Chapitre 2 : Réturis. ✔

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— Elle se réveille !

J'ouvre lentement les paupières, cligne des yeux plusieurs fois de suite pour chasser les larmes qui me brouillent la vue. Puis tout me revient. Tessia, mes parents, la maison, et ce mystérieux garçon qui m'a sauvé la vie. Ainsi que la chute. Pourtant, je ne suis toujours pas morte. J'ai dû perdre connaissance quand il a sauté de l'arbre.

Je regarde autour de moi et constate que je suis allongée dans une ruelle déserte, pas très loin de chez mon domicile, où j'avais l'habitude de passer à pied en rentrant du collège. Je me redresse et m'adosse au mur, n'ayant pas la force de me mettre debout. Je relève la tête et observe la fille que je n'ai toujours pas eu l'occasion de voir. Elle s'approche, puis s'agenouille pour me faire face. Ses yeux rouges me scrutent minutieusement. Génial. Après avoir passé une journée au parc à croiser le regard étrangement doré des gens, après avoir couru jusque chez moi pour y découvrir les corps sans vie de mes parents, voilà que je vois des yeux rouges ! Mon cas ne s'arrange pas. Je soupire et pose ma tête contre le mur. Je ferme les paupières pour me calmer, sentant mon cœur battre à nouveau de plus en plus vite. Je me force à prendre une profonde inspiration et à expirer calmement. Puis je rouvre les yeux et constate — avec un mécontentement non dissimulé — que cette fille me fixe toujours de son regard couleur sang.

— Comment te sens-tu ? me demande-t-elle, une réelle inquiétude perceptible dans le ton de sa voix.

Je ne sais pas quoi répondre. Alors je hoche la tête pour lui signifier que j'ai bien entendu, sans toutefois trouver quelque chose à lui dire. Elle me décoche un petit sourire et repousse ses longs cheveux noirs de jais qui lui cachent le visage. Des taches de rousseur parsèment son joli minois, mettant en valeur son petit nez retroussé. Ses lèvres fines, qui s'accordent à merveille avec la finesse de son visage, lui donnent une allure des plus ravageuses. Elle tourne la tête sur sa droite, et je ne tarde pas à en faire de même. Celui qui m'a sauvé des flammes est ici, assis sur le rebord d'un muret qui s'effrite. Je reconnais ses cheveux blonds en bataille. Il croise les bras et me regarde d'un œil sévère, la bouche figée sur un sourire moqueur. Lui aussi a les yeux rouges. Il tourne son visage vers la fille agenouillée en face de moi, et comme une réponse à une question muette, il prend la parole et lui répond :

— Oui, elle va bien et n'a rien de cassé. C'est son moral qui en a pris un coup. Tu devrais peut-être lui expliquer la raison de la couleur de nos yeux, parce que plus ça va, plus elle s'affole.

— C'est à toi de lui expliquer, pas à moi, répond la fille. Après tout, c'est ton rôle !

Je les entends débattre sur je ne sais quel sujet et tourne la tête pour ne plus les voir. Je ne comprends rien à ce qu'il se passe. Je suis perdue.

— Bon, puisque tu t'obstines à ne pas parler, c'est moi qui le ferai ! s'énerve la fille.

Elle se lève et me tend ses mains pour m'aider à en faire de même. Je les saisis. Deux secondes plus tard, me voilà debout, les jambes flageolantes, comme si elles allaient céder d'une minute à l'autre. J'époussette mon legging noir et constate par la même occasion que mon tee-shirt est déchiré. Génial. Puisque ma maison vient de brûler, c'était le seul vêtement qu'il me restait. Et le voilà foutu. Je suis consciente de m'inquiéter pour de simples affaires, mais au point où j'en suis, pleurer pour des vêtements me paraît tout à fait légitime. Non ? Mais avant que je ne puisse m'en donner le droit, la jeune femme se racle la gorge. Je comprends qu'elle s'apprête à me donner un semblant d'explication, alors je décide de remettre ma séance de pleurnicherie à plus tard.

— Par où commencer... peut-être les présentations ? Ce sera plus simple. Moi, c'est Apolline ! dit-elle, en me décochant un nouveau sourire.

Elle se tourne vers le garçon assis sur le muret, attendant sûrement qu'il fasse de même, mais celui-ci ne bronche pas. Il ne prononce pas le moindre mot. Il se contente de rester les bras croisés, parfaitement stoïque, et de me dévisager de ses grands yeux rouges. Agacée, Apolline fait volte-face et soupire :

Surnaturels Tome 1 : Mystères. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant