T.2 | Chapitre 19

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Hillmore University, Angleterre

Vendredi 8 mars

[Kate]

Un sac de voyage à la main, je me dirige vers l'un des cars qui transporteront les étudiants vers l'université de Cumbria. J'ignore pourquoi j'ai pris le conseil d'Evy au pied de la lettre, mais le résultat est là : je me suis inscrite comme supporter pour la sortie de ce week-end.

En réalité, puisque ma discussion avec mon amie date d'hier, il n'y avait plus de place disponible lorsque je me suis rendue sur la plateforme en ligne pour m'ajouter à la liste. Les places dans les autobus étaient complètes. Lors de ce genre d'événement, il faut toujours s'y prendre à l'avance, car les places partent vite, surtout avec une équipe sportive qui a la popularité de celle de rugby. Au lieu d'interpréter ça comme un signe du destin et de laisser tomber – ce que j'aurais sans doute dû faire – j'ai appelé mon père pour lui demander s'il pouvait faire quelque chose.

Il a été surpris et m'a demandé pourquoi j'avais une soudaine envie d'assister à un match, ce qui ne m'était pas arrivé en quatre ans d'étude. Jamais durant mon bachelor's degree je ne suis allée voir un seul match de rugby. À vrai dire, la discipline ne m'a jamais intéressée, puisque mon père s'est évertué à m'en éloigner.

Mais ce n'est pas pour la discipline que je veux me rendre à ce match.

La réponse que je lui ai fournie est vague ; je lui ai simplement dit que j'étais curieuse, qu'il ne me restait qu'un an et demi d'étude et qu'il fallait bien que je participe à une sortie de ce genre, juste pour voir. J'ai aussi plaidé l'ennui et le besoin de sortir de l'enceinte de l'université. Mon père n'a rien dit, toutefois je sais qu'il n'a pas cru à mon baratin, surtout après la discussion que nous avons eue hier à l'infirmerie. Il doit très certainement avoir Soren dans le collimateur, mais je m'en fiche.

Les joues gonflées d'air, j'arrive devant le car qui va finalement m'accueillir ; celui des joueurs. C'est le mieux que mon paternel ait pu faire pour moi. Il restait une seule et unique place, celle à ses côtés dans l'autobus de l'équipe.

J'expire l'air bloqué dans ma bouche. Qu'est-ce que je fais là ? Pourquoi me suis-je autant démenée pour venir ici ?

Ce sont les questions qui tournent en boucle dans ma tête depuis que je me suis réveillée ce matin. Est-ce que mon don de sang aurait diminué temporairement les capacités réflexives de mon cerveau et m'aurait changé en être têtu ? Peut-être.

Ça ne sert à rien de tergiverser des heures, tu es là, maintenant !

— Enfin là, me lance une voix grave.

Je tourne la tête en direction de mon père. Il est vêtu de sa tenue d'entraîneur, un sifflet autour du cou et me lorgne avec une fausse sévérité. En réalité, il s'agit juste de son air naturel.

— On dirait que tu sous-entends que je suis en retard.

Les bras croisés, il jette un coup d'œil aux deux cars remplis de supporters – enfin, surtout de supportrices – qui accompagne celui des joueurs.

— Tu es la dernière, me souligne-t-il.

— Quoi ? Pourtant, je suis à l'heure !

— Disons que tous les autres étaient en avance.

Je dévie mon attention vers les fenêtres des autobus, à l'intérieur de celui des supporters, je vois de l'agitation. Ils trépignent d'impatience. Ils en ont de l'énergie pour un vendredi fin de journée. Mes cours m'ont lessivée, pour ma part. J'ai à peine eu le temps de rentrer dans ma chambre, de faire mes affaires en vitesse et de rejoindre le point de rendez-vous.

PERFECT ENEMIES [T.1 & T.2]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant