Avril (2)

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ET CE N'EST QUE LE DÉBUT

Mercredi 12 avril

À travers la fenêtre de l'habitacle, une clinique se dessina devant moi, elle paraissait grande.

Sa simple vision provoqua une vague s'échouant en moi, désagréable sensation qui m'occasionna des frissons dans l'intégralité de mon être.

Ma respiration silencieuse, habituée à ce qu'elle ne fasse aucun bruit, demeurait anormalement bruyante. Détail subtil que remarqua mon père, le visage concentré sur le parking sur lequel la voiture venait de s'engager. Ses lèvres formèrent des mouvements, traduisant des mots, je ne les entendis pas. Mes oreilles avaient eu pour habitude de se fermer.

Grâce à elle, je pouvais me couper du monde.

Sur les paroles rassurantes de mon père, qui frotta sa main dans mon dos, nous marchâmes vers le bâtiment. Mes pas se voulaient lents, mon corps traîné jusqu'à l'accueil de la clinique où pour la première fois, j'allais passer une radio. Cet examen qu'avait évoqué cette docteure.

Les lumières artificielles enfermées dans des néons abîmèrent mes yeux secs, les larmes de la nuit dernière avaient eu le temps de sécher.

La fatigue fut mon excuse quand une infirmière me questionna sur mon teint pâle.

La salle d'attente était plus loin, de nombreux couloirs nous séparaient de l'accueil où une plante verte était disposée dans un coin. Nombreuses furent les chaises qui accueillaient des gens ordinaires devenus patients au moment où ils avaient franchi les portes coulissantes de la clinique.

Les noms défilèrent dans l'air, des personnes se levaient, partaient avec une infirmière et revenaient jusqu'à ce qu'on leur délivre une enveloppe qui les faisait redevenir des gens ordinaires.

Mon tour arriva, comme les autres, j'empruntai un chemin avec une infirmière et—

Je n'eus aucun souvenir de cette radio. Le temps passé sur cette chaise dans l'intention de recevoir une enveloppe fut le seul à être resté dans ma mémoire.

La matinée s'était écoulée lorsque nous revînmes des gens ordinaires, mon père assis derrière le volant et moi tenant cette grande enveloppe blanche.

Je la regardai avec attention tenue entre mes petites mains, la tête baissée où mes lunettes pilotes tombaient sur la petite bosse de mon nez.

À force de tenir le papier, mes mains devinrent moites.

De nouveaux frissons se répandirent au moment où mes doigts décachetèrent avec maladresse le haut de l'enveloppe pour en sortir le contenu. Deux documents étaient posés sur la face de l'enveloppe. Je reconnus aisément celui qui abordait la radio. L'autre était une feuille A4 titré « Compte rendu de l'examen ». Je ne voulus pas le lire, mes yeux ne restèrent attirés que par cette radio affichant mon corps sous rayon X.

Délicatement, je la récupérai et l'observai.

Il s'écoula plusieurs secondes semblable à des minutes avant que mes yeux ne révèlent l'horreur, se trouvant face à ma vision impuissante et submergée par le choc.

Mon corps était à nouveau sans vie, l'âme s'était enfuie, loin. Mes lèvres s'ouvrirent avant que l'humidité ne chatouille mes iris.

Elle était là, présente, devant moi.

Je la distinguais parfaitement.

Ce S que formait ma colonne vertébrale, un début de S illustrant l'hypothèse de cette docteure.

SCOLIO'MEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant