« Ils sont un même être en deux êtres ; là c'est, si je ne me trompe, la définition des amis parfaits. »
Emile ZolaFace à notre unique dispute, nous avions un million de jeux, de petites habitudes et complicités entre nous qui n'avaient de limites que notre imagination.
Je rentre à l'appart, et m'installe pour fumer une clope à côté d'Evalina sur le canapé, Victor est là aussi. Victor est toujours là. Il est accompagné d'un type que je n'ai jamais vu, un blond un peu superficiel et aspergé de parfum qui ne manque pas de vouloir se glorifier en permanence. Peut-être l'effet Evalina, qui était habillé plutôt sexy aujourd'hui. Les garçons se comportent de manière étrange lorsqu'une fille jolie se trouve dans la même pièce qu'eux, une manière moins naturelle qu'à l'accoutumée. Les blagues salaces, sexistes et autres passent aux oubliettes et le but recherché c'est faire rire la demoiselle. Mais Evalina est difficile niveau humour. Il est évident que nous ne partageons pas le même humour que le reste des gens. Alors quand j'entends ce type sortir ses plus belles anecdotes et scruter dans les réactions d'Evalina une quelconque marque de sa victoire, je jubile. Evalina reste de marbre au charme du blondinet. Elle tournicote ses cheveux de manière rythmique tout en feuilletant son magasine. Bien sûr, par politesse, elle répond au type des « oui », « non », « pourquoi pas », « j'ai entendu dire ». Lorsqu'elle sort enfin de sa lecture elle me regarde et on rit. Elle sait que j'adore ces moments.En fait, Evalina et moi avons beaucoup de passions analogues. Mais notre plus grande passion, celle qui nous rassemble autour de valeurs communes, est la passion que l'on nourrit pour les cons. Il y en a de toutes sortes. Cela commence toujours pareil : des petits cons, des jeunes cons, des sales cons, des vrais cons, des vieux cons. Et surtout un jeune con devient un vieux con qui fait et élève des petits cons. C'est une chaîne de l'histoire naturelle des espèces. Il n'y a pas d'âge pour ça, pas de classe sociale, pas de bord politique, pas de confession, pas de profession type. Ils sont partout autour de nous, dans notre famille, dans nos connaissances, à notre travail. On les côtoie sans cesse. Leur variété, leur richesse, est un puits sans fond de délice pour Evalina et moi. Quand il faut rectifier du con, on est là, on est plus que là même, on est omniprésent.
Le type, cité précédemment, narrait avec précision le contenu de sa formation en Master 2 professionnel.
- Tu vois c'est assez délicat d'allier ce genre de recherches avec la dynamique qui est mise en place dans la structure dans laquelle je bosse. Il y a un certain nombre de conventions à suivre contre lesquelles je ne peux pas m'ériger. C'est une activité complexe. Ce n'est pas comme serveuse ou surveillant dans un bahut... Moi je fais un travail un peu plus...intellectuel ! Nous lance-t-il fièrement.
Nous nous sommes regardés avec Evalina pour savoir lequel de nous deux allait commencer à répondre à cet affront. Ce n'est pas qu'elle ou moi ne sommes pas assez grand pour nous défendre...nous aimons bien jouer en double, c'est tout. Comme je ne suis pas plus gentleman que cela, j'ai commencé :
- Ah oui ? Parce que toi tu programmes des fusées pour la NASA, c'est ça ? Quand tu rentres et que ta mère te demande ce que tu as fait dans la journée en te servant ton quatre heures, tu lui réponds : « Désolé Maman c'est classé secret défense. Je ne peux pas en parler. Peux-tu me passer le lait s'il te plaît ? »
- Tu veux me dire en quoi c'est plus « intellectuel » ? Enchaina Evalina avant que le mec ait pris le temps de répondre. Au vu de ce que tu nous as dit, tu n'es qu'un petit chargé de sous-mission, stagiaire bien docile, juste bon à avaler toutes les tâches ingrates que les autres n'ont pas envie de faire, le tout sans broncher. Car il est clair que tu manques de répartie.
- Cela m'a l'air furieusement épanouissant comme formation.
- Et puis niveau rémunération attention, ils ne se foutent pas de sa gueule, il gagne au moins quatre cent cinquante euros par mois. C'est bien ça !? Ajouta Evalina un peu moqueuse.
Elle prit sa veste et nous partîmes sans nous retourner. C'est toujours ainsi, sans se retourner. Ça c'est nos sorties à Evalina et moi. Dignes jusqu'au bout.
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(sans)timent
RandomAvez-vous déjà imaginé ne ressentir aucune émotion ? C'est ce que vit Nathanaël Detrait, un jeune homme de 27 ans, atteint d'ataraxie depuis sa plus tendre enfance. Face à n'importe quelle situation il ne ressent rien. Absolument rien. Alors, tel u...