Chapitre 21 : Deuxième Souffle. ✔

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— Evalina !

Cette voix... elle m'est étrangement familière. Si familière qu'elle me contraint à desserrer mon emprise. Ma victime peut à nouveau respirer. Ce n'est pas normal. Je ne devrais pas la laisser vivre. Je fronce les sourcils de frustration et reprends où j'en étais pour en finir, quand une seconde voix, plus grave, se fait entendre à travers le hall.

— Ne fais pas ça !

Ne fais pas quoi ? Je veux juste achever ma proie, mais quelque chose au fond de moi me pousse à abandonner. Je la repose au sol et elle s'écroule dans un bruit sourd. J'entends d'ici son sifflement irrégulier, signe qu'elle est toujours en vie. Pourquoi l'ai-je relâchée, alors que mon instinct m'intime de la tuer ? Mes yeux recommencent à me brûler. C'est alors que des bras m'enserrent la taille et me tirent en arrière. Je bute contre quelque chose de dur, mais de doux à la fois. Un corps. Quelqu'un me maintient dans ses bras pour m'empêcher d'atteindre mon but ultime. L'extase finale. Je me débats comme une folle, ignorant cette voix qui murmure à mon oreille de me calmer. Mes sentiments sont contradictoires. Je veux écouter mon instinct. Je me débats de toutes mes forces. Je hurle, j'écrase les pieds de celui qui me retient, je tente de me dégager de ses bras musclés. Peine perdue. Il me tient bien fermement et ne semble pas décider à me laisser partir. Il continue à prononcer des mots à mon oreille, mais je suis bien trop aveuglée par la colère et la frustration pour y prêter attention.

Je continue à me débattre avec le peu de forces qu'il me reste, mais mon corps me fait défaut. Il ne semble plus décider à me suivre. Et cette partie de moi, qui veut entendre ce que mon interlocuteur me dit, prend de plus en plus d'importance. Elle éteint ma rage. Elle calme mes ardeurs. Elle reprend le dessus sur la partie la plus sombre. Celle qui voulait tuer à tout prix. Celle qui prenait Isaac pour sa proie.

Oh mon Dieu. Mais qu'ai-je fait ? Je l'observe étendu sur le sol, les membres brisés et la respiration saccadée. Il n'ose même plus me regarder. Je suis un monstre. Un horrible monstre. J'ai voulu tuer Isaac. Des larmes viennent flouter la vision atroce que j'ai de lui, en train de se tordre de douleur. Je laisse la honte et le soulagement d'être redevenue moi-même m'envahir. Je veux disparaître. Qu'est-ce qui m'a pris ? J'ai réussi à nous sortir de l'Isolement. Je devais aller chercher ma sœur et je me suis finalement retrouvée à vouloir tuer Isaac. Mais le pire, c'est que j'ai aimé ça. J'ai apprécié le voir souffrir. L'entendre gémir de douleur. J'ai adoré ce sentiment de puissance qui s'est emparé de moi, me poussant à torturer Isaac comme bon me semblait. Je suis dégoûtée de moi-même. Je n'ai jamais eu aussi honte de toute ma vie.

— Chut, Evalina. Tout va bien, me murmure cette douce voix grave à l'oreille.

Et cette fois-ci, je la reconnais. Elle n'est pas aussi autoritaire que d'habitude. Plutôt d'une gentillesse surprenante... Je pose mes mains sur les bras qui m'entourent et les retire de ma taille. Je veux lui faire face. M'assurer que c'est bien lui et pas un autre. Que je ne suis plus seule. Je plante timidement mon regard dans le sien. Jamais je n'aurais pensé qu'un jour, ses yeux aigue-marine me manqueraient autant. Ni qu'ils seraient teintés d'une profonde inquiétude. Ses cheveux blonds sont en pagaille, et de multiples éraflures qui n'étaient pas là plus tôt ornent désormais son visage.

— Tu es venu, articulé-je avec peine, la gorge serrée.

— Tu pensais sincèrement que j'allais te laisser toute seule ici ? s'offusque Angie.

Il attrape mon visage de ses mains fermes, comme s'il avait subitement ressenti le besoin de me toucher pour s'assurer de ma réelle présence en face de lui. Je reste figée sur place par son geste. Ses mains sont chaudes. Cela me fait du bien. À l'Isolement, il faisait très froid. Le contact d'Angie réussit à me réchauffer et à me détendre. Il me regarde dans les yeux pendant si longtemps que je me demande ce qu'il peut bien se passer dans sa tête. Je crois qu'il n'arrive juste pas à se faire à l'idée que je sois toujours en vie.

Surnaturels Tome 1 : Mystères. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant