L'émir Des Ténèbres

21.

J'ai passée une merveilleuse journée avec Anis. Peut-être même la meilleure depuis mon arrivée ici. Mais pour moi, le bonheur ne dure jamais...

En voulant rentrer, je me retrouve entouré d'une énorme foule. Je commence à paniquer, ne sachant pas ce qu'ils me veulent.

- C'est elle la princesse impure. Crie l'un d'entre eux. Elle a fui son royaume et a séduit notre Émir.

Mon cœur se met à battre rapidement. La foule est en colère. Vont-ils me tuer ici ? Serait-ce ma fin ? Anis tente de me protéger du mieux qu'il peut, mais c'est impossible qu'il se mette contre toute une foule.

- Si vous ne reculez pas, l'émir vous le fera payer. Leur dit Anis.

Mais cela ne fait qu'empirer. D'autres personnes se rajoutent, et se mettent à m'insulter. J'ai toujours essayé de faire en sorte que ces paroles ne m'atteignent pas, mais au bout d'un moment, cela me touche... je paraîs sûrement pour une faible, mais les larmes me montent aux yeux.

- Écartez-vous d'elle. Entendis-je.

Je relève la tête, et vois de la peur dans le regard des gens. Que se passe-t-il ? Je fais les gros yeux en le voyant. L'émir... les gens lui frayent un chemin, et gardent la tête baissée. L'émir s'approche de moi et les regarde tous.

- Que chacun d'entre vous s'avance et s'excuse. Ordonne-t-il.

Il n'a pas eu à se répéter pour que tous obéissent à son ordre.

- Leur pardonnez-vous ? Me demande-t-il. Si votre réponse est non, j'ordonnerais leur mis à mort.

Je fais les gros yeux. Mon Seigneur... les gens me regardent effrayés. Effrayés de ma réponse.

- Oui... je... je leur pardonne ! Dis-je en bafouillant.

Ils relâchent tous un soupire de soulagement. Je ne suis pas aussi cruelle pour les faire exécuter... ils m'ont fait mal en m'insultant de ce que je ne suis pas, mais ils ne méritent pas de mourir pour cela.

- La prochaine fois je ne serais pas aussi clément. Dit-il froidement. Si ce n'était pas pour la princesse, vous auriez tous déjà rencontrés l'ange de la mort. Maintenant, partez.

La foule se disperse très rapidement. Je suis assez surprise de voir le pouvoir qu'il a sur eux. Il se tourne finalement vers moi.

- Et vous... je ne vous ai pas autorisé à sortir seule. Me dit-il froidement.

- Je ne suis pas seule. Anis est avec moi. Lui dis-je.

Il serre sa mâchoire puis m'attrape par le poignée.

- Si vous avez besoin de sortir, ce sera moi qui vait vous accompagner. Me dit-il d'un ton autoritaire. Personne d'autre.

Il est sérieux ? Je préfère ne jamais sortir que de sortir avec lui ! Je ne pourrais pas rire, sourire ni profiter de ce qui m'entoure. Il me tire alors jusqu'à sa voiture, sans me laisser placer un mot. Il me fait rentrer puis m'assois sur le côté passager. Il ferme la portière et s'assoit côté conducteur.

Il démarre sans avoir laissé Anis rentrer.

- Vous avez laissés Anis. Lui fis-je remarquer.

- Il prendra une autre voiture. Me répond-il en restant concentré sur la route. Personne n'a le droit d'entrer dans ma voiture.

Je fronce les sourcils. Personne... pourtant je suis là. Sûrement parce que, encore une fois, je suis "sous sa protection" et qu'il ne peut pas le laisser seul. Cette histoire commence à me lasser.

- N'avez-vous pas peur de menacer votre peuple ? Lui demandais-je.

- Je n'ai peur de rien, princesse. Me dit-il d'une voix neutre.

- ... les organisations gouvernementales des autres pays peuvent vouloir intervenir. Lui dis-je. Je veux dire, vous tuez, vous menacez... ils n'aiment pas ce genre de chose.

Je le vois serrer sa main sur le volant, avant d'arrêter la voiture sur le bord de la route.

- Qu'ils fassent ce qu'ils veulent. Ils n'ont pas réagis lorsque vous avez fuis votre propre royaume, vont-ils réagir pour mes actions ? Dit-il d'une voix colérique. Ce sont des hypocrites, et je n'ai pas à craindre des hypocrites.

Je soupire. Je vois. Il a pris le monde entier pour ennemi...

- Votre Majesté... pourquoi détestez-vous les femmes ? Osais-je lui demander. Nous ne vous avons rien faits et pourtant, vous nous vouez une haine sans précédent... pourquoi ? Une femme vous a-t-elle brisée le cœur ?

Il me regarde longuement sans répondre. Je remarque dans ses yeux une lueur de colère et de tristesse mélangée. Avais-je raison ?

- De la pire des manières. Souffle-t-il en redémarrant la voiture.

Je reste sans voix face à sa confession. Cette femme a créé un monstre... je me demande ce qu'il lui est arrivé. Est-elle morte ? En vie ? S'il en est arrivé à devenir un homme aussi cruel... c'est qu'elle a frappée là où cela fait mal. Elle l'a brisée tellement fort.

Sa colère est son seul moyen de vider son cœur. Maintenant que mon hypothèse est confirmée, je ne peux m'empêcher d'éprouver de la peine pour lui. Pourra-t-il guérir de cette peine, un jour ?

- Je sais que vous ne m'aimez pas, mais si jamais vous voulez en parler avec quelqu'un... je serais là. Dis-je sans pouvoir m'en empêcher. Parfois, parler peut faire du bien.

Il me regarde encore une fois, avant de retrouver son air froid.

- Je n'ai pas besoin d'une psychologue. Dit-il sèchement.

- Je ne parle pas d'être une psychologue mais d'être à l'écoute de façon bienveillante. Rétorquais-je. Quand ma mère est décédée, j'aurais aimé que quelqu'un me fasse une proposition pareille. Je n'avais personne avec qui partager ma peine... je devais y faire face seule.

Je baisse alors la tête.

- Mais si vous ne le voulez pas, alors ne laissez pas la colère vous contrôler. Dis-je doucement. Vous ne lui donneriez que raison. Montrez lui, où qu'elle soit, que vous n'avez pas changé à cause d'elle. Montrez lui qui vous êtes réellement, au plus profond de votre âme...

J'ose relever ma tête et le vois perdu dans ses pensées. J'espère qu'il réussira à s'ouvrir, petit à petit... j'espère que les pierres emprisonnant son coeur se briseront enfin. Mais cela n'arrivera que s'il le veut. S'il le veut réellement.