Les larmes de Tranit - 8 & 9

CHAPITRE SIX

Son parfum était inimitable. Délicieusement frais, à l'image de sa personnalité vive et joyeuse. Tranit savait que c'était Suwane qui venait la voir et une onde de relaxation la parcourut. Sa petite Fée au regard enjôleur et aux caresses torrides. Qu'il serait bon de se réveiller et de la serrer contre soi.

Et Adacie ne devait pas être trop loin ! Ces deux-là étaient trop éprises l'une de l'autre pour que même les obligations de service ne les éloignent trop longtemps. Tranit avait de la chance de les avoir à ses côtés.

Était-il vraiment possible qu'ensemble elles soient si chanceuses que l'avait prédit Erwan ? Pouvait-on porter chance ? Sans doute une question à laquelle son père pourrait répondre. Il aimait parfois réfléchir sur ces affirmations.

Mais Tranit se sentait soucieuse. Ne serait-ce pas blasphématoire de douter de l'influence de Nataé ? Puis Tranit se souvint que les gens de l'ouest, tout comme ceux de l'est, tels les Carcassonnais, ignoraient tout de cette déesse et qu'eux parlaient d'une Tykée. Et dans certains coins de l'ouest, chez Suwane, c'était même un dieu !

Comme c'était bizarre. Tranit s'était toujours ennuyée lorsqu'on lui parlait des dieux et des déesses ainsi que de leur importance. Trop de complications pour pas grand-chose, mais ça, mieux valait le garder pour soi.

* * * 

Les plats, plutôt simples lorsqu'on l'écoutait raconter comment il les avait préparés, étaient délicieux. Repues, rassasiées, contentes d'être là, Adacie et Suwane écoutaient Erwan parler de ce qu'il souhaitait faire d'ici quelques jours.

Et là, sans la pression des responsabilités, sans l'urgence de quoi que ce soit, il était bien plus détendu pour expliquer et tout se déroulait bien plus calmement. Même Adacie adoptait un comportement plus normal aux yeux de Suwan, qui voyait bien la différence.

C'était presque comme si deux amis bavardaient. Suwane savait qu'Adacie et Erwan se connaissaient depuis près de cinq ans. Mais par la suite, alors qu'Erwan s'occupait d'elle et de ses camarades sauvés, qu'il les instruisait lui-même ou leur faisait suivre des cours par des druides qu'il avait payés de sa poche, les circonstances avaient fait que c'était Adacie qui s'était trouvée à ses côtés en plusieurs occasions importantes.

Non pas seulement parce qu'elle était l'une des meilleures ni l'une des plus acharnées à apprendre, à s'instruire pour Son prophète, mais simplement le hasard. Et cela leur avait permis de développer une relation un peu différente de celle qu'Erwan entretenait avec la presque soixantaine de jeunes gens qu'il avait pris directement sous son aile.

Pourtant, cela ne facilitait rien. Erwan lui en demandait bien plus qu'aux autres et Adacie s'ingéniait à le satisfaire au-delà de ses espérances.

Erwan tapota le tableau sur lequel il avait écrit plusieurs points reliés entre eux par des flèches, il appelait ça un diagramme et Suwane s'y était vite fait puisqu'il en utilisait souvent et par conséquent Adacie aussi.

— Le maréchal Rowèn pense pouvoir entamer le siège d'Azil d'ici trois jours. Les défenseurs espèrent des renforts qui ne viendront jamais. Ils n'ont malheureusement pas répondu aux demandes de pourparlers que j'ai fait parvenir. Comme s'ils ne pouvaient concevoir la réalité.

Mais ça, ce n'est plus mon problème. Ils vont se faire secouer et reprendront peut-être leurs esprits. Enfin, grâce à vous deux, nous avons maintenant contacté toutes les seigneuries aux alentours. À trois jours de distance, personne n'interviendra.

Si des messagers peuvent quitter la ville, nous avons l'assurance qu'ils seront accueillis et gentiment neutralisés. Ces gens sont tous reliés les uns aux autres et nous aurons besoin d'eux plus tard.