Chapitre 51 : Ultimatum impossible. ✔

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Cela fait des jours, des semaines, des mois que je n'ai pas revu Tessia. Je peine à croire qu'elle est là, sous mes yeux. J'aimerais tellement pouvoir la serrer dans mes bras. Mais pour le moment, vu la situation, c'est tout bonnement impossible. Ce que je trouve étrange, c'est qu'il n'y ait plus de serpents aquatiques aux alentours. Plus personne ne nous surveille... Est-ce qu'on me sous-estimerait ? Tant mieux. Je sais que je suis capable de me libérer, je l'ai déjà fait lorsque j'étais prisonnière à l'Isolement. J'avais pu casser les barreaux de ma cellule et celle d'Isaac, puis j'avais brisé ses chaînes. Je suis donc capable d'en faire de même avec celles qui nous retiennent, ma sœur et moi. Mais je dois me dépêcher, le sang d'unisus ne va pas faire effet encore très longtemps.

Je tire sur mes chaînes. Sans résultat. Les yeux bleus de Tessia s'agrandissent. Elle ne sait pas ce que j'ai appris sur moi dernièrement. Elle ne sait pas que je suis la Gémone. Je comprends qu'elle panique, elle ne sait pas de quoi je suis capable. Même si je ne connais pas toutes mes capacités, je suis au moins sûre d'une chose : briser ses chaînes, c'est dans mes cordes. Je ferme les yeux pour me concentrer et oublier la personne en face de moi – que j'ai pourtant tellement envie de serrer dans mes bras. J'essaie de m'imprégner de ma condition de Gémone. À mes pouvoirs qui coulent et qui palpitent en moi. À ce qui se passera si je n'arrive pas à briser ces chaînes. On mourra noyées.

Mais j'ai le pouvoir d'empêcher cela. Je tire. Encore. Et encore. Je m'acharne, mettant de plus en plus de puissance dans chacun de mes gestes. Lorsqu'un petit déclic se fait entendre, je rouvre les yeux et tire une dernière fois d'un coup sec. Les chaînes s'arrachent enfin du sol mouillé. Je les brise en deux afin de m'en débarrasser une bonne fois pour toutes. Je suis libre.

Je suis étonnée par la rapidité avec laquelle je me suis dépêtrée de cette situation. Plus je me concentre sur mon pouvoir, plus je l'utilise, et plus il devient fort. Je nage jusqu'à Tessia et ne fais qu'une bouchée des chaînes qui, il y a de cela encore quelques secondes, la retenait prisonnière. Je les broie littéralement entre mes mains, avant de tendre ces dernières à ma petite sœur. Mille et une émotions traversent son beau regard bleu. Je l'entraîne avec moi jusqu'à l'air libre, ma main dans la sienne, réalisant combien un simple contact physique entre sœurs peut être précieux.

À en juger par la vitesse à laquelle nous nous rapprochons de la surface, je comprends que même sous l'eau, je peux profiter de ma rapidité de Gémone. Je jette toutefois des regards furtifs autour de nous, pour être sûre que les serpents ne sont pas de retour. Pour le moment, rien à déclarer. La voie est libre, et j'en profite pour combler les quelques mètres qui nous séparent de la berge. Nous sortons toutes les deux la tête hors de l'eau, puis je l'aide à se hisser sur la terre sèche.

Après en avoir fait de même, je lève les yeux sur Tessia. J'ai l'impression qu'elle a grandi. Ses cheveux blonds — qu'elle coupe normalement jusqu'à ses épaules — sont un peu plus longs que d'habitude. Elle semble épuisée. Ses vêtements sont troués. Mais elle est en vie. Au moment où j'esquisse un sourire, Tessia se jette à mon cou. Je la serre de toutes mes forces contre moi. Ce contact vaut tout l'or du monde. Je n'avais jamais pris conscience des liens qui nous unissaient. Je la voyais comme une petite peste, née pour me pourrir la vie. J'ai même rêvé d'être fille unique. Aujourd'hui, je regrette d'avoir pensé de telles choses.

— Vraiment navré d'interrompre de si belles et émouvantes retrouvailles, mais il est temps de regarder ce qui se passe autour de vous ! Ma patience a des limites.

Tessia met fin à notre étreinte, tandis que je me fige. Je reconnais cette voix. J'écarte ma sœur et tourne lentement ma tête vers l'homme venant de parler. Intérieurement, je me dis que ça ne peut pas être lui. J'essaie de me convaincre que ce n'est pas possible. Mais lorsque je l'aperçois, j'en ai le souffle coupé.

Surnaturels Tome 1 : Mystères. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant