Décembre

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PÈRE NOËL, APPORTE MOI UN CADEAU

Mercredi 6 décembre

La clinique dans laquelle s'étaient déroulés mes deux derniers examens médicaux se dessina devant mon père et moi. Nos pas se coordonnèrent, les mains tremblantes, j'avais refusé de prendre la sienne. Même si ce genre d'examen était devenu une habitude, l'appréhension m'accompagnait à chaque fois. Le trajet pour sortir de ce grand parking se fit dans le silence, jusqu'à ce que mon père ne le brise.

— Comment va se passer ton examen ? C'est la même radio que la précédente ?

— Oui, soufflai-je pour répondre à sa deuxième question. « L'autre », surnommai-je avec des guillemets en parlant du spécialiste, appellation que mon père releva, désespéré par le fait que je ne changerai pas d'avis sur ce médecin. À chaque fin de rendez-vous, il me prescrit une nouvelle radio. Selon lui, c'est pour voir mon évolution et envisager de futures solutions pour atténuer la scoliose.

Il hocha la tête, satisfait de ma réponse.

— Par contre, Rose, on a en a déjà parlé, les portes automatiques s'ouvrirent et nous pénétrâmes sur le hall d'accueil de l'établissement, je sais que tu n'apprécies pas ton médecin, mais ce n'est pas une raison pour l'appeler de la sorte, me rappela-t-il d'un ton moralisant.

Nous avançâmes jusqu'au service exigé sur mon ordonnance, passant le couloir.

— J'aurai du respect pour lui quand il me récitera la définition exacte du mot diplomatie, rechignai-je avant d'accélérer le pas, vexée qu'il ne prenne pas ma défense.

Il me rejoignit quelques instants plus tard, sa main posée sur mon épaule.

— Je suis désolé ma chérie, je sais à quel point c'est difficile pour toi, chuchota-t-il afin d'éviter l'attention des plus curieuses de la salle d'attente dans laquelle nous nous étions assis. Je lui acquittai d'un simple « ça va » coupant toutes discussions sur le sujet.

Il pensait vraiment comprendre à quel point c'était difficile, mais il ne voyait que le sommet de l'iceberg. Il ne constatait pas mes pleurs à cause de la douleur que le corset me provoquait en fonction des mouvements que je faisais. Il ne connaissait pas mes pensées à mon arrivée dans l'enceinte du collège en voyant le regard de certains élèves. Il ne savait pas la haine que j'éprouvais envers moi-même. Il n'endurait pas les douleurs causées par ces points d'appui lorsque je restais assise à écouter un cours. Où bien souvent la douleur me distrayait. Il ne subissait pas les maux de ventre provoqués par ma nouvelle amie, l'anxiété me replongeant dans de sombres pensées. Il ne voyait pas mes mains rouges à force de les maltraiter à chaque attente pour revoir ce spécialiste. Il n'entendait pas mon cœur constamment affolé à la moindre action se déroulant à côté de moi. Tout cela m'avait créé une hypervigilance.

Alors non papa, tu ne pouvais pas savoir ce que je vivais.

— Bonjour, Mademoiselle Sorena, s'il vous plaît.

Une infirmière arriva, me coupant dans mes pensées. En relevant la tête de mes genoux où il y a encore un an étaient couverts de bleu. Ils ne l'étaient plus, je faisais attention à ne plus me cogner partout. Mon corps avait tellement été affaibli par les jours que je me cognais partout, insensible à la douleur.

« Ce n'est pas en continuant à alimenter le passé que l'on peut créer le futur. »

La phrase de ma psychologue me revint.

Lors d'une de nos nombreuses séances, nous avions évoqué les flashs que je subissais sur l'année précédente.

Je restais coincée dans cette bulle, l'aiguille pour la percer n'était pas encore apparue.

SCOLIO'MEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant