Chapitre 4

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— Voilà, c'est là, renseigna Akis en montrant une chaumière légèrement plus imposante que les autres.

Elle se situait à quelques dizaines de mètres seulement de la lisière de la forêt ; en somme, elle faisait partie des toutes premières habitations accessibles depuis le chemin par le biais duquel la Huitième Brigade Royale de Balhaan avait progressé jusqu'à Aville. D'un autre côté, le village n'était pas vraiment un dédale de rues infinies... Remerciant le jeune rouquin d'un signe de la tête cordial, Rolan et Erik s'en retournèrent auprès de Lida, laquelle avait pris le parti de se rapprocher sans plus attendre de la porte de la dite chaumière. Elle hébergeait le Bourgmestre, auprès duquel la Brigade entendait prendre contact...

Lorsqu'ils débarquaient au sein d'un village, ils procédaient toujours de la même manière. Ils rentraient en contact avec le responsable de la localité, quel qu'il soit, afin de lui demander de leur mettre à disposition un endroit où dormir. Ils n'avaient pas besoin de grand-chose, dans la mesure où leurs chevaux transportaient l'essentiel, mais ils ne disaient jamais non à un repas chaud et copieux : la viande séchée et les mets récoltés au cours de leur procession avaient un petit quelque chose de routinier qu'un ragoût généreux chassait efficacement. En outre, ils n'étaient pas venus jusqu'à Aville par pur plaisir : leur ambition était en vérité d'y dénicher un apprenti, que l'Oracle leur avait indiqué après avoir été transporté par une vision nébuleuse. Ils ne savaient pas grand-chose de l'individu qu'ils étaient venus chercher, alors l'assistance des locaux s'avérerait à n'en pas douter indispensable pour que leurs recherches soient menées à bien. Il n'était pas question d'embarquer la mauvaise personne à cause d'un empressement malvenu...

— L'Oracle a parlé d'un jeune homme roux, murmura vaguement Rolan en lorgnant du côté d'Akis, lequel s'éloignait sans les quitter du regard. Et si c'était ce gamin ?

— Tu plaisantes, s'offusqua Erik avec un sourire quelque peu maussade. Loin de moi l'idée de lui manquer de respect, mais je ne vois pas trop en quel honneur il pourrait nous être utile pendant une bataille contre des brigands...

Leur principal rôle, c'était effectivement le maintien de l'ordre : et ce garnement à l'air maladroit, débraillé et naïf risquait d'être davantage source de troubles que de sérénité une fois une épée au poing. Balhaan avait la chance inouïe, grâce à ses dix Brigades Royales, de pouvoir tenir le commun des mortels à l'écart des périls qui couraient partout ailleurs sur le continent d'Ipeiris ; ça n'était pas pour enrôler, derrière, des individus incapables de veiller sur leur propre sécurité. Car il allait sans dire que même si tous, à un moment ou à un autre de leurs existences, avaient été des apprentis, ils n'avaient pas attendus leur vingtaine pour commencer à manier les armes, à l'instar de Jade, encore jeune mais pourtant largement en mesure de tenir tête à un soldat ordinaire dans des conditions équitables.

Alors qu'il essayait de se convaincre du bien fondé de la réponse d'Erik, Rolan constata qu'Akis, lequel avait continué à les tenir à l'œil tout en s'éloignant pas à pas, s'était pris les pieds dans un parterre de fleurs et s'était étalé sur celui-ci de tout son long ; il soupira bruyamment, secoua la tête en signe de capitulation et se focalisa davantage sur la porte contre laquelle Lida frappait son poing. Une paire de secondes plus tard, elle s'ouvrit pour laisser apparaître un homme bien portant, au crâne dégarni et âgé, à vue de nez, de la cinquantaine. Ce dernier balada sur eux un regard d'abord décontenancé, puis davantage impressionné ; finalement, il se figea lorsque ses yeux croisèrent ceux d'Erik et de Rolan.

— Grands dieux ! Messires Erik et Rolan ! Vous êtes encore membres de la Huitième Brigade, pas vrai ? Ces gens sont vos nouveaux compagnons ?

— Vous vous souvenez de nous ?

Le Royaume de BalhaanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant