Chapitre 38 - Edaline

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La petite Maeve était à genoux, trop effrayée pour se relever. L'adolescente, elle, restait figée, les yeux écarquillés devant son frère qui, pour le moment, n'avait pas pris vie. Il n'était qu'un pantin sans âme, souvenirs ou émotions.

Mais il va le devenir, songea amèrement Edaline en se remémorant son plan.

Et ça va faire vraiment très mal. Elle va peut-être entrer en Transe. Je ne sais pas. Le fait que Maeve soit si déphasée avec ses émotions pourrait aider, dans le cas présent. Quoique. Elle doit quand même connaître la peur. C'est la moindre des choses, avec une vie comme celle-ci.

L'adulte bloqua sa respiration pour ne pas abandonner si près du but – si son plan fonctionnait, Maeve trouverait probablement le moyen de protéger son esprit, tout comme Hailey si cette dernière repensait à leur duel – et posa sa main sur la tête de Luck, qui ne montra aucun signe d'intérêt pour elle.

— Détruis-la, dit-elle d'une voix dénuée de toute émotion

Le jeune homme fut pris d'un long frisson à mesure qu'il s'animait. La mémoire qu'avait accumulé le vrai Luck rejoignait la marionnette à son image, ainsi que ses sentiments, son attitude et ses tendances... brutales.

Il se releva brusquement, fit rouler ses épaules et craquer ses doigts, puis baissa les yeux sur l'enfant recroquevillée à ses pieds.

— Bonj-jour, bredouilla la petite Maeve en croisant son regard méprisant

Les membres tremblants, elle jetait des regards désespérés à l'adolescente, qui ne les remarquait pas, trop concentrée sur la présence de Luck dans ce havre de sûreté qu'avait toujours été son esprit.

— Bonjour, répondit son frère avec un sourire carnassier

Il empoigna l'épaule de la petite fille, qui se débattit faiblement. Edaline expira enfin et recula d'un pas, camouflant sa présence dans les ombres ambiantes. Elle n'avait plus besoin de faire quoi que ce soit, sauf surveiller la joyeuse réunion de famille qui se déroulait sous ses yeux.

— C'est bizarre, lança tout à coup Luck en secouant la fillette comme s'il s'était agit d'un vulgaire caillou sur son chemin. Tu me paraissais plus grande, la dernière fois. Et tu étais en prison. Non, en fait... tu étais morte.

Ah oui ? Il faudrait penser à vérifier que les cadavres en sont réellement, mon cher.

— Je... mais... en prison ? bégaya l'enfant en se tordant les doigts – une habitude qu'elle avait apparemment gardée à travers les années

— Oui, en prison... mais c'est que j'ai raison. Tu étais bien plus grande. Au moins seize ou dix-sept ans. Peut-être même dix-huit.

Non, seulement quinze. Il y a des limites au désintérêt.

Luck projeta la petite Maeve plusieurs mètres plus loin avant de se retourner vivement, faisant face à l'adolescente, qui recula encore. Lui éclata d'un rire sinistre, ravi de sa découverte.

— Te voilà ! Je me disais bien que tu ne pouvais pas être si minuscule... maintenant, on va pouvait discuter.

— Discuter ? interrogea Maeve dans un souffle, une étincelle d'espoir brillant au fond de ses yeux

— Oui, discuter... acquiesça Luck en se rapprochant insidieusement. Enfin, moi, je n'aime pas trop parler, mais si tu veux, tu peux hurler et me supplier de te laisser en vie.

La jeune fille s'immobilisa, toutes ses défenses abattues par quelques mots. Son frère franchit l'espace qui les séparait en un pas et, sitôt qu'elle fut à portée, lui asséna un violent coup de poing dans les côtes, qui la propulsa en arrière. Elle se releva promptement et, les mains tendues devant elle en gage de paix, tentait de garder suffisamment de distance entre elle et Luck pour garder ses os intacts – mission qui, malheureusement, n'avait jamais été accomplie. 

Killer Queens [VERSION FRANÇAISE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant