T.2 | Chapitre 16

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Hillmore University, Angleterre

Mercredi 21 février

[Kate]

Allongée en étoile de mer à même le sol, je lorgne le plafond. Je déprime sans même savoir pourquoi. Enfin si, je sais pourquoi, mais les raisons sont assez subtiles. Vous voyez, ces journées où rien ne se va dans votre sens ? Ce sentiment que l'univers entier semble s'être décidé à vous mettre des bâtons dans les roues ? C'est exactement ce que je ressens en ce moment. C'est une cumulation de plusieurs petits événements : je me suis levée en retard, j'ai taché la chemise de mon uniforme en mangeant, mes cheveux se mettent mal, j'ai eu une mauvaise note et je me suis cassé la figure devant tout le monde. Pris séparément, ces incidents ne sont pas dramatiques, mais assemblés ensemble dans la même journée, ça vous fout le moral dans les chaussettes. D'autant plus que mes amies me manquent et que ma vie sentimentale est un enfer. Franchement, je déteste me plaindre, néanmoins, il y a des jours où j'aimerais tout plaquer pour partir vivre au Pérou et élever des alpagas.

C'est mignon, les alpagas.

Je roule sur le ventre, replie mes bras sous ma tête et pose ma joue sur le dos de mes mains. Dans cette position, j'ai une vue directe sous le lit de Soren, là où traînent quelques poussières. Je repense à son idée débile de s'y planquer lorsque mon père était venu me chercher jusqu'ici. Au moins, me remémorer ce souvenir a le mérite de m'arracher un petit sourire.

Je roule une nouvelle fois pour me remettre sur le dos, les bras et les jambes écartés. L'étoile de mer semble être ma « position déprime » préférée.

De toute façon, il y a déjà une grosse tache qui saccage ma chemise, me rouler par terre avec ne fera jamais pire.

En fixant le lustre du plafond, je défais ma cravate et la lance sur le côté sans même m'attarder sur son point de chute. Le huit sur vingt que je me suis ramassé aujourd'hui prend le pas sur mes pensées déjà bien négatives. Je replie mon bras sur mon visage et lâche :

— Meeeeerdeuuuuuuh.

J'ai intérêt à avoir assuré avec mon travail rendu samedi dernier. Heureusement que Soren m'a apporté son aide, sinon je ne sais pas comment j'aurais pu le rendre dans les temps. Il va falloir que je lui offre des fleurs pour ça.

Non, je vais d'abord attendre d'avoir ma note. Si nous avons foiré, j'espère qu'il pleurera avec moi, ou au minimum, qu'il sèchera une nouvelle fois mes larmes.

Sécher mes larmes.

Cet autre souvenir émerge dans mon esprit et un nouveau sourire, cette fois plus tendre, fleurit sur mes lèvres. Je suis obligée d'admettre que notre cohabitation crée des moments qui resteront gravés dans ma mémoire. Quand ma vie est aussi nulle que ça, notre colocation n'est finalement pas une si mauvaise chose.

Et dire que je comptais le déteste, au début. Ma détermination s'est vite envolée quand j'ai entraperçu cette partie de lui qui n'est pas vantée par sa réputation.

Il n'agit pas de la même façon avec toi, me souffle une voix.

Je l'étouffe immédiatement. Cette pensée me semble terriblement présomptueuse, bien que j'aie compris que Soren ne s'intéresse qu'à un nombre restreint de personnes.

Aux personnes à qui il tient, complète la voix.

Je la chasse d'un revers de main mental. Ça, pour le coup, c'est prétentieux. Ce serait mentir de dire qu'il ne m'apprécie pas, mais ça s'arrête là. De l'appréciation et de l'inquiétude pour sa colocataire.

PERFECT ENEMIES [T.1 & T.2]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant