Chapitre 30

48 9 51
                                    

Patte de Tige fit volte-face et s'élança vers Souffle de Cerise. Elle sauta du promontoire pour atterrir sur le dos du félin blanc qui avait attaqué la femelle. La guerrière enfonça profondément ses griffes dans les épaules du Refusé, puis se pencha sur le côté pour l'entraîner dans sa chute. Ils se débattirent un moment, le museau dans la terre, roulant au sol. Puis Patte de Tige se releva et utilisa ses griffes pour tracer une profonde ligne droite dans son poitrail.

Le Refusé s'effondra en se repliant sur lui-même. De la bile remonta dans la gorge de la brune claire.

— Toison Blanche !, s'écria une ennemie derrière.

Celle-ci se précipita vers le corps et le redressa, les larmes aux yeux. Patte de Tige se détourna de la scène et attrapa Souffle de Cerise par les pattes. Elle la traîna jusqu'à un coin isolé du campement des Refusés, près d'une petite sortie.

— J'ai mal, croassa la blessée.

La guerrière avait la gorge ouverte, laissant couler un flot continu de sang. Patte de Tige l'étendit au sol un instant.

— Écoute-moi bien, indiqua-t-elle, les lèvres tremblantes. Je vais t'emmener près d'un guérisseur, ils attendent sûrement les blessés à l'extérieur du camp. On va te sauver, ne t'inquiète pas.

Elle étudia la plaie en essayant de refouler son angoisse.

— Ta blessure n'est pas profonde, tu peux t'en sortir.

— Patte de Tige, balbutia Souffle de Cerise dans un gargouillis.

Elle se toucha maladroitement la gorge de la patte, et celle-ci se teinta immédiatement de rouge.

— Je vais pas survivre.

Patte de Tige lui assura.

— Si on t'a égorgée et que tu es toujours en vie, c'est que ce n'est pas une blessure mortelle. Ne te laisse pas happer par le sommeil et tout ira bien.

— Non, tout n'ira pas bien, rétorqua la femelle blanche tigrée les larmes lui montant aux yeux. Je vais abandonner mon fils alors que je suis sa seule famille.

L'autre lui caressa affectueusement le front. Elle repensa à tous ces après-midis qu'elle avait passés, apprentie, à s'occuper de Souffle de Cerise et de son frère Truffe Dorée. Elle prendrait soin de sa cousine jusqu'au bout.

— Allez, dis pas n'importe quoi. Ce soir, Nuage Feuillu retrouvera sa mère comme c'était prévu.

Souffle de Cerise articula avec difficulté, ses yeux bleus se fermant de plus en plus souvent.

— Écoute, il faut que je te dise un truc, avant de partir...

— Chhhh...

Patte de Tige la releva en l'attrapant de nouveau sous les épaules. Elle la hissa sur son dos, et emprunta la petite sortie sur sa droite.

— On y va doucement. Ne t'arrête pas de parler, conseilla-t-elle.

Tant que Souffle de Cerise avait la force de dire quelque chose, elle aurait la force de vivre.

— Te rappelles-tu, lorsque j'étais chaton, de la fois où tu m'avais empoisonnée en voulant me soigner ?, souffla la blessée. Ce n'était pas toi, en vérité.

Patte de Tige évita une racine en commençant à grimper une petite pente. Où les soigneurs se trouvaient-ils donc ? Ils devaient normalement être positionnés tout autour du campement.

— Les baies que tu m'avais données avait fait effet correctement. Mais quelques levers de soleil après, mon mal de ventre est revenu. Et je suis allée moi-même récupérer les remèdes pour me soigner.

Les Racines du Saule ~5. Le Saule~Où les histoires vivent. Découvrez maintenant