas le temps d'avouer à Reza mes sentiments... je n'aurais pas la chance de savoir si c'est réciproque ou non. Je ne pourrais plus passer ces merveilleux moments que l'on passe ensemble en secret. Ces matins où l'on prenait le petit-déjeuner dans son balcon, ses journées où l'on parlait de tout et de rien.

Et Manel... Manel, qui est devenue comme ma petite sœur. Celle que j'ai accueillis à son arrivé au palais. Celle qui m'a fait confiance en premier. Celle qui m'a toujours soutenue, qui m'a fait rire lorsque je pleurais. Celle avec qui je passais mes nuits à parler jusqu'à voir les premiers rayons de soleil.

Je ne pourrais plus les revoir. Je vais partir rejoindre ma mère. Mais malgré ma peur, je ressens un petit soulagement... cet homme face à moi qui tente de me rassurer, qui veut brûler le monde pour me sauver, cet homme me soutiendra. Il m'accompagnera jusqu'au moment fatidique... jusqu'au moment où l'ange de la mort me viendra.

L'émir Des TénèbresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant