CHAPITRE TRENTE-QUATRE

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3 thermidor, en matinée

Sans qu'elle n'ait rien entendu depuis l'intérieur de la tour, les gens d'Erwan avaient fait parvenir pendant sa courte nuit, dans un convoi d'une demi-douzaine de grands chariots montagnards, un nombre inimaginable de pièces détachées et d'outillage.

Les jeunes gens passèrent presque trois heures à inventorier l'ensemble qui serait installé dans un renfoncement de la paroi rocheuse à quelques toises de l'édifice. Lors des travaux d'aménagement, un espace assez grand pour servir d'entrepôt, d'écurie ou bien d'atelier avait été creusé.

Lorsqu'on leur signala que les rapports d'activité étaient disponibles, ils n'avaient encore rien commencé, mais l'humeur bougonne d'Erwan avait complètement disparu et Tranit avait échappé quelque temps à ses inquiétudes.

Ils remontèrent au dernier niveau de la tour sans parler et retrouvèrent l'agitation caractéristique qui survenait lors des mises à jour de la carte. Ils observèrent les mouvements signalés par les trois régiments.

Le temps de tout collecter puis de transmettre ; ces informations étaient celles du matin. Hormis les unités de cavalerie détachées en reconnaissance ; il n'y avait pour l'instant pas encore de combats. Le prochain rapport risquait d'être bien différent.

Mais comme rien de menaçant ne se présentait, ils envoyèrent le signal de confirmation. Rien d'autre à faire. Intervenir par de nouveaux ordres ou bien grimper dans un kañv pour aller se rendre sur place ne servirait à rien. Tranit devait supporter le fardeau de la délégation.

Puis à son grand plaisir, le mousquetaire lui montra un tableau noir qu'on amenait. De nouvelles informations de disponibles ? Reconnaissant les jeunes qui se préparaient, il glissa à la jeune femme.

— Des gamins de la 3e compagnie ; dit-il crânement. Les plus âgés. Ce sont ceux que Sa Seigneurie a envoyés récolter des informations auprès de nos prisonniers. Si les dragons devaient se montrer persuasifs, ils n'en seraient pas traumatisés.

Tranit ne répondit rien, mais fixa le tableau avec attention. Un jeune mousquetaire se planta fièrement devant, salua Erwan de façon TTA puis à la manière que seuls les mousquetaires étaient autorisés à faire : en se découvrant de leur chapeau à large bord et en effectuant une petite courbette.

— Mon Seigneur, colonel ; dit-il en essayant de prendre son ton le plus formel possible ; nous avons une partie des informations demandées. Plusieurs sources confirment que généralement le grand prince de Lannemezan se repose sur un fidèle pour l'élaboration détaillée de ses plans. Le maréchal Lièk ; comte d'Ozon. Il a dans sa jeunesse passé quelques années au sein de la 22ème impériale.

Tranit se pencha en avant. Elle en avait entendu parler de cette unité. Plusieurs anciens d'Outre-berge ou de Maubourguet y avaient effectué quelques années de service dans leur jeunesse.

Elle savait que c'était la seule unité impériale active à des mois de marche. Les deux autres unités étaient des légions auxiliaires. Toutes les trois étaient bien à l'est, sans doute à plus de cent lieues d'ici.

— Étant maintenant âgé ; poursuivait le jeune soldat, il approcherait de la cinquantaine, il se repose lui-même sur deux adjoints qui le suivent maintenant depuis une dizaine d'années. D'anciens impériaux eux aussi. Les seigneurs de Récurt et d'Arné.

Pas de nobles dirigeant des terres d'importances. Sans doute les cadets d'une famille trop nombreuse pour faire des comtes de chacun de ses enfants. Et donc des hommes attachés à leur tâche, pensaient en même temps Erwan comme Tranit.

— Leur mission essentielle est d'assurer la sécurité des hauteurs, face aux sauvages et de s'assurer que les cités militaires sont toujours en état d'assurer leur rôle. Le maréchal d'Ozon est connu pour résider quasiment en permanence à Montréjeau, qui assure la protection du comté de Lannemezan.

Les larmes de Tranit - 8 & 9Où les histoires vivent. Découvrez maintenant