Chapitre 18 : L'Isolement. ✔

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Je hurle de terreur. Je ne suis retenue que par les bras. Mes jambes se balancent dans le vide. Ces léldriques de malheur et leurs pinces me font un mal de chien ! Je devrais m'estimer heureuse qu'ils ne se décident pas à me lâcher en plein vol, mais ma destination me pétrifie d'angoisse. L'Imposant. J'espère seulement que la Démone va tenir sa promesse. Qu'elle relâche Tessia, saine et sauve. Histoire que mon sacrifice ne soit pas vain. Je me doutais que tout ne se passerait pas comme prévu. J'ai essayé de prévenir les Surnaturels lorsque j'ai aperçu ses monstres ailés au loin. J'ai essayé de crier pour capter leur attention, seulement, Edden et Angie étaient bien trop occupés à se battre. Quant aux autres, ils vérifiaient la zone. Le problème, c'est qu'aucun n'a pensé à vérifier juste au-dessus de nos têtes. Qu'est-ce qui a pris à Edden et Angie de s'adonner à cette bagarre ridicule ? Je pensais que les Surnaturels étaient soudés, et non qu'il puisse y avoir de telles tensions au sein du groupe.

J'aimerais m'attarder plus longtemps dans mes pensées afin de comprendre pourquoi ils en sont venus aux mains, mais la vision d'un imposant château me coupe de toute réflexion. Plus sa forme se rapproche, et plus je lui trouve de grandes similitudes avec le Majestueux. Avant de réaliser que ce sont exactement les mêmes, à quelques détails près. Contrairement au Majestueux, l'Imposant est entièrement noir. Sa façade, son toit, ses fenêtres teintées, et même son parterre de fleurs. Des roses noires sont plantées tout autour du château et forment une grande allée jusqu'à la porte d'entrée. Pour ce qui est des buissons, ils n'ont pas de feuillages. Je ne vois que de petites branches complètement décharnées. Je dresse l'oreille. Aucun bruit ne me parvient. Ce territoire est complètement dépeuplé. Et hostile. Tu m'étonnes que personne ne veuille s'y rendre ! Même les oiseaux n'ont pas l'air de trouver ce paysage à leur goût. Je n'en vois aucun à l'horizon. Les léldriques me lâchent enfin au sol, et j'atterris dans un bruit sourd. Ils ont au moins eu l'intelligence de se rapprocher de la terre ferme.

Je me relève, dans l'attente que quelqu'un vienne me chercher. Mais il n'y a personne. Je pourrais m'enfuir... Mais alors, que deviendrait Tessia ? Il est hors de question que je la laisse toute seule dans cette copie glauque du Majestueux. Je n'ai pas fait tout ça pour rien ! Un mouvement furtif attire mon attention sur la gauche. Je constate que les léldriques repartent en direction de la Marque. Je suis désormais seule. Si je le voulais, je pourrais vraiment m'enfuir. Je ne comprends pas pourquoi la Démone aurait ordonné à ses monstres de m'amener ici, pour au final me laisser une belle occasion de m'en aller. Je ne partirai pas d'ici sans ma sœur. C'est donc avec les mains tremblantes et le cœur martelant ma poitrine que je m'avance jusqu'à la grande porte d'entrée noire. Elle est faite de bois, contrairement à celle du véritable Majestueux, faite en béton peint en rouge. La peinture s'écaille par endroits. Je pose avec précaution ma main sur la poignée, m'attendant à tout moment à ce qu'un danger vienne pointer le bout de son nez, mais rien ne vient. Je tire sur le côté pour coulisser la grande porte, mais impossible de l'ouvrir. Je savais qu'il y aurait un piège quelque part. Je donne un grand coup de pied dedans. Celle-ci n'explose pas comme je l'avais fait avec celle de ma sœur. Elle reste imposante, me narguant de toute sa hauteur. Et si j'essayais d'arracher la poignée ? Je respire un bon coup, pose une nouvelle fois mes mains sur cette maudite poignée, et la tire vers moi. Je n'ai pas réussi à l'arracher, mais j'ai réussi à ouvrir la porte. Quelle idiote je suis ! Elle ne se coulisse pas, il suffit de l'ouvrir normalement. Je me suis tellement habituée aux portes à galandage du Majestueux que j'en avais oublié leur ouverture de base. Heureusement que je suis toute seule... sinon, je me serais pétrifiée de honte.

Je pénètre avec précaution dans le hall de l'Imposant. Pour le coup, je peux dire que l'intérieur n'est en rien similaire à celui du Majestueux. Il y a des escaliers partout. Des petits, des moyens, des grands, des larges, des très fins, avec rambardes, sans contremarches... une multitude ! Je n'ai jamais vu autant d'escaliers réunis dans un seul et même endroit. Je jette un coup d'œil sur le sol. C'est du simple marbre noir, très propre. Je peux même y déceler mon reflet. Les murs sont en pierres sombres. Pourquoi le noir doit-il être la couleur des méchants ? C'est quoi, ce cliché stupide ? Cette couleur est l'une de mes préférées. Pour autant, ça ne fait pas de moi une personne mauvaise. J'avance de quelques pas supplémentaires. Comment savoir où se trouve ma sœur ? Quel escalier emprunter ? Je prends le temps d'observer avec attention sur quoi débouchent les marches, constatant qu'une porte se dresse en haut de chaque petit escalier, tandis qu'un long couloir semble trôner à la suite des plus grands. C'est un vrai labyrinthe. J'en reste bouche bée de contemplation. Et toujours personne en vue. Mon instinct me dicte que ce n'est pas normal. Que c'est peut-être un piège, que je devrais rebrousser chemin et ne pas m'aventurer ici toute seule. Mais mon cœur ne semble pas décider à écouter mon instinct. Il semble plutôt du genre à choisir un escalier au hasard pour voir où ça le mène.

Surnaturels Tome 1 : Mystères. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant