Orgon

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C'était donc vrai. En lui, cette flamme sanguinaire. Cette flamme destructrice... Ephémère lui avait montré ce qu'il ferait au monde à cause de la Flamme. Il tourna en rond dans la chambre qu'on lui avait alloué pour son séjour. Je ne suis que désolation et chaos... Suis-je donc destiné à faire régner la terreur sur les peuples comme mon père, et comme son père avant lui/ Impossible de regarder la vérité. Les souvenirs de sa vision et la culpabilité qu'il ressentait se déchaînaient dans son esprit. Il ne pouvait pas s'empêcher de penser à ce qu'il avait vu : Ephémère, perdue, brisée, et tout cela par sa faute. La Flamme qui brûlait en lui représentait une menace qu'il ne savait plus comment contenir.

Il ne pouvait croire qu'il transformerait cet être si pure en créature de l'Enfer. Il fixa, le regard vide, les nombreuses barres sur son bras gauche. Désespéré, il se laissa tomber contre le mur en larmes. Le soleil était bas dans le ciel, apportant une atmosphère lourde. Le contraste entre la lumière faible et les ombres environnantes reflétait parfaitement l'état de son âme en proie à des questionnements tiraillés.

Il plaça son front contre la porte en bois vieillie. Déterminé, il quitta sa chambre sans se retourner, couru dans les allées des jardins suspendus, quitta la Tour, parcouru la ville et arriva à la lisière du bourg, sur la même place où il était arrivé la veille.

Il s'arrêta un moment contemplant la Tour qui dominait la ville au loin. Il remarqua la boutique de Mr Louis et son cœur se serra. Il s'en voulait. Il était parti, laissant Ephémère à son sort sans se préoccupait une seule seconde de ce que elle, elle voulait.

Il s'assit sur une pierre ensablée et essaya de rétablir la connexion avec Ephémère. Doucement, il se retrouva face à ce visage qu'il connaissait bien maintenant. Ephémère fixait sans vie le grand miroir. De longs doigts tatoués au henné brossaient ses cheveux roux avec lenteur. Il reconnut les sœurs d'Ephémère derrière elle. Il comprit. Elle n'était plus là. Elle avait disparu de sa propre enveloppe charnelle. Sa vision de l'apocalypse avait plongé son corps dans un état catatonique. Mais il savait qu'elle était toujours là, quelque part, piégée dans son propre esprit. C'était de sa faute. Encore. Mais cette fois-ci il ne pourrait pas échapper à ses actions. Il ne voulait pas. Cette fille, elle était bien trop importante. Bientôt, il se retrouva de nouveau devant la Tour des Dieux. Grâce à son acuité de Dragonnier, il suivit l'empreinte d'Ephémère jusqu'à une large porte.

— Ephémère, murmura-t-il en posant sa main dessus.

Il ne ressentit rien d'abord, juste le froid de la pièce et le poids de son désespoir. Mais bientôt, il perçut une faible réponse, un écho lointain de la présence d'Ephémère. Elle n'était pas perdue, pas encore. Il y avait encore une chance de la ramener. Les yeux fermés, il se concentra, essayant de rétablir la connexion avec elle. Il se vit dans l'esprit d'Ephémère, dans ce paysage étrange et chaotique où elle errait sans but. Elle était là, immobile, figée. Il sentit son cœur se serrer, mais il ouvrit la porte malgré tout.

Les Lunes d'Atéor - Livre IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant