Entre nos lignes

6. Grand frère protecteur

MAXIME

Presque essoufflé d'avoir couru de peur que Maëlle rate son rendez-vous avec le médecin, je pousse la porte d'entrée de mon appartement. Ma sœur est dans le salon, elle semble m'attendre. Quand elle me voit, elle effectue une grimace avec ses lèvres.

— Je suis désolée...
— Pourquoi tu t'excuses ?
— De t'avoir interrompu.
— Je t'ai dit que le rendez-vous était terminé, j'étais seul avec Elina depuis quelques minutes. C'est quand ce rendez-vous ?
— Dans un peu plus d'une heure.

Je hoche la tête et me dirige vers la cuisine pour m'hydrater, ce footing improvisé m'a donné soif.

— D'ailleurs, pourquoi tu vas voir le médecin ?
— Quand j'ai dit à mon neurologue d'Orléans que j'allais déménager à Paris il y a trois mois, il m'a recommandé le nom de l'un de ses confrères. J'avais appelé la semaine après mon arrivée, mais j'ai pas eu de rendez-vous avant aujourd'hui, il est overbooké.

Je stoppe mon mouvement et laisse mon verre en stand-by à quelques centimètres de ma bouche.

— Attends, tu vas me dire que c'est ton premier rendez-vous depuis des mois ? m'indigné-je.
— Avant de t'énerver, sache que je suis allée voir mon ex-neurologue avant de venir sur Paris et que j'ai souvent des séances de kiné. Ceci étant dit...

Elle soupire.

— Ce rendez-vous ne sert pas à grand-chose.

Je m'étrangle avec ma salive.

— Bien sûr que si, Maëlle, il va te faire passer scanner et IRM pour voir l'état de ta moëlle épinière et sans doute continuer les recherches de son confrère pour...
— Maxou, stop. Pourquoi tu t'accroches encore à l'espoir que je vais pouvoir remarcher ? Ça fait deux ans que je suis clouée dans ce fauteuil et y a pas eu d'amélioration. En plus, je l'ai accepté maintenant, c'est ça ma vie maintenant et j'en suis heureuse et tu sais pourquoi ? Parce que je suis vivante.

Maëlle m'étonnera toujours par sa force de caractère et surtout, son courage. Au début, quand elle a qu'elle était paraplégique, elle a beaucoup pleuré et est tombée dans la dépression, mais elle a su remonter la pente et aujourd'hui, elle va mieux, elle a même une joie de vivre qui m'impressionne, elle ne se laisse pas abattre par son handicap. Dès le début, ses médecins ont été très clairs : il y a peu de chances pour qu'elle puisse remarcher un jour et si elle n'y croit plus, moi, je ne cesserai jamais de le faire. J'ai confiance en la vie et en sa bonne étoile.
Ne sachant pas quoi dire après sa tirade, je me penche vers elle et le prend contre moi.

— T'as préparé les papiers qu'il te faut ?
— Mise à part les conclusions de mes rendez-vous précédents et au pire mon carnet de santé, je n'ai besoin de rien d'autre. Enfin en tout cas, çe n'est pas  précisé.
— Je vais les chercher.

Je me dirige vers sa chambre qui se situe à côté de la mienne et, dans un placard de son bureau, je m'empare de son dossier médical avant de regarder l'heure sur ma montre. Il ne faut que trente minutes de métro pour aller jusqu'à la Pitié Salpêtrière, mais je préfère partir plus tôt. Avec les transports parisiens, on n'est jamais à l'abri d'un incident.

— C'est bon, je les ai, indiqué-je en revenant vers le salon. On y va ?

Elle hoche la tête, attrape son sac et son manteau qu'elle enfile sur le porte-manteau de l'entrée puis nous nous dirigeons à l'extérieur. Dans un veine d'espoir, je me dirige vers l'ascenseur, mais il est toujours en panne. Je grogne en revenant sur mes pas.

— Fais-moi penser à appeler le syndic' en revenant pour le faire réparer rapidement.

Cet ascenseur est une plaie, s'il ne tombe pas en panne au moins une fois par mois, c'est un miracle.
Je tends son dossier médical à ma sœur pour qu'elle le tienne puis je me penche vers elle pour qu'elle puisse enrouler ses bras autour de ma nuque pour que je puisse la porter, à défaut de pouvoir faire autrement. Mon bras gauche passe en-dessous de ses jambes pour la maintenir contre moi et de l'autre, je ferme son fauteuil que je tiens fermement pour éviter de faire deux aller-retour entre le rez-de-chaussée et le premier étage. Heureusement que je n'habite pas au cinquième...