T.2 | Chapitre 22

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Hillmore University, Angleterre

Mercredi 20 mars

[Kate]

L'épisode de ma série terminé, j'éteins l'ordinateur posé sur mes jambes. Je rabats ensuite la couverture et me lève de mon lit pour le déposer sur mon bureau. Lorsque j'achève mon geste, mon regard dévie sur le matelas de Soren. Cela fait dix jours que nous sommes rentrés du match de Cumbria. Dix jours que nous avons repris notre traintrain quotidien sans mentionner ce qui s'est passé là-bas.

Je craignais que mon coloc agisse bizarrement, qu'il me fuie comme il l'avait fait lorsque nous nous étions embrassés dans le jardin, près de l'étang. Je me suis trompée. Il agit normalement. Il ne m'évite pas spécialement sans pour autant chercher à entrer en contact avec moi. Nous avons quelques petits moments de complicités, mais sans aucun rapprochement. Il règne entre nous une nouvelle ambiance, ce qui me laisse penser qu'il a réussi à catégoriser notre relation dans son esprit bien rangé. Enfin, je crois. Moi, je n'arrive toujours pas à mettre des mots dessus. 

Ça m'est égal, je n'en ai pas besoin.

Ces derniers jours ont donc été calmes, sans accro, dans une parfaite routine d'étudiants. Je continue de fréquenter Evy et Noalia, qui sont vraiment sympas. Ni l'une ni l'autre ne me parle de Soren, contrairement à Laura et Clara qui ne cessent de m'envoyer des messages à ce sujet, ce qui m'oblige à constamment leur répondre avec un smiley qui lève les yeux au ciel.

Les journées rallongent, les températures s'adoucissent progressivement. Chaque jour, je me sens un peu mieux dans ma peau et ma déprime se rétracte tout doucement. Je n'oublierai jamais la trahison de Rebekka, mon cœur en portera toujours la cicatrice et je n'ai plus aucune envie de goûter à l'amour. Néanmoins, je peux dire que je commence à aller de l'avant. Le temps passe et la vie continue. Le karma semble m'avoir également lâché la grappe. Plus de chute humiliante ou de tache voyante.

À cette pensée, j'étire un sourire. Bon sang, ça fait du bien de se sentir mieux ! Je me souviens encore de l'épave que j'étais quand je suis revenue à Hillmore, il y a deux mois et demi. J'avais vraiment honte.

J'allais me diriger vers la salle de bain pour me mettre en pyjama quand la porte de la chambre s'ouvre. Soren la franchit en grimaçant avant de la refermer derrière lui. On dirait un ouvrier du dix-neuvième siècle qui rentre de la mine. Il balance son sac de sport dans un coin et marche dans une posture toute raide jusqu'à son lit avant de s'écrouler dedans. Je l'observe, un sourcil arqué.

Bien qu'il ne me fuie pas, il passe très peu de temps dans notre chambre ces derniers temps. Nous nous croisons le soir et le matin, c'est tout. Pourtant, je ne le ressens pas comme une esquive. Je crois qu'il s'entraîne beaucoup.

— Tu devrais lever le pied sur les activités sportives. Tu ressembles de plus en plus à une loque.

— Une loque toute raide, alors, grogne-t-il dans son oreiller.

— Tu as mal où ?

— Le dos.

— D'accord, mais où précisément ?

— Partout.

Voilà qui est très précis.

— J'ai l'impression que mes muscles se sont transformés en sac de nœuds. Le coach m'a passé un savon, reprend-il.

— Il a raison. Je ne comprends pas pourquoi tu te tues au sport depuis ton dernier match. Tu ne pourras jamais participer au suivant, si tu continues comme ça.

PERFECT ENEMIES [T.1 & T.2]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant