Chapitre 9

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Je suis réveillée par un bruit répétitif qui finit par s'arrêter. J'ouvre doucement les paupières et je remarque que je suis près de Kostas, trop près. A peine quelques centimètres nous séparent. J'aimerais l'accuser mais c'est moi qui ai bougé pendant la nuit.

Nos regards se croisent avant que je n'aie le temps de me décaler. Je me détourne rapidement sur le côté.

Je sens le lit bouger puis Kostas se dirige vers le dressing. Je ferme les yeux car je n'ai pas envie de le voir se déshabiller. J'entends ses vêtements tomber au sol, le tintement du ceintre qu'on déplace puis le tissu d'une chemise. Il y a aussi le zip d'un du pantalon, le son de la semelle des chaussures.

Je n'entends plus rien mais je sais qu'il est là, je le sens. Pourquoi ne bouge-t-il pas ? Je suis certaine qu'il m'observe mais je n'ai pas envie de le vérifier. Je ne veux pas croiser son regard noisette qui n'a rien de chaleureux.

Puis un bruit de pas retentit. J'entends la porte se refermer derrière lui. Il doit prendre des choses dans la cuisine car j'entends le coulissement des tiroirs. La sonnerie se fait entendre. Qui est-ce ?

Je me lève d'un coup mais je chancelle. Ma tête tourne et mes oreilles sifflent. Je me tiens contre la barre du lit à baldaquin. Je marche doucement vers la porte d'entrée mais il est trop tard.

Le battant est fermé et Kostas m'observe. Près de lui, il y a plusieurs cartons. Certains sont énormes.

- Tu ne peux pas t'échapper, déclare-t-il.

Il récupère sa sacoche de travail puis prend les clés sur la commode.

- C'est pour toi. Il n'y a rien dans cette maison et je ne veux pas que tu finisses par perdre la tête.

Sur ces mots, il sort. Ensuite, la porte principale se referme. Je n'essaye même pas de lui forcer la main. Il m'attraperait en moins de deux secondes.

A la vue de tous ces cartons, je ne peux m'empêcher d'être curieuse. Je remarque qu'il y a un énorme écran plat à accrocher au mur. Je commence à ouvrir les cartons pour faire l'inventaire de ce qu'il y a.

J'ouvre un joli boite rose pâle qui attire l'œil. A l'intérieur se trouve du maquillage. C'est quoi ça ? Il m'offre des cadeaux maintenant. Pourquoi du maquillage ? Je ne suis pas sûre de comprendre le message.

Dans un autre carton, je trouve des bandes dessinées en français. Il y a aussi des livres, des romans de littératures. Kostas n'a pas pris de risque. Il ne sait pas quels sont mes genres préférés. Le contraire aurait été inquiétant.

Je trouve aussi du matériel de dessin et un carnet de coloriage thérapeutique avec tout le matériel nécessaire. Dans un carton bleu, je vois une Nintendo Switch avec des boites de jeux. Il y a un petit mot écrit à l'ordinateur : « Console sans Internet et connexion réseau ». Evidemment, Kostas ne laisse aucun détail derrière lui.

Je trouve aussi des jeux de sociétés pour jouer seul. Je pousse un grognement en voyant cela. Je ne sais pas si ça va suffire. J'aimerais sortir, voir le monde, oublier ce que Simon m'a fait.

En me retournant, je vois que la porte menant au garage est entre ouverte. Je la pousse, allume la lumière puis je vois une porte avec écrit laverie. Un fil à linge pend au-dessus de ma tête. Je sais au moins que je peux laver mes vêtements sales ici. Je fais coulisser le battant pour vérifier. Il y a une machine à laver avec un sac à linge. A l'intérieur se trouve les vêtements de Kostas. Je reconnais son odeur.

Je détourne le regard puis je retourne dans le salon. Je ne sais pas comment je dois accueillir tous ces cartons. Fait-il ça pour que je sois reconnaissante ? Espère-t-il peut-être m'avoir plus facilement dans son lit ?

Je n'en sais rien. Il faut que j'arrête de me poser toujours des questions. Pour la peine, je range tout dans une partie du dressing. Je n'aime pas le bazar, cela m'irrite au plus haut point. Je suis contente de ne pas vivre dans une porcherie et que la villa soit propre et rangée.

Une fois la chose faite, je décide de m'attaquer à la télé. Je n'ai rien à faire de toute façon. Le problème c'est que la notice est écrite en grec et en d'autres langues que je ne parle pas. Je la laisse où elle est, Kostas se débrouillera.

Malheureusement pour lui, je préfère travailler sur mon livre d'école. Avoir un objectif et une vue sur mon avenir me permet de ne pas péter les plombs. Si je ne garde pas l'espoir d'être libre alors je passerais toute la journée à essayer de me suicider.

Il faut que je fasse travailler mon cerveau, que je me construise un avenir. Contrairement à Simon, je n'attends pas que les choses se passent, je me bats pour ce que je veux. HEC je l'ai fait pour mon père mais aussi pour moi. J'ai envie d'accomplir quelque chose d'important de ma vie.

Je n'ai toujours pas rangé ma valise. Je n'ose pas. C'est comme m'avouer vaincue. D'un autre côté, elle est au milieu du dressing et j'ai de la chance que Kostas ne soit pas un homme colérique. Il aurait pu la pousser et la casser.

Je n'arrive pas à cerner cet homme. Il n'est pas du tout comme je m'attendais. Outre le fait qu'il ne soit pas aussi vieux que ce que je pensais, il n'est pas un monstre. Il n'est pas Simon. En matière d'homme je n'ai que deux modèles : mon demi-frère et mon père.

Mon père est un homme gentil avec sa famille. Il est droit et juste, il ne fait pas les choses à moitié. Pendant mon stage, j'ai bien vu que les gens du bureau était heureux sous sa direction. Bien sûr, il y a toujours du stress mais il avait agrandi les locaux en mettant une salle de sport et une salle de jeux pour les employés.

Simon quant à lui est colérique, il ne sait pas contrôler ses émotions. Face à notre père, il baissait toujours la tête et je suis certaine que ça ne lui convenait pas. Mon demi-frère aime dominer les autres, les écraser, les rabaisser. Une fois, il a tenu tête à papa, il s'est fait gifler et traité de « pauvre idiot ». Mais il n'y a pas que ça. Simon est imprévisible, il a un fond extrêmement mauvais. Il possède un regard d'hypocrite et méchant. Je ne me fais plus avoir par son visage depuis longtemps.

Ce sont les hommes que je connais le mieux, ceux de ma famille. J'ai eu beaucoup de demandes, des hommes étaient intéressés mais pas moi. En fait, je crois que j'avais peur de donner à Simon une raison supplémentaire de me faire du mal si j'avais un petit ami. Il aurait été capable de me faire rompre avec lui en utilisant les pires manières possibles.

Je vais chercher mes livres de travail puis je reviens sur le canapé. Penser à cela me fait mal au cœur. J'ai fait beaucoup de choses pour me protéger de Simon, beaucoup de sacrifices. Il vaut mieux que je fasse comme si je n'avais pas vécu en fonction de mon parasite de frère.

***

Je crois que je me suis endormie le nez dans mes livres. Quand je me réveille, je suis allongée sur le canapé. J'entends une porte claquée et je sursaute.

Kostas s'approche de moi. Il est en tenue de sport, tout transpirant. Il est peut-être parti courir ou faire du sport.

- Comment tu te sens ? demande-t-il de sa voix toujours aussi froide.

- Je suis fatiguée, je réponds.

- Je crois surtout que tu n'es pas bien, c'est normal.

Il pose près de moi une trousse médicale. Ensuite, il s'assoit près de moi mais laisse tout de même un espace respectable entre nous. Il ouvre l'objet pour en sortir du désinfectant, des compresses et un nouveau bandage.

Kostas me fait signe de la main et je lui donne mon bras. Il retire le tissu puis enlève les compresses. Cela ressemble à une énorme griffure mais elle n'est pas aussi profonde que ce que je pensais.

Il me passe ensuite du désinfectant sur le bras puis me refait un nouveau pansement. Je sais que dire merci ne va pas me tuer mais c'est sa faute si j'en suis arrivée là. La moindre des choses est qu'il fasse en sorte que je guérisse.

- Je vais me doucher, dit-il en se levant.

Il s'apprête à partir mais se retourne une dernière fois.

- Je vais te préparer quelque chose pour te détendre. Même si tu ne le sens pas moi je sens toute la tension qui t'habite.

- De quoi s'agit-il ? je demande en fronçant les sourcils.

- Tu verras bien, répond-il en lâchant un demi sourire énigmatique. 

Une divine tortureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant