Les Maraudeurs et le Maître des Corbeaux (tome 7)

Chapitre 94 - SIRIUS BLACK

- Au plan !

Les six verres tintèrent les uns contre les autres et, d'un même mouvement, ils burent une longue gorgée d'hydromel.

Les Maraudeurs, Lily et Patricia se trouvaient assis sur la terrasse qui s'étendait de l'autre côté de l'énorme fenêtre de leur QG. En cette soirée d'été, une petite brise fine faisait bruisser les feuilles des arbres de la Forêt interdite qui encerclait le parc de Poudlard et qui traçait une ligne sombre jusqu'à l'horizon. Le ciel était déchiré par un somptueux couché de soleil d'un orange sanguin, qui venait étaler sur les hautes tours du château des ombres étranges. Déjà, dans ce demi-jour, quelques fenêtres, çà et là, commençaient à s'allumer. Au chant des oiseaux venait s'ajouter les cris d'amusement de quelques élèves qui, comme chaque été, profitaient de la chaleur pour se baigner dans le lac.

Alors qu'il sentait le goût de miel et la chaleur de l'hydromel couler le long de sa gorge, Sirius restait assis sur sa chaise, les jambes allongées devant lui, à regarder pensivement ce décor qu'il connaissait aujourd'hui par cœur. Il avait du mal à se dire que ce moment, qu'il avait pourtant attendu avec impatience ces derniers temps, était enfin arrivé. Il n'était plus un élève de Poudlard. Il était un adulte, à présent.

A sa grande surprise, cette seule pensée suffit à le remplir de mélancolie. C'était terminé, cette vie au château. Cette vie qui, pourtant, l'avait rendu heureux ces sept dernières années. Car il y avait eu quelque chose de réconfortant, dans ce quotidien bien organisé, à Poudlard. Ces repas pris à la table des Gryffondor, dans cette magnifique Grande Salle. Ces couloirs toujours bondés d'élèves dans les intercours. Ces moments où il s'asseyait toujours tout au fond avec James, Remus et Peter, durant les cours. Leurs plaisanteries, leurs rires, leurs conversations passionnées sur tous les mystères qu'ils avaient essayé de percer. Les entraînements, chaque semaine, au stade de Quidditch. Les matchs sous les acclamations des autres élèves. Leurs discussions, les soirs, dans leur dortoir, avant de se coucher.

Tout cela allait lui manquer. Et cela commençait déjà un peu à l'angoisser, à vrai dire. Devenir un sorcier adulte et indépendant, c'était super. Mais il quittait un château magnifique, une vie de rêve avec ses amis dans le lieu le plus magique qu'il avait jamais connu pour... pour quoi, en fait ? C'était surtout cela, qui lui était le plus angoissant. Pour de l'inconnu. Et de l'inconnu qui ne faisait pas rêver. Le monde, tel qu'il était lorsque Sirius avait fait sa première rentrée en 1971, n'était plus le même aujourd'hui, en ce début d'été 1978.

Sans vraiment réfléchir, Sirius attrapa la bouteille d'hydromel et se mit à resservir les cinq autres. Patricia tourna un regard sentencieux sur lui.

- Tu es sûr, Sirius ? Il faut qu'on soit en forme, demain. Pas de folie, ce soir.

- J'ai juste envie de porter un autre toast.

Elle hocha la tête et, imitée par les autres, elle leva son verre. Sirius s'était servi en dernier. Il leva le sien à son tour.

- A Poudlard ! déclama-t-il.

Les autres approuvèrent ce toast.

- A Poudlard ! répétèrent-ils d'une même voix.

Il y eut un bref silence durant lequel ils burent tous une nouvelle gorgée d'hydromel.

- Ce château va me manquer, laissa finalement tomber Sirius en posant son verre sur la table en bois.

- Bien sûr, dit Remus, il va nous manquer à tous. Poudlard a été notre maison durant près de sept ans. On a tellement de souvenirs en commun avec cet endroit.