Chapitre 27 - La reine condamnée

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C'est décidé, je lui dois la vérité. Je ne veux plus poursuivre dans le mensonge. Il ignorait mon nom, et pourtant, j'ai en cet instant l'impression qu'il est le seul à avoir rencontré celle que je suis véritablement.


Il n'y a pas de petits bénéfices à l'école. Toute occasion est bonne pour renflouer les caisses. Nous avons organisé une galette des rois et tous les parents sont conviés. Justine a fait les choses bien puisqu'elle a mis un mot dans le cahier de liaison afin de savoir quels sont les parents qui viendraient. Elle n'a fait cela que pour connaître la réponse de Jérémy, vous vous en doutez. Il serait regrettable de croiser Jérémy à l'école. Heureusement pour moi, il ne peut venir, au boulot à cette heure-ci. Travaillant à l'hôpital, ses horaires ne lui permettaient pas toujours d'être présent. Raison pour laquelle une nourrice venait parfois récupérer Nina.

    Après notre premier baiser, je me suis jurée de tout lui avouer. Pas sur le moment car je n'ai pas voulu gâcher l'instant avec cette histoire. Par conséquent, la soirée avait été parfaite. Nous nous sommes quittés sur le parking du cinéma après un dernier baiser échangé. J'ai bien réfléchi et je compte l'inviter chez moi pour lui en parler. Je lui expliquerai alors les craintes et les doutes qui m'oppressaient lors de notre rencontre. Il le comprendra, du moins c'est ce que j'espère au plus profond de mon être. Aussi, je ne le fais pas venir chez moi par hasard, car cela lui apportera la preuve que mes craintes sont désormais derrière moi.

    J'ai voulu le faire venir le weekend d'après, mais il n'était pas disponible. Cela va donc devoir attendre encore quelques jours, à mon plus grand regret. Maintenant que je me suis faite à l'idée de le lui dire, le mensonge m'est d'autant plus difficile.

    Nous sommes en fin de journée et je prépare la galette avec les collègues. Exceptionnellement, les élèves restent jouer dans la cour à la sortie des classes. Quelques parents arrivent et se joignent à nous. Ils sont peu nombreux, mais rien d'inhabituel.

    — Arrête de guetter le portail comme ça, me dit Justine.

    Chacun porte une assiette avec une galette coupée soigneusement. Il a fallu replacer des fèves à plusieurs reprises, celles-ci ayant la fâcheuse manie de se retrouver sous la lame des couteaux. Tenant mon assiette avec précaution, non pas que je sois maladroite, je réponds à Justine sur la défensive.

    — Je sais qu'il ne viendra pas, mais je préfère garder un oeil quand même.

    — Tu ferais mieux de regarder ce que tu fais, ton assiette penche.

    Je redresse soudainement l'assiette, sauvant in extremis la galette qui n'était qu'à deux doigts de faire un plat magistral.

    — J'ai tellement peur... dis-je tout bas.

    Je vois des collègues qui nous écoutent distraitement. Non par indiscrétion, mais peut-on vraiment s'empêcher d'écouter une conversation se tenant à côté ? Je lance un regard à Justine l'avertissant. Je pensais avoir été subtile, mais Justine poursuit en toute innocence.

    — Et de quoi tu as peur exactement ? 

    — Quand certaines personnes sont vues à un certain endroit, on peut s'attendre à les voir réapparaître à ce même endroit, dis-je d'un air énigmatique pour préserver au mieux l'intimité de notre conversation. Maintenant que la menteuse ne veut plus l'être, elle craint encore plus !

    La table est montée et tout le monde vient poser son assiette. Déconcertée, Justine me regard bizarrement. Elle croit certainement que je fais un AVC pour parler de la sorte sans comprendre que le message est codé. Je la fixe avec insistance et regarde un à un les collègues autour. La lumière se fait dans sa petite tête. En même temps, il est temps que l'information lui parvienne. Elle me fait un clin d'oeil. Message reçu.

Mon nom est SarahOù les histoires vivent. Découvrez maintenant