Chapitre 38 - Une lune rouge sang

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Bonjour bonjour ! 

Et c'est encore la pleine lune ! Eh oui, c'est une fois par mois, après tout... 

Bonne lecture ! 

*

CW : violences physiques

13 juin 1995

Remus Lupin était un idiot. Un idiot dépourvu de tout sens des responsabilités, de toute volonté, et qui se cachait derrière sa prudence pour dissimuler une couardise qui n'avait d'égal que sa capacité à se laisser influencer.

C'était en tout cas ce qu'il pensait en cet instant, le dos collé au béton de la cellule du ministère, attendant désespérément que la nuit estivale tombe enfin pour le couper de sa conscience.

Remus avait convié Sirius aux vacances galloises avec ses amis moldus. Cela faisait deux jours qu'il avait craché le morceau, n'y tenant plus, incapable de se résoudre à trouver une excuse pour le laisser encore tout seul. Et, bien sûr, Sirius avait sauté de joie. Et, bien sûr, Remus avait regretté presque aussitôt.

S'il tentait d'être rationnel, il devait admettre que cette semaine de camping dans le jardin d'une ferme n'était pas beaucoup plus dangereuse que lorsque Sirius avait passé près d'un mois dans son appartement londonien. Seulement voilà, Remus n'était pas rationnel dans ce genre de situations et son anxiété prenait toute la place. Chaque minute depuis qu'il avait annoncé à ses amis qu'il serait accompagné de Sirius, le regret et l'angoisse avaient augmenté, sans cesse. Il pensait à tous les petits détails qui rendaient ce périple dangereux : le fait qu'ils seraient à découvert, par exemple, que Sirius ne pourrait pas se changer en chien en la présence des quatre autres, qu'ils ne pourraient pas se montrer prudents sans éveiller les soupçons, qu'ils devraient se déplacer dans des moyens de transports non-magiques et donc, par conséquent, très peu discrets. D'un côté, il était évident que les transports moldus attireraient moins l'attention du ministère que les transports magiques, d'autant qu'ils étaient beaucoup plus difficiles à tracer mais, d'un autre, ils les laisseraient également exposés beaucoup plus longtemps. Pour pallier une partie de ce problème, Remus avait annoncé aux autres qu'ils les rejoindraient directement sur place, prétendant que Sirius avait un rendez-vous important en Écosse le jour de leur départ et que cela les retarderait. Il pouvait compter sur Ella pour appuyer sa décision, cette dernière sachant pertinemment que Sirius n'était pas vraiment dans la légalité. Mais ce n'était qu'une toute petite partie de ce qui l'inquiétait, et le reste ne cessait de grossir dans son esprit.

Juste en face de lui, son camarade de cellule, que Remus n'avait d'ailleurs jamais vu, chantonnait une chanson dans sa barbe en fixant le plafond. Il devait avoir vingt ans à peine et semblait essayer de se calmer. Remus ferma les paupières, s'efforçant de se concentrer sur autre chose pour ne pas risquer de lui arracher les yeux. Il était fatigué. L'approche de la pleine lune ne l'avait pas rendu malade cette fois mais l'angoisse l'avait volontiers remplacée pour le laisser sur les rotules. Il était donc arrivé au ministère épuisé, à fleur de peau et avec l'atroce sentiment que la nuit serait longue et difficile. Une minuscule partie de lui espérait même qu'elle serait suffisamment difficile pour le laisser trop faible pour partir en vacances (ils devaient partir trois jours plus tard) mais le reste de son être culpabilisait déjà à l'idée de décevoir Sirius.

- Éloignez-vous les uns des autres, tonna un voix grave dans le couloir devant la cellule.

Remus jeta un coup d'œil par la lucarne qui trouait le mur en pierre et donnait, par on ne savait quel procédé magique, sur le ciel. Ce dernier, auparavant teinté de rose, était désormais bleu, la nuit approchant sérieusement. L'estomac retourné, Remus plaqua son crâne contre le mur et ferma les paupières, s'efforçant de souffler calmement. Un picotement désagréable courait déjà le long de sa colonne vertébrale et dans ses articulations prêtes à craquer sous la force de la transformation. Des images de Sirius, arrêté par le ministère, lui traversèrent l'esprit. Il se força à les écarter ; il ne se sentait jamais très à l'aise à l'idée de penser à lui dans un endroit peuplé d'Aurors, d'agents du ministère et sans aucun doute de sorciers doués pour la légilimancie. Dans les cellules voisines, des premiers gémissements se firent entendre, puis des cris, et Remus sentit bientôt la douleur irradier dans tout son corps. Il se prépara à la perte de conscience qui suivrait invariablement, à la sensation de ses membres qui s'allongeaient, à sa peau qui deviendrait soudain incandescente.

Les temps perdusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant