Entre nos lignes

10. Dîner d'anniversaire

ELINA

— Mais non, je te jure, Bastien, son idée n'était pas mauvaise, mais elle n'allait jamais tenir la route. Si on fait ça, oui le livre va se vendre, mais pas autant pour qu'il soit classé numéro 1, or, il me faut absolument ce succès.

En face de moi, mon meilleur ami, a une main sur le menton, semblant réfléchir.
Après la catastrophe de mon rendez-vous avec Maxime, je l'ai appelé en urgence, il a débarqué une demi-heure plus tard. Bastien est vraiment un ami en or.

— Donc votre collab' est terminée ?
— Ça semble bien parti, en tout cas.
— Elle en pense quoi ton éditrice ?

Je hausse les épaules.

— Je sais pas, je lui ai pas envoyé le mail. C'est évident que ça ne va pas lui plaire, mais bon...
— C'est pas ton genre de baisser si vite les bras, Eli'.
— Je sais, mais c'est mieux comme ça à mon sens, on n'arrivera à rien si on se prend le chou à chaque fois.
— Mais son idée, elle est vraiment pas bien ou alors tu as refusé juste par esprit de contradiction ?

J'arque un sourcil, surprise par sa remarque. Il pense vraiment que j'ai refusé parce que l'idée ne venait pas de moi ? Je sais que, par moment, je peux paraître autoritaire et assez égoïste, mais si sa proposition avait été excellente, il était évident que j'allais l'accepter.

— Fais-moi le topo, m'incite-t-il.

Je le regarde encore avec une lueur étrange, mais quand je comprends qu'il est sérieux, je me lance dans le speech.

— Ben franchement, je vois pas le problème là-dedans, je la trouve géniale et très originale, son idée.
— Tu trouves ?
— Mais oui ! À mon avis, tu devrais y réfléchir plus sérieusement.

Il n'a pas tort, ça ne coûte rien de me repencher sur la question, je fais confiance à son jugement.
Je jette ensuite un œil à l'heure sur mon téléphone et bondis presque du canapé quand je me rends compte qu'il n'est pas loin de 18h30.

— Merde ! Mon frère a réservé le resto pour 20h et il faut encore que je me prépare et que j'aille sortir Duchesse. On reprend cette conversation plus tard ?
— Ouais, mais va t'apprêter, je vais promener le chienne.

À l'entente du mot, Duchesse lève une oreille et se lève pour s'approcher de Bastien, la queue frétillante. Je ris même si, tous les jours, elle me fait le même cinéma.

— T'es sûr ?
— Mais oui, allez, vas-y ! Duchesse, vient ma fille, on va aller se balader !

Je profite qu'il se dirige vers l'entrée pour rentrer dans ma chambre pour récupérer la robe de cocktail rose saumon que j'avais préparé au préalable, et file à la douche. Nue face au miroir, je dispose mes deux mains en forme de cœur sur mon ventre qui pousse au fil des mois et sourit avec attendrissement. Dans quelques mois à peine, je porterai enfin mon enfant dans mes bras et même si ça a été compliqué, que j'ai voulu baisser les bras plusieurs fois et que je sais qu'un long chemin m'attend, il me tarde de tenir le rôle le plus important de ma vie.
Mais trêve de penser.
Je me glisse sous le jet d'eau chaude d'om j'y ressors quinze minutes plus tard, les cheveux et le corps propre. Je sèche ensuite ma crinière de lionne, enfile ma robe que j'ai acheté sur les Champs-Elysées ce matin, puis me coiffe, me parfume et me maquille. Prête, je chausse mes lunettes, me contemple dans le miroir et sourit, satisfaite. Au départ, je souhaitais me faire une tresse africaine, mais finalement, j'ai opté pour les laisser lâcher en les bouclant légèrement.
Les chaussons aux pieds, je sors de la pièce embuée et retrouve Bastien et Duchesse dans le salon.

— Mais waouh, quelle bombe ! me complimente Bastien, les yeux rivés sur moi.
— Merci.
— Attends, bouge pas, j'envoie la photo à Romane. Franchement, si je ne savais pas que tu allais fêter l'anniversaire de ton frère, j'aurais pu penser que tu avais un date.
— Romain à trente ans aujourd'hui, je veux marquer le coup, c'est tout. Y a du gel sur la route ou pas ?
— Non, absolument pas.
— Alors je peux mettre mes talons.