Ce dimanche, j'étais censée voir ma famille, mais j'ai appelé ma mère pour lui dire que je ne me sentais pas en forme. J'ai prétexté que j'avais plein de boulot en retard, et qu'exceptionnellement, je ne pourrais pas me joindre à eux.
Elle s'est montrée un peu curieuse, mais, n'a pas trop insisté. Elle sait que je n'aime pas m'épancher sur mes problèmes, j'ai toujours été un peu pudique avec mes parents, même s'ils le déplorent sûrement.
Mais je n'ai pas envie de faire l'effort de cacher ma marque et de cacher mon mal-être dû à son absence. Absence totale puisque je n'ai absolument aucune nouvelle.
Je tombe directement sur sa messagerie maintenant, et le répondeur est saturé de mes messages qui traduisent tous les états d'âme par lesquels je suis passée depuis vendredi.
Ce lundi, je suis décidée à rencontrer Enzo. J'ai retrouvé sa trace, il bosse en ville dans un magasin de musique. Je vais y aller ce midi.
J'ai rédigé, hier soir, une lettre que j'ai laissé en évidence sur le bureau de mon appartement, au cas où je m'absente suffisamment longtemps pour que mes proches s'inquiètent, et décident de chercher un élément qui leur indiquerait une raison pour laquelle j'ai disparu.
Mes parents et Calvin ont les clés de mon domicile. Cette lettre résume tout, Sandro, surtout. Je ne détaille pas l'histoire avec les vampires, mais j'explique que mon compagnon subit une pression par un maître chanteur depuis des années, et que je dois l'aider. Qu'il ne faut pas nous chercher, que nous parviendrons à sortir de cette situation, ensemble, même s'il nous faudra du temps.
Je pense que mon père ne tiendra absolument pas compte du fait que je demande de ne surtout pas intervenir... Mais j'ai un infime espoir qu'il me fasse confiance, au moins dans un premier temps.
Je me trouve devant le magasin d'Enzo, j'entre et me faufile dans les rayons à la recherche de l'intéressé.
Elle est cool, sa boutique. Il y a des instruments partout, des vieux tourne-disques et de belles collections de vinyles. Je le vois au fond avec un autre gars, certainement son associé ou un employé. Je me dirige vers lui pour l'aborder.
"Bonjour, Enzo. Je ne sais pas si tu te souviens de moi, je suis...
- Louisa Dern, hé bonjour ! Bien sûr que je me souviens de toi, tu es la compagne de Sandro."
Oh, alors celle-là je ne m'y attendais pas. Bon, et bien c'est inutile de mentir.
"Euh, en effet. Excuse-moi de te déranger mais j'aimerais pouvoir m'entretenir avec toi quelques minutes, si c'est possible.
- Ah oui ? Ok. Je finis avec mon collègue et je suis à toi dans un instant. Tu peux m'attendre dans l'arrière boutique, là-bas. Sers-toi un café, il est tout frais, j'arrive."
Toujours aussi tchatcheur... Il a l'air d'avoir réussi à se constituer une petite vie sympa et saine. Il est marqué depuis longtemps, je le sens. Je me demande à quoi ressemble sa compagne, et si elle a assez d'aplomb pour gérer cet ancien coureur de jupons...
Je m'installe avec un café comme suggéré, puis, il arrive.« Alors, Loui-sa-Dern, qu'est-ce que je peux faire pour toi ?
- ...Avant tout, j'espère que tu vas bien ? Je suis épatée par ta boutique qui est vraiment chouette, je passerai plus souvent, à l'occasion.
- Merci, oui tout va bien pour moi. Allez, tu n'es pas obligée de passer par toute cette politesse déguisée, je vois bien que tu es tracassée. C'est Sandro, j'imagine ?
- Eh bien... à toi, on ne peut rien te cacher. Oui, c'est à son sujet...
- Il s'est enfin décidé à te marquer, je vois. Il était temps...
- Oui... Tu sais depuis longtemps qu'on est compagnons ? » Je suis vraiment surprise qu'il le sache...
« Depuis le lycée. Je voyais bien que tu avais cet effet sur lui. Le lien.
Il ne l'a jamais avoué à personne, et personne ne s'en doutait, sauf moi. Je connais Lisandro depuis l'enfance, on était comme des frères. C'est facile pour moi, de voir en lui.Je n'ai jamais compris pourquoi il ne voulait pas affirmer ni accepter votre lien. Il ne voulait même pas en parler.
D'ailleurs, je savais qu'il avait des ennuis, j'ai très souvent essayé de lui sortir les vers du nez. Mais il n'a jamais rien dit, et je ne voulais pas le forcer.- Justement... En effet, il est arrivé quelque chose dans sa famille quand il était assez jeune, et depuis, il est... coincé dans une situation très difficile et sans issue...
Je cherche un moyen de l'aider.
- Eh bien, bon courage. Sandro ne dit rien et refuse toute aide qu'on lui propose. Il a fini par carrément disparaître... J'ai été très déçu qu'il ait préféré s'éloigner de nous... et de moi, surtout. Plutôt que de nous dire ce qu'il se passe et qu'on puisse essayer de faire quelque chose pour lui.
- Il a voulu que je m'éloigne de lui aussi. Il ne m'a accepté pour compagne que très récemment, et je lui ai clairement forcé la main. Il s'est isolé de tout le monde... pour protéger son entourage.
Il est piégé, Enzo, et je vais tout faire pour le sortir de là maintenant que je le sais. Mais quelqu'un d'autre doit être au courant, et je pense que tu es la bonne personne.
Quelqu'un de puissant le fait chanter... cette personne s'en était pris à sa mère, et menaçait son père. Sandro a pris la décision de se charger d'une sorte de sanction à la place de son père et depuis, il est comme... pris en otage, à vie...
- Quoi ? Mais, qui ça ? Qui le fait chanter ?
- Je ne peux rien te dire, je ne connais les details de sa vie que depuis quelques jours... » Je ne peux pas lui en dire plus, je ne veux pas le mettre en danger.
Il est pensif, puis il dit finalement :
"Davina... Je savais que c'était bizarre, cette histoire de maladie. Et son père a été traumatisé par sa perte, c'est une évidence, mais je suspectais qu'il y avait autre chose.
Après la mort de sa mère, Sandro est devenu distant et froid. Puis, quand on était en terminale, il a disparu du jour au lendemain.
Je suis allé chez lui plusieurs fois, soit il n'était pas là, soit il prétextait qu'il était occupé, qu'il travaillait beaucoup et n'avait plus le temps de sortir... j'ai fini par comprendre qu'il m'évitait, et j'ai fini par me décourager. Ça m'a fatigué d'insister inutilement.Un jour, je l'ai aperçu sous forme de loup, il a parcouru les bois et quitté la meute. Par curiosité, je l'ai suivi, de loin. Je voulais comprendre pourquoi il m'avait lâché comme ça...
Il est allé jusqu'à Corden, et je l'ai vu disparaître dans une vieille bouche de métro désaffectée... J'ai fait demi-tour à partir de là.
J'ai supposé qu'il était emmêlé dans des affaires louches. Je me suis dit qu'il avait mal tourné, que je ne pouvais plus rien n'y faire. Mais... c'est vrai que ça ne lui ressemble pas.
Avant, il était drôle, il parlait avec tout le monde sans difficulté, il était apprécié et il sortait tout le temps.
On a appris à jouer de la guitare ensemble, on pouvait jouer pendant des heures le soir, on se faisait engueuler par les parents... Bref, je reste un peu déçu de l'avoir perdu, mais si je peux faire quelque chose, aujourd'hui, je le ferai.
Comment comptes-tu l'aider ?
- Je ne sais pas encore... Mais ce que j'aimerai, c'est que tu protèges son père, si jamais James s'en prend à lui. »
J'explique à Enzo tout ce que Sandro a fait pour que son père arrive à vivre le plus sereinement possible depuis le drame. Je parle aussi du fait que James le suspecte d'activités illégales et veut le confronter.
Angelo peut se retrouver seul et avoir besoin qu'on veille sur lui si Sandro doit se faire incarcérer, ou si un jour, il est retenu définitivement par Valentino...
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Destins liés, 1. Rejetée
ParanormalLouisa aurait pu s'estimer chanceuse de rencontrer son compagnon avant l'heure, mais malheureusement, lui n'est pas décidé à accepter leur lien. Le rejet la hantera malgré le temps et sa détermination à se relever. Car en effet, il a certes préféré...