Chapitre 43 - Tristesse passe

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CW : mention de suicide

17 juin 1995

Lorsque Sirius émergea du sommeil ce matin-là, le soleil était presque à son zénith et l'ensemble des tentes avait été déserté. Remus, qui n'avait que très peu dormi, avait pris soin de quitter la sienne à l'aube en espérant ainsi retarder la confrontation avec son compagnon. Il s'était baladé autour de la ferme, profitant du soleil d'été et s'efforçant de ne pas trop gamberger. Il devait admettre que, malgré tout ce qui s'était passé dans sa vie ces dernières semaines, se retrouver dans la nature et sous le ciel bleu lui était d'une grande aide. Les arbres l'avaient toujours apaisé, surtout en été. Puis, lorsqu'il était revenu au camp, il avait trouvé Ella, Evan et Miceala occupés à préparer le petit déjeuner, et apprit que Mark était parti faire des courses au village.

Ils ne parlèrent pas de la soirée. Ella s'enquit de la qualité de la nuit de Remus, qui ne s'étala pas et, comme si de rien n'était, ils disposèrent de quoi manger sur la table pliante. Malgré tout, tout le monde se tut pendant un bref instant lorsque le bruit de la fermeture éclair de la tente se fit entendre. La tignasse brune de Sirius émergea et Remus sentit malgré lui ses épaules se tendre. Il se sentait un peu responsable de ce qui s'était passé la veille. Il planait sur lui un désagréable mélange de honte, de culpabilité et de malaise ; et il craignait d'avoir gâché les vacances de ses amis. Le teint de Sirius était pâle et il s'assit lourdement sur une chaise pliante, le regard fixé sur ses genoux.

- Un jus d'orange ? demanda Evan en lui tendant un verre.

- Ouais, merci, lâcha Sirius d'une voix basse.

Remus ne savait pas s'il était honteux ou si la gueule de bois lui était particulièrement difficile à vivre. Il se focalisa sur son propre petit déjeuner, mal à l'aise. Dès qu'il eut terminé, il s'échappa pour aller rincer son bol, soulagé de se soustraire à cette atmosphère quelques instants. Mais il n'eut pas beaucoup d'efforts à faire, cependant, car à peine fut il revenu au camp qu'il fut forcé de constater que Sirius l'évitait. L'homme faisait en sorte de ne pas croiser son regard, s'attelait systématiquement aux tâches auxquelles Remus ne s'attelait et, bientôt, ce fut le milieu de l'après-midi, sans que les deux hommes ne se soient adressé ni une parole, ni un regard. Malgré lui, Remus était blessé, mais il savait qu'il ne tenait qu'à lui de faire un pas. Il s'efforça de ne pas grimacer lorsqu'il vit Evan et Sirius s'éloigner du camp en direction de la forêt pour une balade impromptue à laquelle Remus n'était manifestement pas le bienvenu.

- Il m'en veut, lâcha l'homme en se laissant tomber dans l'herbe à côté d'Ella et Micaela, qui étaient occupées à griffonner sur un carnet.

- Je suis désolée pour hier, lâcha Micaela. J'ai complètement gaffé.

- Il était déjà bourré, de toute façon, souffla Remus. Ça ou autre chose...

- Il n'a pas l'air très... bien, en ce moment ? tenta Ella d'une voix hésitante.

- De toute évidence.

- Je ne pense pas qu'il t'en veuille, Remus. Tu n'as rien fait.

- Il s'est mis en colère contre moi.

- C'était l'alcool qui parlait. C'est toujours aux gens qu'on aime le plus qu'on dit le plus d'horreurs dans ces moments-là.

- De quoi il parlait, quand il disait qu'il allait se retrouver seul ? demanda Micaela.

- C'est compliqué, répondit Remus. Mais disons que Sirius n'a jamais été du genre à bien supporter la solitude. Et en ce moment... il est plutôt seul.

- Tu ne peux pas rester avec lui ? demanda naïvement Micaela.

- Disons que je travaille beaucoup.

Il n'était pas facile de parler de la situation en présence de la jeune femme, et ce fut encore plus difficile quand Mark arriva à son tour, s'asseyant avec eux.

Les temps perdusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant