La musique du bar me berce et je fixe mon verre de vin presque vide. J'ignore depuis combien de temps je suis ici, je n'ai plus vraiment la notion du temps. J'observe ma bague de fiançailles que je n'ai pas encore retiré. Quel gâchis. Une voix rauque résonne dans le silence qui m'entoure.
— Bonsoir, un whisky s'il vous plaît.
Je me retourne vers le seul client qui vient de me rejoindre. L'hôtel est bien calme ce soir. Une cicatrice sur sa tempe attire mon regard et je suis prise en flagrant délit lorsqu'il se tourne vers moi. Sa voix est rauque avec un accent dont j'ignore la provenance.
— Bonsoir, me dit-il.
— Bonsoir.
Je termine mon verre avant de me lever.
— Ne partez pas, si je vous dérange je peux aller m'asseoir ailleurs.
— Ne vous en faites pas, j'allais partir. Bonne soirée.
Je remercie le serveur avant de retourner dans ma chambre. Je m'affale dans mon lit avec un paquet de gâteaux. Tout ce que j'ai envie de manger pour le moment. Je suis dans le noir et observe la voie lactée sublime, au-dessus de ma tête.
***
J'ai réussi à ne penser à rien et passer une bonne nuit. J'ai dormi presque douze heures. Mon corps avait besoin de repos. J'attrape la télécommande pour ouvrir les rideaux et observe la sublime vue, depuis mon lit, sous mon énorme couette bien chaude. J'imagine le froid qui fait dehors et je n'ai aucunement envie de bouger. Mais il le faut. Je ne suis que l'ombre de moi-même depuis quelques jours. Je vais commencer par faire une séance de sport et j'irais en ville dans l'après-midi.
J'enfile ma tenue de sport avant d'aller prendre mon petit déjeuner. Je n'ai pas d'appétit, mais je n'ai pas le choix. Je demande des œufs brouillés et un café. Je regarde autour de moi, il n'y a qu'un couple avec moi. Avant d'aller à la salle de sport, je passe à l'accueil demander comment je peux me rendre en centre-ville. L'hôtesse d'accueil me réserve un taxi et je peux aller profiter de me défouler un peu. Ça me fera le plus grand bien.
Je me promène dans la rue principale de Reykjavik et j'ai fait quelques courses. Je suis enfin au chaud avec mon bonnet et mes gants. Je me suis également pris de quoi grignoter dans ma chambre et je retourne vers le taxi. Le shopping fait toujours du bien au moral. Une fois de retour dans ma chambre, j'en profite pour déballer mes achats. Mon téléphone sonne au même moment, ma mère qui m'appelle sur WhatsApp.
— Bonjour maman.
— Ma chérie. Comment tu vas ?
— Et vous maman ?
— Ma puce... Il ne mérite pas tes larmes.
— Je sais, dis-je en soupirant. Mais c'est tellement dur maman... Quand je pense que j'ai acheté ma robe de mariage et que lui pendant ce temps, il s'envoyait en l'air sans se soucier de quoi que ce soit.
— Je vais m'occuper d'aller voir la boutique de mariage pour te faire rembourser.
— Et je dois annuler le domaine...
— Envoie-moi le mail, je le ferais pour toi.
— Merci maman.
— Alors l'Islande, comment c'est ?
— Je suis juste sortie rapidement aujourd'hui pour faire des courses, c'est très jolie. Surtout ma cabane. Il fait nuit une bonne partie de la journée, mais c'est sympa.
— Et tu rentres quand ?
— Je n'en sais rien... Je ne reprends pas le travail avant la fin du mois. Je ne suis pas encore prête... Et puis je vais aller où ? Je n'ai rien...
— Tu viendras chez nous ma chérie.
— C'est loin de mon travail. Je dois trouver un petit appartement.
— Je vais regarder les petites annonces, je te tiens au courant.
— Je vais te laisser maman, je vais aller dîner.
— Bonne soirée ma chérie.
Je l'embrasse avant de raccrocher et de rejoindre le bar de l'hôtel. Je m'assieds en disant bonsoir au serveur et commande un verre de vin et quelques petites choses à grignoter en guise de dîner. Je n'ai aucunement envie d'un repas, ce sera largement suffisant.
— Bonsoir. Un whisky s'il vous plaît.
Je me retourne vers cette voix rauque, identique à celle d'hier soir. Il se tourne vers moi et je remarque ses yeux bleus, d'une couleur comme je n'en ai jamais vu. La seule douceur dans son visage un peu rustre, notamment lorsqu'il fronce ses sourcils. Il en est presque intimidant.
— Je vais aller m'asseoir ailleurs, me dit-il.
Pourquoi ? Je ne suis probablement pas de bonne compagnie c'est vrai. J'ignore si j'ai envie d'être seule ou non. Être seule ne m'a avancé à rien depuis trois jours.
— Vous pouvez rester.
Je bois une gorgée de mon verre. Je le sens hésiter avant de tirer le tabouret du bar et de remercier le serveur. Il tapote ses doigts sur la table tout en fixant son verre. Il a l'air aussi perdu que moi. Le son de sa voix résonne subitement, ce qui me fait sursauter.
— Vous êtes ici depuis longtemps ?
— Depuis hier.
— Vous avez déjà visité un peu ?
— Juste la capitale, très rapidement.
Contrairement à son apparence, il a l'air bavard. Je le suis aussi d'habitude et à cause de Matthew, je suis cette carapace vide. Je me rends compte de mon attitude et m'excuse auprès de mon voisin. Je me tourne vers lui.
— Je suis désolée, je ne suis pas de très bonne compagnie.
Il se tourne également vers moi et m'offre un sourire rapide. Je l'observe rapidement. Une peau matte et les traces d'une barbe brune qui commence à pousser. Des cheveux bruns avec des cheveux gris parsemés et pourtant je ne pense pas qu'il soit si âgé que ça. Il a un visage marqué par des rides d'inquiétudes, qu'il efface complètement de son sourire.
— Votre compagnie ne me dérange pas. C'est mieux qu'être seul dans ma chambre.
Il me regarde et je remarque quelque chose dans son regard que je ne reconnais pas. Un autre homme me regarde. Et je me rends compte que Matthew ne me regardait plus du tout. Quand est-ce que son amour a disparu ? Quand a-t-il commencé à me mentir ? Les larmes me montent aux yeux, me faisant oublier où je suis. Je descends de mon tabouret et je m'en vais pour sortir. L'air glacial agit comme un électrochoc. Il m'a trompé. Il ne m'aime plus. Je ne dois plus pleurer pour lui. Mais mes sentiments sont toujours là, malgré la haine que je lui voue depuis.
— Mademoiselle !
Je sursaute en sentant des mains sur mes épaules et l'homme du bar me pose mon manteau sur moi, et me maintient.
— Vous allez attraper la mort à sortir comme ça, dit-il en frottant mes bras.
— Euh... Merci.
J'enfile mes manches et le ferme. Le chagrin m'anesthésie complètement. Je le regarde, qui lui ne porte qu'un simple pull.
— Et vous alors ?
— J'ai l'habitude du froid.
Je lève les yeux au ciel, ce qui le fait sourire. Je prends mon bonnet dans ma poche et l'enfile.
— Merci encore. Et bonne soirée.
— Vous n'avez même pas fini votre verre.
Je hausse les épaules avant de rejoindre ma chambre. Mon besoin de solitude m'isole, mais je n'ai pas vraiment la force de discuter avec du monde pour le moment.
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À l'ombre de ton cœur
RomanceJamie, jeune infirmière part s'isoler dans la nature islandaise suite à une rupture amoureuse douloureuse. Seule face à son chagrin, elle réalise à quel point sa vie s'est écroulé dans les derniers jours. C'était sans compter sur un militaire qui lu...